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Alors on danse…
Publié le mardi 10 fevrier 2015  |  Les Plumes de RCA
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ALORS ON DANSE…
@LESPLUMES 9 FÉVRIER 2015 0

Par Freddy silvere OUILIDAN

« La danse sous toutes ses formes ne peut être exclue du cours de toute noble éducation : danser avec les pieds, avec les idées, avec les mots et dois-je aussi ajouter que l’on doit être capable de danser avec la plume ? » NIETZSCHE, le crépuscule des idoles.

Alors que je me préparais à mettre en route mon vieil électrophone pour apprécier ce vieux disque de Franco, encore offert par la douce attention de mon frère d’Orléans, j’eus un souvenir particulier de ma tendre enfance bercée entre le cœur du quartier Boy-rabe et l’ambiance du « sulfureux » quartier Foûh dit zone rouge. Pour paraphraser l’autre, je dirai que, je parle d’un temps que les moins de trente ans ne peuvent pas connaître.

A cette époque l’enfance centrafricaine rêvait encore, on jouait, courait, dansait. Nous étions des bambins heureux, sans peur ni crainte du devenir : des enfants comme ceux du reste du monde. Dans notre grande case, il y’avait un personnage que j’admirais tant pour sa bravoure et son attachement, mais surtout pour ses récits et autres aventures tous très passionnants ais surtout nantis de conseils et autres messages de prudence, hommage soit rendu à mon grand-père le sergent Ngakoutou NGARDE JEAN dit « kouzoundoro ». Mes repères furent échafaudés sur le socle de ses mythiques pas de danse. Selon grand-papa, chaque danse raconte une histoire, chaque pas exécuté avec ou sans élégance dépeint la nature même du danseur. Pour mon historien préféré, il faut privilégier la délicatesse, l’harmonie et surtout garder en tête que la cadence est rythmée. Ainsi j’appris à danser le ngargué , gbadouma , monténguélé , mais aussi la rumba, le tcha tcha tcha et… le twist… Ces trésors feront de moi l’adversaire à abattre lors des soirées organisées par nos clubs d’enfance (ceux qui m’ont côtoyé à cette époque comprendront mieux le secret de mon succès auprès de ces belles demoiselles)… Trêve de nostalgie !

La danse est une discipline exigeante, une démarche harmonieuse et rigoureuse. Les danseurs, dans l’exécution de cet art, allient force et nonchalance, rapidité et douceur, possession et partage : autant de bon sens qu’on ne distillera jamais si l’on n’est pas assis avec le cœur pour vivre ces moments de volupté. Mais la danse n’est pas juste cet entrelacement physique, cette séduction vivace : elle est aussi spirituelle, intellectuelle donc constructive. D’ailleurs la pensée de NIETZSCHE citée ci haut nous situe, à bien d’égards, de l’élan qu’il faut avoir face à la danse, surtout celle d’esprit dans notre espace quotidien.

Ainsi danser avec le peuple et/ou pour le peuple exige un bon rythme, une cadence agencée et surtout de la rigueur, de la volonté et de l’objectivité. Hélas, nous autres, centrafricains, n’avons pas encore compris l’importance d’harmoniser notre démarche.

A l’approche du forum de Bangui, plusieurs d’entre nous expriment leur volonté d’entrer dans le jeu, de participer. La diaspora centrafricaine de Paris et ses faubourgs – pour ne pas dire de France- s’est illustrée il y’a quelques jours à son jeu favori : Partir en rang dispersé ! Ainsi, pour quelques billets d’avion à destination de Bangui, nous avons compté quelques anciens ministres (qui méritent allégrement la retraite), des responsables à plusieurs titres et quelques engagés. Certains tapis au fond d’un bar parisien, d’autres reclus dans une salle mal éclairée pour chercher à obtenir une participation sans objectivité au forum de Bangui. D’ailleurs, certains n’ont pas hésité à user de l’art du pugiliste pour se faire remarquer : honte sur eux !

Personnellement, j’admire l’engagement, tant qu’il reste rigoureux et constructeur. Hélas, ces compatriotes n’encouragent pas à l’association. En suivant les revendications et autres motivations de ceux qui se hissent grands défenseurs de la diaspora centrafricaine (comme s’ils pouvaient défendre un ensemble dispersé), ma rigueur de chercheur m’oblige à faire quelques constats.

D’abord la présence du ministre Olivier GABIRAULT . Je suis chercheur traditionaliste, alors le respect des aînés ne m’est pas étranger. Une fois cela dit, il nous revient de faire le choix de la clarté. Le ministre GABIRAULT fut plusieurs fois appelé aux responsabilités en Centrafrique, quelles ont été ses réalisations en qualité de ministre et de maire de la ville de Bangui ? Quel bilan dressé de son état de service ? En quoi, hors-mis son parcours, serait-il mieux placé pour fédérer et orienter ce débat ? Il n’y a qu’en milieu centrafricain qu’on observe cette difficulté de passage du flambeau. Sachons, chers compatriotes, que pour se vêtir d’honneur il faut savoir quitter la scène des fois.

Ensuite, l’absence du sens réel des priorités. Dans ce moment précis où la patrie attend l’abnégation de ses fils, certains danseurs du ventre s’adonnent avec frénésie à l’art de la noyade. C’est à dire, discuter du contenant sans jamais parler du contenu : ils veulent le fourreau sans l’arme ! La volonté d’aller se pavaner dans Bangui est si forte qu’on en oublie l’objet même de ce tourisme d’un autre genre. Comme des mouches attirées par le miel, ils veulent tous être de la partie, mais ils oublient qu’au même titre que le miel, la pourriture attire autant les mouches.

Enfin, la cacophonie. Fin séducteur et mélomane, je ne supporte pas les fausses notes quelques soient leurs provenances. Parler de dialogue, des élections, de la transition et de fédérer la diaspora centrafricaine et… je ne sais plus de quoi d’autre, revient à faire un vilain medley entre rap, zouk, samba et… coupé décalé. Autant dire que nos compatriotes ont créé une nouvelle discipline : « l’antidance ».

Quelques questions me font la fête depuis lors : si nos danseurs sont si mauvais, quel spectacle aurions-nous ? Si les vieux danseurs du village ne veulent pas transmettre simplement leur art sans spolier la partie, quel avenir pour les jeunes artistes ? Et si ces artistes vigoureux oublient le sens de la rigueur, comment pourrions-nous composer la symphonie de l’avenir ?

Et de mon électrophone, s’échappa cette mélodie de l’Afrique profonde, celle que dansait mon grand-papa, ainsi que mon papa. En digne héritier, j’invite mon fils à danser avec moi et, de sa petite hauteur, il me fît : Alors on danse ?

Freddy Silvere OUILIDAN
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