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Bangui ville ordurière : « rien ne bouge et cela semble ne pas déranger… « , Clément De-boutet M’bamba
Publié le jeudi 1 juin 2017  |  Kangbi Ndara
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© Autre presse par DR
Ville de Bangui
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L’incapacité de la Mairie de Bangui face à la lutte contre l’insalubrité galopante dans la capitale centrafricaine fait encore couler beaucoup d’encre en Centrafrique et est décriée dans les huit arrondissement de la capitale. Dans cette interview, Clément De-Boutet M’Bamba, Secrétaire général par intérim du Rassemblement Démocratique Centrafricain (RDC), Conseil Economique et Social du 2ème arrondissement de la Ville de Bangui et Rapporteur général du Conseil Economique et Social livre son analyse de la situation de l’insalubrité dans la capitale centrafricaine et propose des solutions pour mettre un terme à la crise des ordures ménagères.

KN : Mr Clément DE-BOUTET M’BAMBA, quels objectifs poursuivez-vous à travers la campagne contre l’insalubrité dans la ville de Bangui que vous menez depuis deux semaines ?

CBM : La ville de Bangui compte une quarantaine de points de ramassage officiels et environ 200 points sauvages. D’abord la localisation de ces points de ramassage pose problème. Ils sont situés à proximité immédiate de marchés, d’écoles ou d’hôpitaux d’une part et à côté d’habitations ou de caniveaux du système de drainage des eaux de la ville d’autre part.
Ensuite, depuis plusieurs mois, les ordures ne font que s’accumuler. Les points de collecte ont atteint le maximum de leur capacité de charge et les ordures ménagères sont déposées partout dans les rues, les caniveaux, etc.
Enfin, cela créé de sérieux problèmes.
Nous voudrons que l’ensemble des points de ramassage soient intégralement nettoyés puis qu’une autre alternative de collecte et de traitement des ordures ménagères soit proposée aux ménages Banguissois.

KN : A quels sérieux problèmes faites-vous allusion ?

CBM : De santé et d’environnement. Nous constatons une recrudescence du paludisme et de la fièvre typhoïde et d’autres pathologies depuis quelques temps. Cela est essentiellement lié à l’état hautement insalubre de la ville. Prolifération des mouches, des moustiques et des rats. Nuisances olfactives, contamination de la nappe phréatique. etc.

KN : D’après vous, quelles sont les causes réelles du problème ?

CBM : Jusqu’en septembre 2016, le financement des opérations de ramassage des ordures ménagères de la ville de Bangui était assuré dans le cadre du projet PURISU par la Banque Mondiale. Depuis la fin du financement, les responsables n’ont pas fait l’effort nécessaire pour trouver une autre source de financement. C’est essentiellement cela qui justifie cette insalubrité institutionnalisée. Lorsqu’on les interroge, ils disent que la municipalité a d’énormes difficultés, que le Chef de l’Etat est au courant de celles-ci mais nous ne voyons rien bouger depuis plusieurs mois. Le palu nous tue, circuler, y a rien à voir. L’eau que nous utilisons est souillée, circuler, y a rien à voir. Dans cette ville sans électricité, nous ne pouvons plus profiter de la fraîcheur équatoriale la nuit à cause des odeurs, circuler, c’est le Président qui nous a choisi, il est au courant de nos problèmes.
Diantre, il faut seulement 40 millions de FCFA par mois pour que Bangui soit sans monticule d’ordures ménagères. J’insiste…seulement 40 millions de FCFA. Que représentent 40 millions de FCFA par rapport à nos vies. Soyons sérieux un instant, ce sont 40 millions de FCFA qui manquent par mois dans ce pays pour que l’on nous laisse vivre avec des ordures ?
Il y a donc d’une part l’absence supposée de moyens dédiés au ramassage et au traitement des ordures ménagères et d’autre part, le défaut de la manifestation d’une réelle volonté d’améliorer les conditions d’existence des Banguissoises et des Banguissois.

KN : Qui en est responsable?

CBM : Ecoutez, je ne suis pas un procureur. Je constate juste que depuis plusieurs mois, rien ne bouge et cela semble ne pas déranger ceux dont c’est la mission d’une part et ceux qui leur ont confié celle-ci d’autre part.

KN : Quelles solutions ?

CBM : Avec un peu d’audace, de volonté et d’imagination, nous pouvons réaliser beaucoup d’exploits. La principale raison évoquée, est l’absence de financement destiné au ramassage et au traitement des ordures ménagères. Il faut mettre à contribution tous les ménages Banguissois par une contribution mensuelle car il s’agit ici d’un service d’utilité publique. Il y a Un million deux cents mille abonnés à la téléphonie cellulaire dans ce pays. Il faut instaurer une taxe mensuelle de deux cent cinquante francs CFA par abonné soit environ 8,3 FCFA par jour par abonné. Collectée directement auprès des opérateurs, elle permettra de financer non seulement le ramassage des ordures ménagères mais aussi son traitement et dans le cadre de l’Association des Maires de Centrafrique, l’AMAC, cette taxe permettra aussi de financer le ramassage et le traitement des ordures ménagères dans toutes les communes de la RCA. Il s’agit d’environ Quatre milliards par an. Soit huit fois plus que le dernier exercice de l’impot per capita en 1992. Au delà du ramassage et le traitement des ordures ménagères, on peut construire des crèches, des bibliothèques, des espaces verts sur cette base. Par cette taxe, on peut trouver de quoi pour que nos communes puissent tourner à minima et répondre à certaines urgences primaires.

KN : Vous parlez d’alternatives dans le traitement des ordures ménagères, à quoi faites-vous allusion exactement ?

CBM : La question de la collecte et le traitement des ordures ménagères dépasse la ville de Bangui. Il faut la traiter dans le cadre d’une intercommunalité englobant Bangui, Begoua et Bimbo. Le modèle actuel a présenté ses limites et nous met gratuitement en danger. Il faut en inventer un autre. Dans cette ville où le paludisme et les maladies liées à la qualité de l’eau sont chroniques, il faut réduire les facteurs de enveloppement de celles-ci. La 1ère révolution sera d’abandonner les points de ramassage à ciel ouvert. Dans les quartiers où l’habitat n’est pas spontané, il faut instaurer le ramassage à domicile. Les 3 SICA, Lakouanga, Castors, le Centre-Ville, Kpetene, 92 logements, Ben-Zvi, 14-17-36 et 200 villas, la rive droite de l’avenue Koudoukou direction nord et le long des principaux axes de circulation. Ces quartiers représentent environ 1/3 de la ville. Les ordures ménagères doivent être mises en conteneur à domicile et ramassées par un passage de camion deux fois par semaine.
Dans les autres quartiers, des points de ramassage localisés mais mobiles doivent être mis en place pour que les habitants y apportent les ordures ménagères et un système intermédiaire est mis en place pour les ménages éloignés de ces points de ramassage mobile trois fois par semaine. Cela correspond à environ 50 bacs grandes capacités dont une rotation rigoureuse permet d’avoir les resultats escomptés. Pour les marchés de Bangui, un service de ramassage dédié qui procède à l’enlevement chaque soir. Pour ce service supplémentaire, une contribution sera ajoutée sur le prix de ticket des places de marchés et une contribution pour les établissements commerciaux et industriels établis.
Mais, il n y a pas que le ramassage des ordures. Il y a aussi en aval, le traitement. Là aussi, il y a problème. Les ordures sont déchargées à Kolongo dans le 6ème arrondissement de Bangui, une zone à forte densité démographique et à quelques hectomètres du fleuve. Il faut trois sites pour le traitement des ordures de l’agglomération de Bangui. Un pour le nord de la ville sur l’axe Damara. Un pour le Sud-Ouest de la Ville sur l’ancienne route de Mbaïki et Un pour le Centre et l’Est de la Ville Vers Landja-Mboko.
La gestion des ordures ménagères doit être intégrée à la chaîne de l’économie. On ne peut plus se contenter de ramasser les ordures, les décharger à Kolongo et y mettre le feu ou laisser à la merci des éléments pour décomposition. Après le ramassage, il faut trier. Trier pour recycler ou produire du compost ou encore utiliser comme combustible afin de produire de l’électricité. Ce sont des centaines d’emploi et des millions de FCFA qui pourrissent dans nos rues parce que le système manque d’inspiration pour en tirer profit.

KN : Et pourtant l’actuel Maire de Bangui est membre du Comité Directeur du RDC votre parti et ce n’est un secret pour personne que vous êtes proches du Maire, pourquoi ne pas lui prodiguer ces conseils directement ?

CBM : C’est étrange cette tendance qui consiste à tout ramener à une personne. De toujours tout personnaliser ou politiser. Je parle de ce que je vis au quotidien. De ce que des centaines de milliers de Banguissois vivent au quotidien. Mes liens avec le Président de la Délégation Spéciale de la Ville de Bangui, qu’importe leur nature, n’ont rien à voir avec ce dont nous parlons. Y’a t’il oui ou non un problème de ramassage des ordures ménagères à Bangui? Y’a t’il oui ou non un problème d’insalubrité galopante? Le RDC n’a rien à voir avec ce qui se passe actuellement. Mieux encore, la loi organique de 1988 qui regit les communes est un héritage politique du RDC malgré quelques insuffisances qui peuvent se justifier vue de l’histoire et du contexte politique de l’époque. En outre, les seules et véritables élections municipales jamais organisées dans ce pays, ont été celles organisées lorsque le RDC était aux affaires. Depuis 30 ans et plus de cinq présidents plus tard, personne n’a été en mesure de confier directement aux Centrafricains le choix des administrateurs de nos communes. Non, n’associer pas le RDC avec la gestion actuelle de la commune de Bangui ou celle de la collecte et le traitement des ordures ménagères.
Certes l’actuel Maire de Bangui est membre du Comité Directeur du RDC. Oui, avant même d’avoir des rapports politiques, nous avons des liens filiaux lui et moi. Mais cela n’a aucune incidence sur la réalité de ce que nous vivons au quotidien dans nos rues, nos quartiers. Nous, nous parlons de ce que nous vivons au quotidien et vous, vous voulez parler des gens ou des liens qui les unissent. Nous parlons de santé publique, d’environnement et vous, vous voulez parler de politique. C’est votre droit mais permettez que nous, nous nous focalisons sur ce que nous vivons au quotidien.

KN : Doit-on comprendre par là que le RDC ne soutiendra pas Monsieur Nakombo lors des élections municipales prévues en 2018 ?

CBM : Qu’elles aient lieu en 2017 ou 2018, le Rassemblement Démocratique Centrafricain présentera un candidat à la Mairie de Bangui et dans toutes les communes de Centrafrique. Est-ce l’urgence du moment ? J’ai la faiblesse de croire que non. Nous sommes une caricature de pays, notre unité territoriale n’est plus qu’une vue de l’esprit. Nos communes en dehors de quelques enclaves sont à la merci de ceux qui jouent impunément avec nos vies. L’urgence, c’est de réunifier le territoire, de le pacifier et de relancer les activités économiques. Une fois cette dynamique créée, on pourra parler des municipales. Et à ce moment là, le RDC fera connaître ses têtes de liste. Pour l’heure, répondre à votre question serait faire offense à la souffrance de nos populations.

KN : Seriez-vous candidat au poste de Maire ?

CBM : Le moment venu, nous parlerons des ambitions du RDC pour la ville de Bangui et toutes les communes de la RCA et nous vous présenterons nos têtes de liste.

KN : Vous êtes Secrétaire Général par intérim du RDC et Rapporteur Général du Conseil Economique et Social, on s’attendait à vous entendre sur les dossiers brûlants du moment à savoir Bangassou, Alindao, Mingala etc. Que se passe t’il vraiment ? Pourquoi ce silence ?

CBM : La Basse Kotto et le Mbomou, c’est chez moi, mes racines viennent de là-bas. J’ai de la parenté qui y vit. Qui est aujourd’hui déplacée et réfugiée. Je ne peux donc être insensible comme vous le prétendez. Mieux encore, je ne suis pas limité à ces deux régions. Tout ce qui se passe sur ces 623.000 km² me concerne. La situation est difficile. Les conditions se dégradent et les nouvelles qui nous parviennent, nous poussent à croire que nous nous rapprochons du moment où le danger atteindra son paroxysme. Or le retour à la légalité constitutionnelle devrait être le point de départ pour un nouveau chapitre de l’histoire de notre pays où les énergies devraient être mobilisées pour le redressement et la reconstruction. De l’espoir, nous risquons de sombrer dans le désespoir si rien n’est fait rapidement pour rattraper ce temps perdu. Les événements du Centre-Sud et de l’Est sont dramatiques et condamnables. Ils insultent notre humanité et met devant leurs responsabilité première, ceux dont l’assurance de la sûreté des personnes, des biens est le job.
A titre personnel, je milite dans l’association des ressortissants de la région 6 pour apporter une contribution à la prise en charge humanitaire. Le RDC quant à lui, ne rate jamais une occasion pour donner son point de vue afin de trouver des solutions à ce drame, qu’importe leurs origines géographiques. Il est dans la République, il est pour la République et il défend la République.

KN : Votre dernier mot

CBM : Puisque nous sommes réduits à faire appel au Chef de l’état, nous voudrons juste attirer son attention sur la situation de l’insalubrité dans la ville de Bangui. Il ne faut pas attendre la prochaine épidémie de choléra ou la grève ou désobéissance civile des Banguissois pour agir. Il est encore temps de trouver des réponses à cette situation pour nous permettre de faire l’économie de crises inutiles en perspective.

KN : Nous vous remercions Mr De-Boutet M’bamba

CBM : C’est moi qui vous remercie.


Propos recueillis par Johnny Yannick NALIMO
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