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En Centrafrique, les déplacés attendent les résultats de la présidentielle pour "rentrer" chez eux
Publié le vendredi 19 fevrier 2016  |  AFP
Arrivée
© Autre presse par DR
Arrivée à Bangui d’un millier de déplacés de Bambari
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"Dologuélé, Touadéra, c'est Dieu qui choisira". Comme beaucoup de déplacés centrafricains du camp M'Poko, à Bangui, peu lui importe le nom du futur président. Marcelin veut d'abord quitter le taudis en ferrailles qu'il habite depuis deux ans et rentrer enfin chez lui.

Ils étaient des milliers dimanche à s'être déplacés pour voter à quelques pas du camp, lors d'un scrutin censé sortir le pays de trois années de violences intercommunautaires. Le 2e tour de l'élection présidentielle, dont les résultats se font attendre, opposait deux anciens Premiers ministres, Anicet Georges Dologuélé et Faustin Archange Touadéra.

Le camp M'poko, l'un des plus grands du pays, accueille encore près de 28.000 personnes, contre 100.000 en 2013, lorsque le pays a sombré dans le chaos. Mais à l'approche des élections, plusieurs centaines d'anciennes familles déplacées sont revenues "se mettre à l'abri, au cas où il se passe quelque chose", explique un humanitaire.

Dans les allées poussiéreuses de la zone 13, un quartier du camp, Francis Clothaire Himelet arbore encore un tee-shirt à l'effigie de Martin Ziguélé, son candidat favori, éliminé dès le premier tour du 30 décembre. "C'est mon président à moi", affirme le jeune homme.

Malgré la présence dans le camp de nombreux jeunes appartenant aux milices armées anti-balaka, le vote s'est déroulé dans le calme.

Marcelin n'a pas trouvé son nom sur les listes et s'est fait renvoyer de bureau de vote en bureau de vote toute la matinée, avant de finalement rentrer bredouille. "C'est pas grave, ma femme a voté" dit-il, conciliant. "Maintenant on attend seulement la proclamation des résultats pour partir, si la sécurité est là on rentre chez nous".

Sous la tente de Nadège, où la chaleur est suffocante en pleine saison sèche, la famille M'boma le répète en choeur: tous ne pensent qu'à retourner à leur vie d'avant. Pour dormir, dix personnes s'entassent ici sur un unique matelas - Nadège et son mari, leurs six enfants et des neveux qu'elle a accueilli lorsque leur parents ont été tués "par les musulmans".

L'immense majorité des déplacés de M'poko sont des chrétiens, dont une bonne partie habitait le 3e arrondissement de la capitale, près de l'enclave musulmane qui fut durant de longs mois l'épicentre des violences ayant fait des milliers de morts à Bangui.

- repartir de zéro -

Leurs maisons ont été détruites ou pillées, tout comme les écoles aux murs noircis et criblés de balle, aujourd'hui désertes. Il faudra donc repartir de zéro.

"Je veux rentrer, mais j'ai encore peur, reconnait Dieu Béni. Le nouveau président doit d'abord désarmer les milices, sinon je ne bougerai pas d'ici. On fait croire que la paix est revenue mais les armes sont toujours là, cachées partout dans les maisons".

Lui est arrivé parmi les premiers, lors d'une des journées les sanglantes de la crise centrafricaine: le 5 décembre 2013. Il a connu les faux espoirs du retour, où quelques semaines seulement après avoir retrouvé sa maison, la ville s'est de nouveau embrasée en quelque minutes. Souvent, le meurtre d'un taxi-moto ou un vol de bétail suffisait à déclencher des représailles sans fin.

Dieu Béni ne compte plus le nombre de fois où il a regagné dans la précipitation, le camp qui avoisine les bases des soldats français de Sangaris et des casques bleus de la Minusca déployés comme forces de maintien de la paix.

Mais il est vrai que depuis plusieurs mois, les balles n'ont plus sifflé au-dessus des tentes de fortunes et des baraquements en tôle. La vie a repris entre les va-et-vient des commerçantes qui se ravitaillent sur les marchés de la capitale, les coups de marteaux des menuisiers et les enfants qui courent partout.

Pour tromper l'ennui des plus désoeuvrés l'ONG Première urgence, gestionnaire du site, a organisé des jeux et un quizz de culture générale, auquel les participants viennent répondre encouragés par des centaines de personnes rassemblées sous le soleil, vieillards et nourrissons compris.

"Avant les jeunes anti-balaka venaient aux animations avec des fusils à la main et des gris-gris partout, explique dans un grand sourire Béranger Beanam, de Première urgence. Maintenant ils viennent les mains dans les poches, c'est déjà un grand pas".
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