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Centrafrique : à Bangui comme en province, Touadéra peine à faire respecter son autorité
Publié le mardi 29 novembre 2016  |  Jeune Afrique
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© Autre presse par DR
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Officiellement, le pays va mieux. Mais sept mois après son élection, le président Touadéra peine toujours à faire respecter son autorité au-delà des faubourgs de la capitale. Bangui elle-même est gagnée par la méfiance et la suspicion.

Yabingui Franco est un pur produit de la crise en Centrafrique. Une terreur anti-balaka, surnommée Pelé, qui règne sur le village de Blakadja et sur ses environs, dans la préfecture de Nana-Grébizi, dans le nord du pays. Le 10 juillet, six de ses hommes ont kidnappé, torturé et tué la mère du chef de la localité de Mbrès, située à une vingtaine de kilomètres de là. Alors quand, le 8 novembre, la rumeur a couru que « Pelé » était sur le point d’attaquer Mbrès, les musulmans de la ville n’y ont pas réfléchi à deux fois : ils ont ramassé ce qu’ils pouvaient et ont pris la fuite.

Sept mois après l’élection de Faustin-Archange Touadéra, les cadavres mutilés ne jonchent plus les rues de Bangui, comme ce fut le cas en décembre 2013. Mais, comme les musulmans de Mbrès, des milliers de Centrafricains vivent encore la peur au ventre et avec la conviction d’avoir été abandonnés par l’État et par des politiques tellement obnubilés par l’appât du gain qu’ils ont depuis longtemps oublié de les servir.

Plusieurs zones encore contrôlées par le CSA

Sur le papier, la Centrafrique dispose de nouveau de presque tous les attributs d’un État moderne. Mais, dans les faits, les autorités ne contrôlent toujours pas l’intégralité du territoire – c’est même un euphémisme tant les groupes armés ont renforcé leur mainmise sur des pans entiers du pays : l’ancienne Séléka fait la loi au nord d’une ligne reliant Koui (dans le Nord-Ouest, à la frontière avec le Cameroun) à Bambari, dans le centre du pays.

Née dans la foulée de la dissolution de la Séléka, en septembre 2014, l’Unité pour la paix en Centrafrique (UPC) d’Ali Darassa règne sur les régions de la Ouaka, de la Basse-Kotto et sur la ville clé de Bambari ; le Mouvement patriotique centrafricain (MPC) du général Al Khatim contrôle, lui, le nord de la préfecture de l’Ouham, ainsi que les villes de Kabo et de Batangafo ; le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC) de Noureddine Adam a la haute main sur la Vakaga (Nord-Est) et sur Ndélé, Birao et Bamingui-Bangoran. Pour ne rien arranger, un nouvel acteur, le général Sidiki (que l’on dit camerounais), a fait son apparition dans l’Ouham-Pende (Nord-Ouest). Sa spécialité : la protection des convois de transhumance des Peuls, régulièrement attaqués par les anti-balaka.

Ces groupes ont la mainmise sur une bonne partie des activités commerciales des régions qu’ils contrôlent : le diamant, l’or, le bétail, le café et même la bière (celle que l’on boit à Ndélé vient du Tchad, tandis que celle que l’on sirote à Birao est fabriquée au Soudan). Ils collectent des taxes sur les commerçants, contraints de leur verser en moyenne 15 000 F CFA (près de 23 euros) par jour, et gèrent les barrages.

« Les chefs de l’ex-Séléka ont très bien compris qu’ils avaient la capacité militaire de conserver ces zones, explique une source sécuritaire française à Bangui. Ils savent que personne ne viendra les déloger par la force : les Français ne sont plus là [l’opération Sangaris a officiellement pris fin le 31 octobre], l’armée centrafricaine n’en a pas les moyens, et le rôle des Casques bleus de la Minusca est de protéger les civils. »

Au sud de cette ligne opèrent plusieurs dizaines de « comzones » anti-balaka. Ils ne sont pas aussi structurés que les ex-Séléka, mais certaines personnalités ont réussi à fédérer des hommes autour d’elles. C’est le cas de Patrice-Édouard Ngaissona ou du commandant Maxime Mokom. À la fin de 2015, celui-ci prétendait diriger à lui seul trente-trois « comzones ». Et, comme les ex-Séléka, les anti-balaka ont une emprise forte sur les activités économiques, principalement par le biais du racket. C’est ainsi qu’un homme surnommé Douze Puissances contrôle la circulation des marchandises agricoles sur le fleuve Oubangui, en amont de la capitale.

Les humanitaires et l’économie touchés

Depuis le début de la crise, les groupes armés se sont constamment servis sur la bête (en l’occurrence la population) et celle-ci, à force d’avoir trop saigné, est épuisée. Alors, depuis plusieurs mois, les uns et les autres ont changé de cible et s’en prennent désormais aux humanitaires. Ils attaquent leurs convois, pénètrent dans leurs compounds et, parfois, les assassinent.

Début novembre, un employé de l’ONG Conseil danois pour les réfugiés (CDR), qui circulait à moto entre Paoua et Bossangoa, a été ligoté et frappé à mort par des hommes armés. « Il devient impossible de travailler », se désole un acteur humanitaire dont la structure « a perdu plus de 700 000 dollars en pillages depuis 2013 ».

Et les élites politiques ? Elles ne s’aventurent guère hors de Bangui, où se trouve l’essentiel de l’activité économique dite « officielle ». Mais ici aussi, le trafic s’étend dangereusement. Sur les étals des marchés, les produits importés frauduleusement – le savon, notamment – sont de plus en plus visibles.

« Habituellement, à chaque fin de crise, on sent une relance économique. Là, c’est l’inverse, affirme un Français installé depuis longtemps dans la capitale centrafricaine. L’argent ne circule plus, les opérateurs économiques ont du mal à se faire payer. Il n’y a plus de secteurs porteurs comme à l’arrivée de la Minusca, car les trafics ne font que se développer. Les affairistes sont de retour. Ils sont les seuls à vouloir venir ici. »
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