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Crise centrafricaine : vers une longue installation des réfugiés au Cameroun (REPORTAGE)
Publié le vendredi 29 septembre 2017  |  Xinhua
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© LeMonde.fr par DR
Les réfugiés centrafricains votent au Cameroun
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YAOUNDE - Selon les estimations, plus de 160.000 Centrafricains ont traversé la frontière camerounaise au cours des trois dernières années pour fuir les violences survenues dans leur pays suite au conflit opposant les ex-rebelles de la Séléka aux milices anti-Balaka.

Auparavant, le putsch militaire mené en mars 2003 par François Bozizé contre le pouvoir d'Ange-Félix Patassé avait déjà plongé le pays dans une grave insécurité, poussant plus de 70.000 hommes, femmes et enfants à prendre la fuite vers le Cameroun.

A ce jour, le nombre total de ces réfugiés est estimé à 232.917 dans les régions de l'Est, de l'Adamaoua et du Nord. Environ 30% d'entre eux vivent dans des sites aménagés et 70% parmi la population hôte. A cause de la persistance des violences en République centrafricaine, les arrivées se poursuivent.

"Il y a eu de nouveaux réfugiés. On a eu, si je peux dire, un petit pic au mois de juillet. Je pense autour de 7.000, près de Touboro, dans la région du Nord", a indiqué dans un entretien à Xinhua Geert Van de Casteele, représentant adjoint du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Cameroun.

Dans la région de l'Est, l'arrondissement de Garoua-Boulaï, du nom de la ville frontalière du même nom, représente l'une des principales zones d'accueil de ces réfugiés. Sur une population totale estimée à quelque 130.000 habitants, cette unité administrative en dénombre environ 50.000.

"La cohabitation est bonne. Les populations hôtes et les réfugiés vivent en harmonie. Les populations hôtes sont très accueillantes", indique Diyen Jam Lawrence, le sous-préfet, évoquant un climat sécuritaire globalement sous contrôle depuis les dernières incursions de groupes armés centrafricains, repoussées par les forces de l'ordre et de sécurité en 2015.

"La frontière est bien sécurisée, mais nous restons en alerte", précise-t-il, un propos qui cache cependant mal les menaces d'attaques auxquelles la région de l'Est continue d'être exposée.

Pour preuve, trois civils ont été tués lors d'un accrochage entre l'armée camerounaise et un groupe armé originaire de la République centrafricaine à la suite d'une tentative d'enlèvement samedi soir à Foya, dans l'arrondissement de Ketté, autre site d'accueil de réfugiés, selon des sources officielles.

Cette présence des réfugiés centrafricains a créé un important brassage humain avec les populations hôtes camerounaises. A Yoko Siré, un village de l'arrondissement de Garoua-Boulaï situé sur l'axe menant à Bertoua, la principale ville de l'Est, un petit groupe de plus de 300 habitants de Bouar et de Baoro (nord de la République centrafricaine), a pris ses racines.

Mêlé aux Gbaya, la population locale, le groupe d'éleveurs peuls affirme avoir retrouvé quelques repères d'une intégration réelle, sous l'encadrement des autorités camerounaises et en collaboration avec les Nations Unies.

"Ils sont là depuis environ huit ans. Ce sont les premiers groupes qui sont arrivés ici et leurs frères continuent de venir les rejoindre. Nous vivons avec eux comme si nous appartenions à une seule mère. On leur a donné des terres pour qu'ils cultivent aussi des champs comme nous", a indiqué à Xinhua Mathieu Sira, un natif du village.

Yoko Siré est une localité où l'agriculture représente la principale source de revenus de la population. L'élevage, le commerce et l'exploitation minière occupent la deuxième place. Le Programme alimentaire mondial (PAM) y développe des projets d'appui aux activités de création d'actifs productifs pour lutter contre l'insécurité alimentaire qui frappe la région de l'Est.

Parmi ces projets figure la réalisation d'un étang piscicole d'une superficie de 1.000 mètres carrés au profit de 200 ménages, pour un total de 1.000 personnes. L'objectif est de renforcer la résilience et l'autonomisation à la fois des réfugiés et des populations hôtes afin d'atténuer l'impact de la réduction du financement nécessaire à l'assistance humanitaire.

En effet, sur près de 80 millions de dollars de budget prévisionnel pour cette assistance pendant l'année en cours, les Nations Unies annoncent un taux de couverture d'à peine 20% à ce jour. Cette faible mobilisation de ressources est un signe de l'essoufflement des bailleurs de fonds face à la crise centrafricaine, dont les causes remontent à quatre décennies.

"[Il y a près de 40 ans, entre le 20 et le 21 septembre 1979], on avait la chute du président Bokassa. Nous sommes là encore en train de chercher des solutions de sortie de crise en République centrafricaine" , rappelle l'ambassadeur de Suisse au Cameroun, Pietro Lazzeri, dont le pays apporte son secours pour faire avancer les initiatives visant à une normalisation en République centrafricaine.

Pour le diplomate européen, "l'important dans la crise centrafricaine, c'est une approche cohérente de la part de la communauté internationale. Or, ce n'était pas toujours le cas par le passé. La chose fondamentale pour la paix, c'est d'avoir certains standards, certains critères : dialoguer avec tout le monde, trouver des solutions et aussi ne pas accepter l'impunité".

"Nous avons un pays d'une superficie de 623.000 kilomètres carrés et une population d'à peine quatre millions et demi, avec les mutineries et les tueries je ne sais pas si nous sommes encore quatre millions. Il y a de l'espace pour tout le monde. Le pays a besoin des bras de ses filles et de ses fils", souligne de son côté Martial Béti-Marace, l'ambassadeur de la République centrafricaine au Cameroun.

En 2016, les gouvernements camerounais et centrafricain ont entamé, avec la participation du HCR, des discussions en vue de la signature d'un accord pour permettre le rapatriement des réfugiés en République centrafricaine, sur le modèle de celui conclu en mars avec les autorités d'Abuja concernant les réfugiés nigérians au Cameroun.

"Il faut souligner que c'est un travail préliminaire qu'on fait et qui est donc un cadre juridique. Mais la condition sine qua non pour le retour, c'est le retour en dignité et en sécurité", souligne Geert Van de Casteele, qui juge ce retour improbable en ce moment du fait de la persistance des violences en RCA.

"En attendant ce retour, nous cherchons que nos compatriotes vivent dans des conditions décentes", affirme M. Béti-Marace. C'est le but d'une mission à laquelle le diplomate centrafricain a participé avec son collègue suisse, sous la houlette d'Allegra Baiocchi, la nouvelle coordinatrice résidente du système des Nations Unies au Cameroun, dans la région de l'Est entre le 19 et le 21 septembre.



Par Raphaël MVOGO
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