Le ministre centrafricain de la Jeunesse et des Sports Armel Sayo a été libéré mercredi 11 février après 16 jours de captivité. L’ancien leader du groupe armé Révolution-Justice , devenu ministre en août dernier, avait été enlevé le 25 janvier par des hommes se réclamant du leader anti-balaka Andilo, actuellement en prison à Bangui. Ils exigeaient sa libération en échange de celle du ministre. Une rançon a aussi été évoquée, mais les autorités assurent avoir obtenu la libération d’Armel Sayo sans contrepartie.
Quand tombe l’annonce du rapt d’Armel Sayo, une cellule de négociations se met en place. A sa tête, le ministre de la Sécurité publique Nicaise Karnou, assisté de l’archevêque de Bangui, Mgr Dieudonné Nzapalainga et de l’ancien chef de la coordination anti-balaka Patrice Edouard Ngaissona.
Deux jours après la libération de l’otage française Claudia Priest et du religieux centrafricain Gustave Reosse, les autorités entendent alors faire feu de tout bois. Elles se tournent notamment vers Joachim Kokaté, ancien camarade de promotion d’Armel Sayo. Il conduit à Nairobi une délégation d’anti-balakas qui a discuté ces deux derniers mois un accord de paix pour la Centrafrique, d’emblée rejeté par toutes les instances internationales. Depuis Nairobi, Joachim Kokaté avait participé quelques jours auparavant aux discussions en vue de la libération de Claudia Priest. Il mandate alors un de ses hommes liges à Bangui, le capitaine Charles Grémangou, qui entre en contact avec les ravisseurs, mais n’en obtient rien de concret.
Il faut dire qu’à Nairobi aussi ce nouveau kidnapping divise. Si Joachim Kokaté est proche d’Armel Sayo, un autre membre de la délégation, Maxime Mocome, lui, est proche d’Andilo. Le général Andilo, alias Rodrigue Ngaibona, est un chef anti-balaka en prison depuis plus d’un mois. Lors des dernières prises d’otages, sa libération était mise dans la balance par les ravisseurs. « Mocome et Andilo sont proches. Ils sont de la même ethnie. Ils ont partagé la même maison », affirme un fin connaisseur de la mouvance anti-balaka. Dans l’entourage de la présidente Catherine Samba-Panza, certains vont même jusqu’à penser que l’ordre de l’enlèvement du ministre de la Jeunesse et des Sports est venu de Nairobi. Mais rien ne permet de l’affirmer.
« Pas de rançon versée »
A Bangui, une autre figure de la mouvance anti-balaka, Sébastien Wenezoui, est aussi sollicitée par les autorités. Avec un de ses lieutenants, il entre en contact avec les ravisseurs qui constituent un petit groupe mouvant. A leur tête, un jeune homme de 19 ans qui se présente comme le « frère » d’Andilo. Il réclame donc la libération de son frère emprisonné et une rançon de 4 millions de francs CFA. Comme il est d’usage pour un officiel, le ministre Nicaise Karnou a soutenu avec force sur l’antenne de RFI mercredi qu’aucune rançon n’avait été versée. Sébastien Wenezoui est tout aussi catégorique sur ce point. Toutes les parties prenantes contactées assurent que la libération s’est faite sans contrepartie, ce qui explique la longueur des pourparlers.
Pendant ce temps, les amis d’Armel Sayo au sein de son ancien groupe armé Révolution-Justice perdent patience. Le 5 février, ils menacent de marcher sur Bangui pour libérer eux-mêmes leur ancien leader. Sébastien Wenezoui parvient à désamorcer une crise qui risque selon lui de tourner à l’affrontement tribal. Un argument de plus à opposer au jeune ravisseur. Mais les négociateurs déploient encore des trésors de diplomatie pour tenter de le convaincre de renoncer à exiger l’élargissement de son « frère Andilo » poursuivi par la justice centrafricaine. « On a fait intervenir tous les gens qui ont de l’influence sur lui, explique une source au sein des négociations. On a demandé à sa mère de le ramener dans le droit chemin. Même Andilo, depuis sa prison lui a parlé au téléphone ».
L’intransigeance du frère d’Andilo sur ce point avait déjà retardé au mois de janvier la libération de Claudia Priest. De bonne source, cette libération avait finalement eu lieu à l’insu du jeune homme… Selon les dires de cette source impliquée au premier chef, pendant qu’une partie des négociateurs discutaient avec lui à distance du lieu où la Française et le religieux centrafricain étaient retenus, d’autres émissaires se mettaient d’accord avec les geôliers et les caïds locaux sur la nécessité de mettre fin à cette captivité, et récupéraient les deux otages.
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