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Des vœux centrafricains : des mots signifiants ou creux…?
Publié le lundi 5 janvier 2015  |  Les Plumes de la RCA
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La saison des vœux

Au début de chaque nouvelle année, traditionnellement, c’est la saison des vœux. Quoi qu’on pense de ce rituel, nul n’y échappe. La plupart y participent joyeusement, certains le refusent ironiquement, d’autres y consentent servilement, d’autres encore en font une dette obligatoire à rembourser. Cartes postales, courriers électroniques, visites familiales, discours et cérémonies protocolaires, les vœux en tous genres envahissent l’actualité, jusqu’au plus haut sommet de l’État. Ainsi, le Chef de l’État s’adresse au peuple promettant monts et merveilles ou défendant corps et âme son bilan même si cela n’a fait que piètre figure. Ceux d’opposition ne se dérobent pas à la règle sous prétexte qu’ils sont les dépositaires du « bâton magique » pouvant nous amener au « septième ciel ».

Sous d’autres cieux, c’est une séquence importante de la vie politique car elle permet, à travers les vœux formulés, de donner des orientations, de tracer des perspectives, de dessiner des projets pour la nation, de discerner les enjeux de l’année qui s’ouvre. En Centrafrique, cela tend à prendre un tournant utopique qui se limite à une chimère pour le peuple.

D’où vient le mot vœu ?

Le terme vœu vient du latin votum qui, en transitant par l’anglais, a donné le mot vote, la votation ! Mais plus habituellement le mot vœu a deux sens.

D’abord, et c’est le cas dans la période présente, il désigne un souhait. Le souhait que s’accomplissent de belles et bonnes choses pour des proches : famille, amis, collaborateurs, concitoyens… Il exprime l’espoir d’un bonheur possible pour soi-même et pour les autres, quand tant de réalités viennent le contredire. Il est comme un contre-feu d’espérance lancé à la face du malheur. De surcroît, dans une société en perte de vitesse comme la RCA, oublieuse du prochain, peuplée de violences, d’égoïsmes et de solitudes, il témoigne que l’on garde encore le souci des autres. Même si ce n’est qu’une fois par an.

Au regard des vœux formulés en Centrafrique au début de cette nouvelle année, où tout est relatif au retour de la Paix, il y a de quoi à se demander si ce genre de vœu ne suscite pas à la fois confiance et méfiance. Souhaiter un vœu à quelqu’un, c’est l’inciter à la confiance. Mais, contrairement à ce que l’on peut croire, le souhait d’un vœu peut aussi placer le bénéficiaire dans le contraire de la confiance qui n’est pas le dénigrement, mais la méfiance, la surveillance, le contrôle. Car, il ne faut pas se leurrer, il ne s’agit pas d’imposer nos vues à nos proches, d’obliger les autres à adhérer à notre conception de l’année parfaite : il se pourrait que ce qui est bon pour nous ne le soit pas pour notre prochain. Ne projetons pas abusivement nos secrets espoirs sur ceux qui ne méritent pas d’être punis en ayant à vivre ce que nous, nous voudrions vivre. Faisons de ce temps des vœux un temps de prière qui ne consiste pas à dicter nos solutions, mais à mieux comprendre une situation, à découvrir ce qu’il est possible d’espérer. Il y a, bien sûr, un véritable amour qui s’exprime dans les souhaits que nous pouvons formuler et qui brisent le règne de l’indifférence. Pour autant, tâchons d’offrir aussi une place au désir peut-être balbutiant, peut-être humilié, de celui qui se tient à nos côtés, pour que l’année qui s’ouvre lui permette d’être libre d’être lui-même.

Le sens de vrais vœux de « Bonne année »

Souhaiter « bonne année » à quelqu’un ou à un peuple n’est pas un rituel creux, ni de banales promesses qui n’engagent que ceux qui les croient. Les vœux expriment un engagement à agir en conformité avec ce qui a été promis. Dans ce sens ils ne lient pas seulement aux autres par des formules incantatoires, aussi généreuses que générales qui n’engagent à rien.

Mais les vœux, pour être sincères, impliquent des relations d’attention, de solidarité, de fidélité envers leurs destinataires. Ainsi, ce qui importe c’est ce que vont faire les politiques afin que se concrétisent les vœux qu’ils ont formulés, de même c’est ce que nous réaliserons dans les mois à venir qui rendra crédibles nos vœux les meilleurs. Car, ce vœu appelle un dévouement voire une dévotion. Il est action et aussi prière. À la différence de tant de souhaits, la prière n’est pas un vœu pieux mais un acte ultime de foi et d’engagement par lequel le croyant met sa vie et celle du monde dans les mains de Dieu. Ce Dieu qui veille sur sa parole pour l’accomplir (Jr 1.12). Oui, Dieu veille sur sa parole et Dieu veille à ce qu’elle s’enracine vraiment et féconde vraiment notre cœur. Mais si Dieu veille sur sa parole afin qu’elle s’enracine en nous, qu’en est-il de nos vœux que nous formulons en emporte-pièce ?

Selon Dieu, formuler un vœu, c’est l’accomplir. Cela engage une certaine mesure de confiance. Confiance non seulement en Dieu mais en nous-mêmes. Quand l’évangile nous commande d’aimer notre prochain comme nous-mêmes, il nous incite à nous aimer aussi nous-mêmes et donc à cultiver une certaine confiance en soi. Cela dénote aussi que si les vœux, pour être sincères, doivent impliquer des relations d’attention, de solidarité, de fidélité envers leurs destinataires. Ainsi, ce qui importe c’est ce que vont faire les politiques afin que se concrétisent les vœux qu’ils ont formulés, de même c’est ce que nous réaliserons dans les mois à venir qui rendra crédibles nos vœux les meilleurs.

Car, il est judicieux que « face au monde qui bouge, il vaut mieux penser le changement que changer le pansement ! » (Francis blanche).

Dr Jimi ZACKA
Théologien, Anthropologue
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