À partir du 15 septembre, la force africaine présente en Centrafrique passe le flambeau aux Casques bleus de l’ONU. La nouvelle mission onusienne, la Minusca, va déployer 7 600 hommes, dont une grande partie se trouve déjà sur place. À terme, elle devrait compter 12 000 hommes.
Après des mois de violences en Centrafrique, l’ONU envoie ses Casques bleus dans le pays. La force onusienne de la Minusca, qui doit déployer 7 600 hommes – dont les 5 800 soldats de la force africaine de la Misca déjà sur place –, devrait à terme compter 12 000 hommes à effectif plein.
1 800 soldats et policiers supplémentaires, du Bangladesh, du Maroc, du Pakistan, du Sénégal et du Rwanda, vont ainsi être envoyés en République centrafricaine sous l’égide de l’ONU, de même que de nouveaux hélicoptères de transport.
Le rôle de la Minusca
La Minusca, Mission des Nations unies pour la stabilisation en République centrafricaine, doit petit à petit prendre le relais des forces africaines et françaises. La France avait envoyé, en décembre 2013, près de 2 000 militaires dans le cadre de l’opération Sangaris.
« La Minusca devra autant protéger la population, assurer le maintien de l’ordre – en l’absence de forces de police et de gendarmerie –, permettre la transition politique, faire respecter les droits de l’homme et arrêter les responsables d’exactions », explique à JOL Press Emmanuel Dupuy, président de l’Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), spécialiste de géopolitique et des questions de défense.
« Les Casques bleus devront aussi permettre aux convois logistiques de circuler librement à travers tout le territoire centrafricain, et auront la très lourde tâche de favoriser la reconstruction des forces de sécurité, tout en supervisant l’embargo sur les armes que l’ONU a imposé à la République centrafricaine », poursuit le spécialiste.
Des forces indispensables mais insuffisantes
Une mission qui s’avère complexe dans un pays miné par les massacres et exactions perpétrés par les milices anti-balaka et par les rebelles de l’ex-Séléka, deux coalitions hétéroclites qui s’affrontent depuis bientôt deux ans.
« Ces forces sont évidemment indispensables mais il suffit de voir le pays voisin, la République démocratique du Congo (RDC) avec la Minusco pour savoir que les forces des Nations unies ne sont pas suffisantes pour pouvoir assurer la reconstitution d’un État », confie Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), en charge de l’Afrique, interrogé par JOL Press.
L’autre problème, c’est la reconstitution des forces de sécurité centrafricaines : l’armée, la gendarmerie et la police. « Il est évident que les forces étrangères, qu’elles soient bilatérales ou multilatérales, ne sont pas à même de remplacer les forces de sécurité nationales ni d’assurer totalement la paix », estime M. Hugon.
La France, destinée à rester ?
La Minusca, seconde plus grosse opération de maintien de la paix sur le continent africain, devrait néanmoins compter sur un budget annuel considérable, de l’ordre de 800 millions de dollars selon Emmanuel Dupuy. « Reste à convaincre les États-Unis, qui sont le premier contributeur des opérations de maintien de la paix, de la légitimité de financer une telle mission, et ce jusqu’en avril 2015 », rappelle le spécialiste.
Quant aux forces françaises de Sangaris déjà déployées sur le terrain, elles pourraient être mises à disposition de la Minusca, selon la gravité de la situation. Début août, plusieurs militaires burundais de la Misca sont morts dans des combats à Bambari. Le 4 septembre, des accrochages entre des soldats français et des miliciens anti-Balaka ont eu lieu à Bossangoa, dans l’ouest du pays, faisant craindre de nouvelles pertes dans les rangs militaires français, après celles survenues en décembre 2013 et février 2014.
« Agissant potentiellement comme "Nation cadre" de cette future mission onusienne, la présence et la robustesse des moyens déployés par la France depuis la fin de l’année dernière témoigne aussi du caractère déterminant de la présence française dans le pays », indique M. Dupuy. « Car au-delà de Bangui, [la capitale centrafricaine, ndlr], un pays grand comme la France et la Belgique réunies reste à être sécurisé ».