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L’incompréhensible décision de la cour constitutionnelle de la république centrafricaine rendue le 12/08/2021 dans l’affaire Algoni c/Mekassoua

Publié le lundi 30 aout 2021  |  letsunami.net
L’incompréhensible
© Autre presse par DR
L’incompréhensible décision de la cour constitutionnelle de la république centrafricaine rendue le 12/08/2021 dans l’affaire Algoni c/Mekassoua
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La décision rendue le 12 août 2021 par la Cour constitutionnelle de la République centrafricaine dans l’affaire qui a opposé Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI à Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA, donne au monde une image sombre de la capacité intellectuelle de l’intelligentsia centrafricaine.

La Cour constitutionnelle est la plus haute juridiction d’un Etat, et cela suppose qu’elle est le sanctuaire qui abrite les plus grands juristes de l’Etat considéré, d’autant plus que ses décisions s’imposent à tous les pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives et juridictionnelles et à toute personne physique ou morale ; elle est donc le soleil dont les rayons éclairent les gouvernants et les gouvernés sur la bonne marche à suivre dans cet Etat.

C’est pourquoi ses décisions ne doivent pas être rendues à la légère, surtout qu’elles sont, en plus, scrutées par les juristes et les hommes politiques du monde entier.

A l’issue du second tour des élections législatives partielles qui ont eu lieu en République centrafricaine le 23 mai 2021, Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA a été élu député de la 2e circonscription du 3earrondissement de Bangui avec 61,62 % des voix contre 38,38 % des voix obtenues par son adversaire Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI.

Par décision numéro 111/CC//21 du 29 juin 2021, la Cour constitutionnelle de la République centrafricaine a proclamé Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA définitivement élu.

C’est dans ces conditions que la décision objet de notre analyse est intervenue.

En effet, par décision numéro 116/CC//21 du 12 août 2021, la Cour constitutionnelle de la République centrafricaine a, non seulement annulé l’élection de Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA et prononcé sa déchéance de son mandat de député mais surtout, proclamé Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI député élu de la 2e circonscription du 3e arrondissement de Bangui avec 38,38 % des voix.

Il ressort de la décision en cause que la requête dont la Cour a été saisie par Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI porte sur la déchéance de Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA de son mandat de député et sur l’annulation de son élection.

Nous allons, à travers l’analyse de la décision susvisée, démontrer que non seulement l’annulation de l’élection de Monsieur Karim MECKASSOUA et sa déchéance par la Cour constitutionnelle ne sont pas justifiées mais surtout la proclamation de Monsieur Ibrahim Alhissen ALGONI comme député de la 2e circonscription du 3earrondissement de Bangui est un coup d’Etat constitutionnel contre le peuple centrafricain.

L’injustifiable annulation de l’élection de Monsieur MECKASSOUA
Il est important de souligner que l’annulation des résultats d’une élection par la Cour constitutionnelle relève du contentieux électoral, or ce contentieux disparaît avec la proclamation des résultats définitive par cette Cour dans la mesure où il se situe dans une phase qui lui est antérieure.

Ainsi, l’article 95 alinéa 2 de la constitution centrafricaine du 30 mars 2016 dispose que « La Cour Constitutionnelle … est chargée de connaître du contentieux électoral ; »

Il se trouve que le cadre du contentieux électoral susvisé est délimité par l’alinéa 3 du même article qui dispose que « La Cour Constitutionnelle est chargée de veiller à la régularité des consultations électorales, examiner les réclamations et proclamer les résultats définitifs ».

On remarque à travers ce texte que les éléments relevant du contentieux électoral sont bien énumérés dans un ordre progressif qui termine par la proclamation des résultats définitifs.

En conséquence, le contentieux électoral est purgé avec la proclamation des résultats définitifs des élections par la Cour constitutionnelle.

Cette analyse est confortée par les dispositions de l’article 78 alinéa 1er et 82 alinéa 1er de la loi organique n° 17.004 du 15 février 2017 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.

En effet, l’article 78 de cette loi organique reprend in extenso les dispositions l’alinéa 3 de l’article 95 de la constitution : « Conformément aux dispositions de l’article 95 de la Constitution, la Cour Constitutionnelle veille à la régularité des consultations électorales, examine les réclamations et proclame les résultats définitifs »

Or, les réclamations visées par le texte susvisé sont portées devant la Cour constitutionnelle par requête et dans un délai limité, ainsi qu’il ressort de l’article 82 alinéa 1er du même texte qui dispose que « Dans tous les cas, la requête doit, à peine d’irrecevabilité, parvenir à la Cour Constitutionnelle dans le délai fixé par le Code électoral ».

Il convient alors de déterminer le délai fixé par le Code électoral pour délimiter le temps au-delà duquel aucune réclamation contre l’élection d’un député n’est plus possible.

L’article 142 du Code électoral dispose que « Tout électeur peut, dans un délai de dix jours après la publication des résultats provisoires par l’A.N.E., contester l’élection d’un député de la circonscription où il est électeur. Les requêtes sont adressées par écrit, pour les électeurs de Bangui, au Président de la Cour Constitutionnelle et, pour les électeurs de provinces, au démembrement de l’A.N.E. dans le ressort duquel s’est déroulée l’élection contestée, pour transmission à la Cour Constitutionnelle. »

Le délai dans lequel la demande d’annulation d’une élection d’un député peut intervenir est donc de dix jours à compter de la proclamation des résultats provisoires par l’A.N. E.

Ainsi, aucune contestation ne peut être élevée au-delà de ce délai.

Par conséquent, aucune annulation d’une élection n’est possible dès lors que la Cour constitutionnelle a proclamé les résultats définitifs d’une élection.

On aurait pu imaginer que la requête de Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI s’était limitée à la déchéance de Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA et que la Cour constitutionnelle aurait statué ultra petita, malheureusement cette hypothèse est insoutenable dans la mesure où la Cour indique clairement : « Que le requérant allègue encore que l’article 88 de la loi organique n° 17.004 du 15 février 2017 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle dispose que la constatation de l’inéligibilité d’un candidat est cause d’annulation des élections ».

Le cas d’annulation des élections pour inéligibilité d’un candidat visé par l’article 88 ci-dessus cité, concerne les candidats relevant de l’article 86 de la loi organique qui dispose que « Les candidats proclamés élus restent en fonction jusqu’à ce qu’il soit définitivement statué sur les requêtes en annulation. » ; et dans ce cas, des nouvelles élections sont organisées en application de l’article 87 de la même loi organique aux termes duquel « En cas d’annulation de tout ou partie des élections, le corps électoral est convoqué par décret pris en Conseil des Ministres dans un délai de quarante-cinq (45) jours au moins et quatre-vingt-dix (90) jours au plus, sur proposition de l’Autorité Nationale des Elections. »

Force est de constater que par arrêt du 23 mai 2021, la Cour constitutionnelle avait déjà rejeté la requête de Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI contre Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA pour les mêmes élections et avait proclamé Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA définitivement élu ; il s’agit donc de la chose jugée et la règle non bis idem, c’est-à-dire, on ne peut pas juger la même chose deux fois, s’applique pleinement en ce qui concerne les résultats des élections ayant abouti à la victoire de Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA.

Qui plus est, cette décision n’est susceptible d’aucun recours en application de l’article 106 de la Constitution qui dispose que « les décisions de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours », de sorte que même un recours en révision est impossible.

Il est donc inimaginable qu’une nouvelle requête en annulation des résultats des mêmes élections ait été, dans ces conditions, déclarée recevable par la Cour constitutionnelle.

Pour déclarer recevable la requête de Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI, la Cour Constitutionnelle a ainsi motivé sa décision : « Qu’aux termes de l’article 143 du même code : » Les requêtes doivent, à peine d’irrecevabilité, comporter les nom(s), prénom(s) et adresse du requérant, ainsi qu’un exposé des faits et des points de droit sur lesquels il se fonde… »

On peut déjà relever une hésitation à identifier le Code en question dans la mesure où le précédent Code cité par la décision en cause est le Code Pénal centrafricain, et c’est le seul d’ailleurs cité par la Cour constitutionnelle dans son exposé des motifs ; recourir dans ces conditions à la formule « du même code » peut laisser un simple lecteur perplexe.

Pour mieux comprendre le message caché derrière cette formule, il faudra alors remonter à l’article 142 du Code électoral qui dispose que « Tout électeur peut, dans un délai de dix jours après la publication des résultats provisoires par l’A.N.E., contester l’élection d’un député de la circonscription où il est électeur. Les requêtes sont adressées par écrit, pour les électeurs de Bangui, au Président de la Cour Constitutionnelle et, pour les électeurs de provinces, au démembrement de l’A.N.E. dans le ressort duquel s’est déroulée l’élection contestée, pour transmission à la Cour Constitutionnelle. »

La Cour constitutionnelle ne pouvait pas déclarer la requête recevable sur le fondement de l’article 143 du Code électoral et ignorer que cette requête était soumise à la condition de délai définie à l’article 142 du même Code ;

On peut légitimement considérer que la Cour constitutionnelle a délibérément méconnu l’article 142 du texte susvisé, alors que la première question que la Cour constitutionnelle devait se poser était celle de savoir si sa saisine était intervenue dans le délai de recours.

En outre, la Cour constitutionnelle avait déjà, par décision n° 111/CC/21 du 29 juin 2021, déclaré Monsieur Abdou Karim MACKASSOUA élu avec 61,62 % de voix et rejeté le recours en annulation de Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI contre l’élection de ce dernier.

La requête de Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI tendant à la même fin aurait dû être déclarée irrecevable ;

Le moyen tiré du fait que Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI aurait eu connaissance des faits reprochés à Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA après la publication de la liste des candidatures par l’Autorité Nationale des Elections ne saurait justifier la recevabilité de sa requête en annulation dès lors que l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 29 juin 2021 est définitif et que Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI ne s’est pas prévalu d’un recours en révision dont la voie n’est pas ouverte.

De même, le moyen tiré du fait que la Cour constitutionnelle n’avait pas connaissance du Rapport des Experts du Conseil de Sécurité au moment où elle rendait sa décision le 29 juin 2021 est inopérant dès lors que la voie d’un recours en révision des décisions rendues par la Cour Constitutionnelle n’est pas ouverte, et donc non envisageable.

Il faudra encore une fois de plus être sérieux : où les décisions de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours (article 106 de la Constitution) où alors elles le sont à la carte, et dans ces conditions, on crée, plus qu’une instabilité juridique, un capharnaüm juridique.

En tout état de cause, l’annulation des résultats obtenus par Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA à l’issue du second tour des élections législatives partielles de la 2e circonscription du 3e arrondissement de Bangui, est non seulement injustifiable mais également insoutenable.

La motivation par la Cour constitutionnelle de la décision en cause sur sa compétence est aussi curieuse.

Pour se déclarer compétente, la Cour constitutionnelle s’est fondée sur l’article 95 alinéa 2 de la constitution centrafricaine du 30 mars 2016.

En premier lieu, il faut rappeler que la compétence prévue par ce texte concerne, ainsi que nous l’avons démontré plus haut, les contentieux des opérations électorales ; or ces contentieux se situent en amont de la décision de la Cour constitutionnelle du 29 juin 2021 qui avait déclaré Monsieur Abdou Karim MECKASSOPUA élu avec 61,62 % de voix.

En conséquence, la compétence de la Cour constitutionnelle en matière du contentieux électoral ne saurait justifier sa décision n° 116/CC/21 du 12 août 2021 ayant annulé les résultats proclamés par sa propre décision du 29 juin 2021

En deuxième lieu, la déchéance d’un député définitivement élu de son mandat ne relève pas du contentieux électoral, et l’article 95 alinéa 2 de la constitution centrafricaine du 30 mars 2016 ne donne nullement à la Cour Constitutionnelle le pouvoir de nomination d’un député.

La déchéance de Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA de son mandat de député est donc injustifiée.

L’injustifiable déchéance de Monsieur Karim MECKASSOUA de son mandat de député
Il est important de savoir que la déchéance d’un député définitivement élu ne peut pas être prononcée par la Cour constitutionnelle tant que ce dernier n’a pas été jugé et condamné par une décision devenue définitive.

En effet, la problématique de la déchéance d’un député est prévue par l’article 141 du Code électoral qui dispose que « Si un candidat se trouve dans un cas d’inéligibilité postérieurement à la publication de la liste définitive des candidatures, en raison d’une condamnation devenue définitive, prononcée à son encontre pour tout autre motif, la Cour Constitutionnelle, saisie par l’ANE ou toute partie intéressée, décide de sa déchéance comme candidat ou élu. »

Il ressort très clairement de ce texte que la déchéance d’un élu, c’est-à-dire d’un député ne peut être prononcée qu’en cas de condamnation définitive ; ce qui signifie que même si le député est condamné, tant que la décision de condamnation n’est pas devenue définitive, la Cour Constitutionnelle n’a pas le droit de prononcer sa déchéance.

Et pourtant, la Cour constitutionnelle a visé cet article 141 du Code électoral pour justifier la déchéance de Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA, alors qu’elle n’a cité aucune décision judiciaire ayant condamné ce dernier.

Il n’est donc pas établi que Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA ait fait l’objet d’une condamnation devenue définitive.

En conséquence, la décision de la Cour Constitutionnelle est en contradiction avec le texte sur lequel elle s’est fondée, laissant ainsi apparaître un manque de cohérence juridique.

On est alors tenté de se demander si les juges qui ont rendu cette décision ont bien compris la portée des textes qu’ils ont visés.

Pour déchoir Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA de son mandat de député, la Cour constitutionnelle a fait valoir un rapport du Groupe d’Experts des Nations-Unies et un avis de poursuite judiciaire d’un juge d’instruction : « Considérant que le requérant produit à l’appui de sa saisine en déchéance du député Abdou Karim MECKASSOUA, un Rapport du Groupe d’Experts du Conseil de Sécurité des Nations Unies daté du 25 juin 2021 et un avis de poursuite judiciaire du Cabinet d’Instruction n°1 pour complicité d’atteinte à la sureté intérieure de l’Etat – Complicité d’association de malfaiteurs – Complot et complicité de vol à main armée ; Considérant que ce Rapport des Experts du Conseil de Sécurité fait mention aux pages 10 et 11, paragraphes 25 à 28, du rôle joué par Abdou Karim MECKASSOUA avec les groupes armés ; Que ce rapport mentionne que Abdou Karim MECKASSOUA avait poussé les groupes armés et l’entourage de François BOZIZE à lancer une offensive militaire pour destituer le régime en place ; »

Cette considération est une méprise flagrante du sacro-saint principe de la présomption d’innocence garantie par la Constitution centrafricaine dont la Cour constitutionnelle est censée être la gardienne.

Aux termes de l’article 4 alinéa 1er de la constitution centrafricaine du 30 mars 2016 « Tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie à la suite d’une procédure judiciaire lui offrant les garanties indispensables à sa défense. »

Comment peut-on, en présence d’une telle disposition constitutionnelle aussi limpide, se contenter d’un simple rapport des Experts du Conseil de sécurité qui n’est même pas une résolution du Conseil de sécurité encore moins une décision de justice et d’un simple avis de poursuite d’un juge d’instruction, pour retenir quelqu’un dans le lien de la culpabilité ?

La Cour constitutionnelle a, enfin, fait valoir les articles 28 alinéa 1 et 3 de la Constitution et 134 du Code électoral, alors que ces articles concernent les critères d’éligibilité qui sont appréciables au stade de la candidature, ainsi que le spécifie le texte de l’article 134 susvisé : «« Ne peuvent être candidat(e)s aux élections législatives que les hommes et les femmes remplissant les conditions suivantes :-être de nationalité centrafricaine ; – être âgé(e) de vingt-cinq ans au moins le jour du dépôt du dossier de candidature ; être inscrit(e) sur la liste électorale définitive ; n’avoir pas fait l’objet de condamnation à une peine afflictive ou infamante ; jouir de ses droits civiques ; jouir d’une bonne santé mentale et physique ; être de bonne moralité. »

Or non seulement la candidature de Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA a été admise par l’ANE et validée par la décision de la Cour Constitutionnelle du 27 novembre 2020 mais surtout, il a été élu député et son élection a été également validée par la décision de la Cour constitutionnelle du 29 juin 2021.

C’est pourquoi l’article 141 du Code électoral vise les cas d’inéligibilité qui se révèlent après l’élection d’un député.

Il y’a une nuance entre quelqu’un qui est éligible et quelqu’un qui est élu. Quelqu’un qui est éligible est un simple candidat qui peut ne pas être élu, alors que l’élu est un candidat qui a recueilli les suffrages des électeurs.

En conséquence, le problème de Monsieur Karim MECKASSOUA ne se pose plus en termes d’éligibilité mais en termes de déchéance qui est prévue par l’article 141 du Code électoral.

C’est donc au regard de ce texte qu’il aurait fallu apprécier la déchéance ou pas de ce dernier.

Etant donné que Monsieur Abdou Karim MECKASSOUA est en droit de bénéficier de la présomption d’innocence garantie par la Constitution centrafricaine, sa déchéance prononcée par la Cour constitutionnelle en l’absence de toute condamnation définitive est manifestement illégale et anticonstitutionnelle.

L’inadmissible proclamation de Monsieur Ibrahim ALGONI député en remplacement de Monsieur Karim MECKASSOUA.
Aux termes de l’article 68 de la Constitution Centrafricaine du 30 mars 2016 « Le Peuple Centrafricain élit, au suffrage universel direct pour un mandat de cinq (5) ans, des citoyens qui constituent l’Assemblée Nationale et qui portent le titre de DEPUTE. Chaque Député est l’élu de la Nation. Le mandat du Député ne peut être écourté que par la dissolution de l’Assemblée Nationale, la démission, la radiation ou la déchéance dudit Député »

L’article 4 alinéa 2 de la Loi Organique n° 17.011 du 14 mars 2017 portant Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale dispose : « Toutefois, en cas de vacance d’un ou de plusieurs sièges en raison d’une annulation, de cumul de fonctions, d’une déchéance, de la radiation, ou d’un décès, il y est pourvu dans les conditions fixées par les textes en vigueur. »

Et l’article 5-2 de la même loi organique dispose que « le député titulaire dont le poste devient vacant pour cause d’empêchement définitif est remplacé par son suppléant ; »

Ce texte est clair et ne prête à aucune interprétation.

Or par son arrêt du 12 août 2021 en cause, la Cour constitutionnelle a proclamé Monsieur Ibrahim Al Hissen ALGONI élu, avec 38,38 % des voix, député de la 2e circonscription du 3e arrondissement de Bangui en remplacement de Monsieur Karim MECKASSOUA élu avec 61,62 % alors que Monsieur Al Hissen ALGONI n’est pas son suppléant.

Et même si le suppléant de Monsieur Karim MECKASSOUA était également dans l’impossibilité d’exercer son mandat, il faudrait organiser des élections partielles pour pourvoir à son siège ainsi que le prévoit l’article 5-3 de cette loi « lorsque le député titulaire et son suppléant sont placés tous les deux dans un cas d’empêchement soit définitif, soit temporaire de plus de six (06) mois, il est procédé à des élections partielles pour pourvoir au siège resté vacant. »

Il s’agit là d’un coup de force inadmissible, un véritable coup d’Etat contre le peuple centrafricain, une forfaiture.

Comment une Cour constitutionnelle peut- elle aller jusqu’à ce niveau ?

En ayant fait aucun effort pour donner, ne fusse que, l’impression d’une décision digne d’une Haute cour, les auteurs de la décision rendue le 12 août 2021 ont fait perdre à la Cour constitutionnelle centrafricaine toute sa crédibilité.

Dans un communiqué publié le 29 juin 2021, le ministère centrafricain de la défense indiquait dans : « Il ne fait pas de doute que cette publication calomnieuse fondée sur des preuves fabriquées et non vérifiées est une stratégie qui vise d’abord à saper le moral de nos troupes mais aussi à amener les Nations unies à prendre des sanctions contre les alliés russes, dont la mission de rétablissement de l’autorité de l’Etat compromet assurément l’action des rebelles qui sévissent dans nos provinces en violation flagrante des dispositions de l’accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine. »

Ce communiqué fait allusion au rapport des Experts des Nations-Unies dont le gouvernement centrafricain a rejeté les conclusions.

Or la Cour constitutionnelle centrafricaine vient de valider ce rapport en s’en prévalant pour rendre sa décision du 12 août 2021, et ce faisant, elle a complètement fragilisé la position politique et diplomatique du gouvernement centrafricain sur le plan international.

Le droit est une arme redoutable de défense en temps de paix, mais lorsque celui qui a le pouvoir de l’exercer ne le maitrise pas, il peut le transformer en une bombe atomique qu’il retourne consciemment ou inconsciemment contre sa propre communauté.

A un certain niveau de responsabilité, on ne doit pas se croire tout permis, car les actes que l’on pose peut engager toute une nation.
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