Ainsi donc les prochaines élections en Centrafrique n’auront pas lieu à la date prévue. C’est ce qu’a annoncé en tout cas le président de l’Autorité nationale des élections (ANE), Dieudonné Kombo-Yaya, hier lundi 1er septembre 2014 sur RFI. On se doutait bien que février 2015 serait intenable pour l’organisation de ces joutes électorales censées ramener le pays sur de bons rails. En effet, dans un de nos précédents éditoriaux, nous nous interrogions déjà sur la possibilité de respecter ce délai, tant la déliquescence a atteint toutes les strates de l’Administration publique, qui n’existe plus que de nom, tant les autorités de transition semblent sans aucun moyen de contrôle de la crise, tant l’insécurité va chaque jour grandissante et tant la fracture entre les fractions rivales reste béante. Sans compter le dénuement matériel, financier et logistique dans lequel est plongé la Centrafrique.
Preuve que dans cet Etat, ou du moins ce qui en tient lieu, plus rien ne va, c’est ce si long temps mis pour la constitution de l’actuel gouvernement dit d’union. En effet, nommé au poste de Premier ministre le 10 août 2014, Mahamat Kamoun ne parviendra à composer son équipe qu’au bout d’une dizaine de jours et de nuits de tractations. Et la suite, on la connaît : sitôt le nouvel Exécutif connu, sitôt il a été contesté de toutes parts. Tout cela est symptomatique de la fragilité de cette longue transition qui peine, peine et peine à aboutir à son propre dépassement. On n’a pas besoin d’être un grand clerc pour reconnaître avec le président de l’ANE que tenir ces élections à la date prévue relève de la chimère, et on espère que Dame Catherine, ses partenaires de la communauté internationale ainsi que les protagonistes de la crise se rendront à l’évidence. Inutile de faire du fétichisme de date. Le 15 février 2015, imposé par la France qui ne compte pas rester pendant longtemps dans le chaudron centrafricain, oui ce 15 février-là n’est pas réaliste. Comment dans cet Etat néant, parvenir en l’espace de six mois à constituer un fichier électoral fiable et crédible, à réunir les moyens financiers (37 milliards de francs CFA) et matériels pour la tenue d’élections générales ? Même en temps normal, le pari n’est pas gagné d’avance. Ne convient-il donc pas de différer la chose afin de donner toutes les chances d’une sortie de crise effective à l’issue d’élections libres, transparentes et équitables, plutôt que de mettre la charrue avant les bœufs ? Surtout qu’on ne s’y méprenne pas : dans la situation actuelle de la Centrafrique, les élections ne doivent pas être perçues comme une solution à la crise mais plutôt comme l’aboutissement logique de la transition.
M. Arnaud Ouédraogo