Aucune compétition électorale saine ne peut se tenir dans un pays en proie à une guerre civile d'une telle ampleur qui, qui plus est, ne dispose d'aucune armée. En République centrafricaine, on s'achemine vers un probable report des élections, initialement prévues pour le mois de février 2015. C'est en tout cas ce que laisse comprendre le président de l'Autorité nationale des élections (ANE), Dieudonné Kombo-Yaya.
La tenue de ces élections en 2015, devait pourtant marquer la fin de la transition, et consacrer le retour de la Centrafrique dans le giron des Etats démocratiques. Les raisons invoquées pour justifier l'impossibilité de tenir cet engagement, sont essentiellement d'ordre matériel. Mais au-delà de cette réalité que personne ne conteste, il faut avouer que plus de six mois après sa mise en place, cette instance, qui est l'équivalent de la CENI dans notre pays, n'a pas vraiment réussi à faire fonctionner ses organes, eu égard aux nombreuses divergences et aux conflits d'intérêt qui ont toujours opposé les membres qui la composent.
Cette annonce qui sonne comme un aveu d'échec de l'ensemble de la classe politique centrafricaine, était par ailleurs prévisible, au regard de la situation d'insécurité qui prévaut jusque-là dans le pays. Les affrontements entre les Anti-Balaka et la Séléka, même s'ils ont considérablement diminué, sont encore loin d'avoir totalement cessé.
Comment donc, dans ces conditions, des élections auraient-elles pu se tenir, sachant qu'aucun candidat issu de ces deux groupes armés n'aurait jamais pu battre campagne sur l'ensemble du territoire ? Maintenir l'organisation d'élections dans ces conditions relèverait plus d'un acte de suicide que de courage. Aucune compétition électorale saine ne peut se tenir dans un pays en proie à une guerre civile d'une telle ampleur qui, qui plus est, ne dispose d'aucune armée.
A cinq mois donc de l'échéance donnée par la présidente de la transition, le seul constat que l'on peut faire est tout simplement celui d'un échec cuisant et le risque d'un retour de la violence. Un véritable gâchis au regard des nombreuses pertes en vies humaines, un énorme gâchis sur le plan économique et enfin une bérézina en termes de crédibilité des dirigeants et des hommes politiques centrafricains, aux yeux de la communauté internationale.
Une démission de Catherine serait un retour à la case départ
La transition n'est certes pas encore terminée, mais on est bien tenté de dire qu'après six mois de tâtonnements de Catherine Samba-Panza, les fruits sont bien loin de tenir la promesse des fleurs.
Catherine a sans doute pêché par excès d'optimisme ou peut-être par naïveté, ou simplement par incompétence ; trop d'hésitations, trop de mollesse sur fond de mauvaises décisions. Certaines mauvaises langues vont même jusqu'à l'accuser de faire traîner expressément les choses, dans l'intention de rester encore quelque temps à la tête de l'Etat centrafricain. Cependant, il faut reconnaître aussi que les autres acteurs de la scène politique centrafricaine sont loin de lui avoir facilité la tâche. C'est donc l'ensemble de la classe politique centrafricaine qui est comptable de cet échec de l'agenda des élections 2015. Et la communauté internationale.
Cela dit, la question que l'on ne peut manquer de se poser est la suivante : qu'adviendra-t-il après 2015? Probablement une prolongation de la période de transition. L'inconnu dans cette hypothèse est : qui dirigera cette nouvelle période de transition ? Dame Catherine sera-t-elle reconduite dans ses fonctions? Rien n'est moins sûr, dans la mesure où son seul exploit à la tête de la Centrafrique, est sans doute celui d'avoir réussi à se mettre à dos l'ensemble des acteurs de la scène politique de son pays. A tel point que beaucoup se demandent si ses décisions sont le fait d'un courage, ou plutôt d'une tendance suicidaire.
Mais qui d'autre aurait pu faire mieux qu'elle dans le contexte actuel de la Centrafrique? Une démission de Catherine serait sans doute un retour à la case départ. Il faut plutôt un ressaisissement moral au niveau de tous les Centrafricains d'abord. Que chacun pense avant tout à la Centrafrique qu'ils veulent laisser en héritage à leurs enfants. Que pour une fois, chacun dépasse son ego. Et alors les choses seront plus faciles à gérer.