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En Afrique, le pape François craint surtout les moustiques
Publié le mercredi 2 decembre 2015  |  Centrafrique Presse Info
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© AFP par FILIPPO MONTEFORTE
Le pape François a choisi la fin du synode sur la famille pour béatifier Paul VI, le pape du concile Vatican II
Dimanche 19 octobre 2014. Rome. Place Saint-Pierre
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Pour les nombreuses foules et surtout les jeunes africains, le pape François, courageux et charismatique, semble être le seul qui puisse leur apporter justice et dignité

«En Afrique, je crains surtout les moustiques»: c’est par cette boutade que le pape François a répondu aux journalistes dans l’avion qui l’emmenait le 25 novembre au Kenya, malgré la mise en garde des services secrets français notamment en République centrafricaine (RCA). L’Afrique connaît une croissance économique, sociale, spirituelle et démographique impressionnante, bien qu’elle subisse constamment des conflits sanglants dans certaines régions. A Garissa (Kenya), en avril dernier, 148 étudiants en majorité chrétiens, ont été massacrés de sang-froid par le groupe islamiste Al-Shabab. Il y a environ 40 millions d’habitants au Kenya, dont 8 millions de catholiques.

Le but premier du pape a été de rencontrer surtout des jeunes pour qu’ils gardent espoir. Devant les représentants des différentes confessions chrétiennes, des chefs des communautés islamiques et des religions animistes, ainsi que du chef de l’Etat Uhuru Kenyatta et de nombreux politiciens, François a lancé un appel à résister ensemble contre la radicalisation des jeunes et les divisions ethniques qui avaient violemment divisé le pays. Mission accomplie semble-t-il, tant l’enthousiasme et la joie sincère des milliers de jeunes dans le stade de Nairobi, leurs chants, leurs danses – même celle de l’archevêque de Nairobi – ont été impressionnants, comme s’il était vraiment le seul qui puisse secouer positivement la vie politique du Kenya et combattre le fléau de la corruption!

Comme en Amérique latine récemment, il est allé aux périphéries, dans le bidonville de Kangemi, où, très choqué par la pauvreté, il a dénoncé les phénomènes de l’injustice dans la répartition et l’accaparement des terres au détriment des plus pauvres, ainsi que le non-accès à des services essentiels: «Priver une famille d’eau sous un prétexte bureaucratique, est une grande injustice, surtout lorsque l’on se fait ainsi du profit», stigmatisant ainsi les organisations criminelles aux services d’intérêts économiques et politiques qui utilisent aussi des enfants et des jeunes pour leurs affaires. Une critique contre les multinationales et ceux qu’elles corrompent dans de nombreux pays. Condamnant le terrorisme, il a appelé les autorités à pratiquer les trois T: terre, toit, travail, un développement durable – le climat est un bien commun –, et à respecter les droits de l’homme et des peuples à vivre dans la dignité.

Ce que le pape a dit en Ouganda

Arrivé ensuite le 27 novembre en Ouganda (37 millions d’habitants, dont 80% de chrétiens), le pape s’est adressé au président Yoweni Museweni (depuis 30 ans au pouvoir…) et à un parterre de dirigeants politiques et économiques du pays à Entebbe, en mots diplomatiquement choisis, mais clairs, expliquant le besoin d’une gouvernance bonne et transparente qui assure une sage et juste distribution des biens et autorise une large participation à la vie nationale… Une nouvelle loi limite maintenant la liberté des associations, comme dans d’autres pays. Auparavant il avait rencontré 50 000 jeunes enthousiastes au stade de la capitale venus de tout le pays, leur signifiant le besoin d’intégrité et d’honnêteté et mettant en garde contre la corruption, mais en mots plus directs puisqu’il a avoué qu’il y a aussi de la corruption au Vatican! «La corruption n’est pas un chemin de vie, mais un chemin de mort.»

Le pape en République centrafricaine

Dernière étape et la plus risquée, la République centrafricaine, les 29 et 30 novembre, 4,5 millions d’habitants, plus de 80% de chrétiens, 10% de Musulmans, 6% d’animistes. 400 000 personnes ont fui le pays. Dans un vibrant discours d’accueil plus religieux que politique, la présidente Catherine Samba-Panza confesse tout le mal qui a été fait en Centrafrique et reconnaît un besoin vital de pardon pour entrouvrir un avenir dans son pays. Des cris de joie sur son passage, des pas de danses en boubous colorés devant les casques bleus de la Minusco (qui n’ont pas réussi à ramener la paix…) donne l’impression d’un peuple fatigué de la guerre et pauvre qui accueille son sauveur. La guerre oppose depuis trois ans les anti-balaka, sorte de milices chrétiennes, aux membres de la Séléka, alliance de groupes rebelles à majorité musulmane longtemps marginalisée par le pouvoir, mais qui se renforcent aujourd’hui et menacent le pays de sécession. Le pape François indique tout de suite le chemin: le pardon et la réconciliation. Pas de paix sans pardon. L’évêque Desmond Tutu avait dit en Afrique du Sud: pas d’avenir sans pardon. Le pape, en allant à la cathédrale de Bangui le 29 au soir ouvrir la porte de la Miséricorde (le pardon pour tous), a posé un geste hautement symbolique en Afrique, allant aussi saluer l’imam présent à la messe. Très tôt le matin du 30, il a tenu sa parole et est allé dans le quartier musulman enthousiaste et a rendu visite à la Grande mosquée où flottait le drapeau du Vatican. Tout un symbole!

Prière avec un imam

Ce qu’il a dit ensuite dans son homélie devant 30 000 personnes avait une profondeur réparatrice inouïe pour ce peuple si éprouvé. Il a invité les jeunes à ne pas quitter le pays, mais à le reconstruire. Le pape veut montrer que ce ne sont pas les religions qui sont la cause de tant de mal, et qu’il faut au contraire les mettre au service de la réconciliation et de la fraternité. C’est pour cela qu’il a prié avec l’imam Omar Kabine Layamana qui, avec l’évêque Nzapalainga, s’efforcent tous les deux, courageusement, depuis des mois, de réconcilier les gens.

Une chose frappe au terme de ce voyage: pour les nombreuses foules et surtout les jeunes, ce pape courageux semble être le seul qui puisse leur apporter justice et dignité. En d’autres termes, cela veut dire que ni l’ONU, ni les institutions internationales, ni leurs propres gouvernements et leurs riches élites ne réussissent à améliorer durablement le sort des peuples. Des peuples et surtout des jeunes, pauvres, souvent délaissés par leurs dirigeants, qui dansent et chantent. Quelle magnifique leçon d’humanité. Un ange a passé.
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