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centrafricaine: nos enfants dans la crise
Publié le mardi 1 decembre 2015  |  Corbeau news Centrafrique
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© Autre presse par DR
Un nouvel élan pour les enfants de Bangui avant la reprise des classes
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Le GHI, Global Hunger Index ou indice de la faim, est défini pour montrer le niveau de la faim dans les pays en développement et la Centrafrique remporte malheureusement la première place en 2015. A partir de cet indicateur et par corrélation entre pays, on constate des causes mais surtout des conséquences de la sous-alimentation sur la population et sur le développement d’un pays dans son ensemble.

En l’occurrence, je vais développer un sujet qui, à mon sens, devrait être au centre des discussions : l’impact de l’insécurité alimentaire sur les enfants de notre chère République Centrafricaine.

Cet indice de la faim est calculé par l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI) et nous donne un indicateur très fiable pour qualifier la situation d’un pays dans l’insécurité alimentaire, comme la Centrafrique.

Comment ce GHI est-il calculé ? Il se base sur quatre critères :
- la sous-alimentation de la population (part de la population ayant un apport calorique insuffisant),
- la mortalité infantile*,
- l’émaciation infantile* (amaigrissement très prononcé),
- le retard de croissance infantile*.
* Les trois critères infantiles concernent les enfants de moins de 5 ans.
Ces données sont fournies par les gouvernements des pays et différents organismes tels que l’Organisation Mondiale de la Santé à l’IFPRI qui calcule tous les ans cet indice de 0 à 100. Entre 35 et 49,9, le résultat est « alarmant ». S’il dépasse 50, le résultat est jugé « extrêmement alarmant ». Cette année, 8 pays se retrouvent dans une situation alarmante.
La RCA arrive en première position avec un score de 46,9, c’est effectivement alarmant… Cependant, il faut noter que la Centrafrique descend pour la première fois sous la barre « extrêmement alarmante » depuis 1990, étant plutôt habituée à 51. C’est un début encourageant ! En effet, en regardant les chiffres de plus près, on constate une amélioration des trois critères infantiles au cours de ces 10 dernières années. Espérons que cette tendance va continuer car les conséquences de la sous-alimentation sont nombreuses et perverses.

Au-delà de ce chiffre et des calculs mathématiques, nous pouvons tirer des faits probants.
Tout d’abord, la région la plus sinistrée est l’Afrique subsaharienne, suivie de près par l’Asie du sud.

Parmi les vingt premiers pays de cette édition 2015 se trouvent quatorze pays subsahariens : la RCA, le Tchad, la Zambie, la Sierra Leone, le Niger, l’Ethiopie, Djibouti, le Nigeria, l’Angola, le Mozambique, la Namibie, le Burkina Faso, le Zimbabwe et le Liberia.
On constate aussi que la plupart de ces 14 pays subsahariens font face à de fortes instabilités ou en sortent tout juste. Cela nous montre de façon flagrante que la faim et l’insécurité d’un pays sont étroitement liées. La RCA en est l’exemple typique. En crise depuis 2013, dans l’incapacité de soutenir une autosuffisance alimentaire, des voies d’accès pour le ravitaillement constamment en proie aux coupeurs de route, des conflits récurrents en province comme dans la capitale, des pillages de villages par les groupes armés… Ce sont autant de facteurs qui montrent le lien très fort entre l’insécurité et la sous-alimentation. La loi du plus fort reprend sa fonction et la population meurt de faim.
Les conséquences sont dramatiques…

Je ne listerai par toutes les conséquences de ces phénomènes pour la simple raison que chacune mérite un article à part entière. Je vais donc plutôt m’attarder sur le sujet le plus sensible à mon avis, celui des enfants impactés par la faim.
En effet, ce sont les premières victimes, tant au niveau de la santé physique que psychologique. Un enfant sous-alimenté va développer des problèmes de croissance graves, des maladies…

Il existe aussi un cercle vicieux qui fait malheureusement des ravages dans notre beau pays.
Les Centrafricains sont dans un état général de sous-alimentation. Les parents travaillent autant que possible pour nourrir leur famille mais il est souvent impossible de fournir suffisamment de nourriture à cause des pénuries, des inflations, etc. Ainsi, les enfants dans la majorité des foyers se retrouvent contraints à travailler dés leur plus jeune âge pour apporter leur contribution à la famille. Evidemment, au détriment de l’école.
La faim, les conflits et la déscolarisation sont aussi à l’origine du phénomène des enfants soldats.

Des enfants, livrés à eux-mêmes, s’enrôlent dans des milices armées, parfois de force mais souvent de leur propre volonté (vengeance, plus de famille). Ils devront travailler pour survivre au profit des miliciens (aller chercher du bois, de l’eau, voler de la nourriture dans les villages). Ils seront également témoins d’atrocités qui les traumatiseront psychologiquement. Ceux qui réussiront à fuir ces conditions se retrouvent bien souvent sans attache familiale, sans toit, analphabète et sans éducation scolaire. Leur réintégration dans la communauté centrafricaine est d’autant plus difficile et éprouvante.

Or, un enfant déscolarisé, c’est toute une génération gâchée et incapable de faire évoluer le pays. Ainsi, la RCA ne se laisse aucune chance pour un meilleur avenir, cette chance est réduite à néant par la nécessité de la faim et la négligence du système éducatif et des enfants en général.

Cette déscolarisation réduit les chances d’une vie future. Un adulte analphabète voit son insertion professionnelle compromise car toutes les portes d’un travail rémunérateur se ferment devant lui. Il s’agit au niveau d’un pays d’un frein au développement économique global. Les pays les plus développés pourront installer leurs propres entreprises au détriment d’entreprises locales et nationales à cause d’un manque cruel de cerveaux centrafricains. La population devient une masse engourdie et apathique, incapable de prise d’initiative mais aussi de volonté de développement de son patrimoine local. Cela compromet également l’exercice de la citoyenneté par manque de recul sur les différents gouvernements qui régissent le pays, renforçant le sentiment général de mise à l’écart de la vie et de la dynamique du pays.

Face à toutes ces injustices et incompréhensions, un phénomène systématique se développe, il s’agit bien sûr des groupes armés, coupeurs de route et pilleurs de villages. Forcément, à défaut de pouvoir s’insérer et subvenir à ses besoins, il devient nécessaire de survivre par d’autres moyens, ceux de la violence, de la corruption et du terrorisme envers la population.

Je me permets de citer La Rochefoucauld-Doudeauville, « L’éducation est pour l’enfance ce que l’eau est pour la plante ». Sans éducation, un enfant ne pourra s’épanouir et se développer pleinement. Et un pays ne peut pas se développer sans sa population…
Il ne s’agit pas là de l’unique solution mais d’un premier pas vers la sortie de cette crise nationale. Il consiste en l’éducation et la scolarisation des enfants d’aujourd’hui pour une population dynamique demain. Le gouvernement qui sera élu dans les mois à venir doit ouvrir les yeux sur ce phénomène. Il ne peut pas laisser son peuple dans le noir, dans l’obscurantisme et l’analphabétisme. Il est temps de parier sur l’avenir et sur nos enfants. Une rénovation des structures scolaires actuelles, le développement de nouvelles structures dans les régions isolées, la formation d’enseignants… Des petits gestes, certes coûteux, mais qui permettront à la Centrafrique de se relever à long terme et de montrer au monde entier ce dont elle est capable !



Yaya Issa Aboubakar
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