Le forum de réconciliation centrafricain a réclamé lundi le report des élections présidentielle et législatives, en prenant acte de l'impréparation des autorités de transition et malgré les demandes insistantes de la communauté internationale pour un retour rapide à la normalité constitutionnelle à Bangui.
A la clôture de ses travaux, le Forum - réunissant près de six cents délégués devant proposer une sortie de crise au pays -en a appelé aux autorités de transition pour qu'elles "introduisent au plus tôt auprès de la conférence des chefs d'Etat de la CEEAC (Communauté économique des Etats d'Afrique centrale) la demande de prorogation à titre exceptionnel de la transition" et donc le report des élections réclamées par la communauté internationale, ont affirmé les participants aux travaux dans une motion publique.
Le forum demande aux chefs d'Etat de la CEEAC de "donner une suite favorable à cette demande", ont-ils ajouté, en mettant en avant "la faible mobilisation des bailleurs de fonds pour financer les opérations électorales".
-'d'ici la fin 2015'-
Les délégués n'ont fixé aucune échéance pour la tenue des scrutins dans ce pays plongé en 2013-2014 dans une meurtrière crise politico-militaire, sans précédent dans son histoire pourtant très troublée.
Mais, selon la présidente de transition, Catherine Samba Panza, clôturant le forum, "ces élections devraient se tenir au plus tard d'ici la fin de l'année 2015".
Lundi matin, quelques dizaines de manifestants ont brandi devant le forum des pancartes, demandant la démission de la présidente et s'opposant à une prorogation de la transition.
Dans l'après-midi, de très brefs tirs d'origine indéterminée ont été entendus dans la capitale, provoquant des mouvements de panique dans certains quartiers.
Selon le calendrier de sortie de crise en Centrafrique, les élections devaient être organisées au plus tard en août. Mais, les échéances se rapprochant, les préparatifs ont accumulé les retards, sur fond de désintégration de l'Etat.
- réaménagement de la transition -
Si les chefs d'Etat d'Afrique centrale acceptent la requête de Bangui, la transition va devoir être réaménagée, le mandat de Mme Samba Panza arrivant à expiration en août
A l'ouverture du forum le 5 mai, le président congolais Denis Sassou Nguesso, médiateur dans la crise centrafricaine, avait pourtant insisté sur la nécessité de respecter les délais, jugeant que la "priorité" était l'organisation d'élections.
La Centrafrique s'est retrouvée en plein chaos après le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par Michel Djotodia, à la tête d'une rébellion à dominante musulmane, la Séléka.
Les exactions commises par la Séléka dès son arrivée au pouvoir contre les populations majoritairement chrétiennes ont ensuite débouché sur la création de milices d'autodéfense, les anti-balaka, qui s'en sont alors pris aux civils musulmans.
Ces violences contre les civils ont entraîné l'intervention miliaire de la France, ancienne puissance coloniale, avec son opération Sangaris. Une force onusienne est également déployée dans le pays.
Malgré le déploiement de forces internationales, des bandes armées continuent de sévir dans des régions reculées du pays, renforçant les difficultés d'organisation d'élections paisibles.
Le forum de Bangui a dans ce cadre été l'occasion de dirigeants d'une partie de ces groupes armés à relâcher les enfants soldats sous leur coupe. L'Unicef estime leur nombre de 6.000 à 10.000 dans le pays.
Certains groupes armés ont également donné leur accord de principe à un désarmement, moyennant un programme de désarmement, démobilisation, réinsertion (DDR) prévoyant l'intégration de leurs combattants dans les nouvelles forces de sécurité ou leur retour à la vie civile.
Mais cet accord de principe ne comprend aucune modalité pratique de mise en oeuvre ni le précise son financement.