Dorénavant, l'Aid el Fitr (qui marque la fin du Ramadan) et la Tabaski (Aïd el Kebir) seront des jours fériés en RCA, selon les recommandations annoncées lors de la plénière du Forum de Bangui
L'officialisation des fêtes musulmanes en Centrafrique, décidée lors du forum de Bangui, a été accueilli avec soulagement et joie au sein de la communauté musulmane qui y voit une nouvelle donne pour la cohésion sociale.
Dorénavant, l'Aid el Fitr (qui marque la fin du Ramadan) et la Tabaski (Aïd el Kebir) seront des jours fériés en RCA, selon les recommandations annoncées lors de la plénière du Forum de Bangui qui a réuni du 4 au 11 mai dernier environ 600 représentants des autorités de la transition, des groupes armés, des partis politiques et des membres de la société civile pour des débats sur la réconciliation nationale centrafricaine.
A Bangui, dans l’enclave musulmane de KM5, le triomphalisme se lie sur les visages. Le Général Mohamed Moussa Dhaffane, Président de la «Séléka rénovée» (faction de l'ex-rébellion à majorité musulmane) estime que cela n’est que justice pour la communauté musulmane de Centrafrique.
«C’est un sentiment de satisfaction et de joie. L’Etat a toujours reconnu les fêtes chrétiennes, par conséquent, ce n’est que justice pour les musulmans centrafricains. C’est un motif pour eux pour se considérer comme des Centrafricains à part entière, afin de se serrer les coudes avec leurs frères chrétiens pour la reconstruction du pays. C’est également une question de reconnaissance de l’identité.» lance-t-il à Anadolu.
Pour Ousman Abakar, Porte-parole des musulmans de KM5, cette décision est « un pas décisif vers la plénitude de la laïcité de l’Etat centrafricain » alors que le pays se remet peu à peu d'un conflit interconfessionnel qui a fait plusieurs centaines de morts et conduit à l'exil des dizaines de milliers de musulmans.
«C’est très important pour la communauté musulmane en particulier, mais pour tous les centrafricains en général. C’est une marque authentique donnée à la laïcité de l’Etat centrafricain. Je dois faire remarquer que ce n’est pas seulement la communauté qui a arraché par elle-même cette victoire, mais ce sont tous les chrétiens et musulmans qui ont débattu de la question et adopté cette mesure. Donc, nous sommes très contents.»
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Le même enthousiasme est d'ailleurs partagé par la jeunesse musulmane. Adraman Algeche Président de l’Association nationale étudiants musulmans de Centrafrique (ANEMCA) qui salue la victoire rappelle dans le même temps qu'il y a de nombreuses autres revendications en attente.
«Le forum a pris une bonne décision sur la question. A présent, nous espéreons que l’ensemble des préoccupations que la communauté musulmane a soumise à ce forum puisse être prise en compte, notamment en ce qui concerne la représentativité de la communauté musulmane dans toutes les institutions de l’Etat.»
Pour l’Abbé Jésus Martial Démélé, Vicaire général de l’Archidiocèse de Bangui, représentant de la communauté chrétienne, cette décision est bénéfique pour le pays. «Le droit de culte doit être reconnu au peuple tout entier dans sa diversité», déclare-t-il.
«C'est une bonne chose que de donner l’opportunité à un peuple présent sur un territoire, au nom de sa diversité et de la laïcité de l’Etat, de rendre culte selon sa croyance. Aussi, si cela est de nature à consolider la cohésion sociale, je n'y trouve pas d’inconvénient», indique l’ecclésiastique catholique. Un avis que partage d'ailleurs son homologue l’Abbé Freddy Kongoniyé.
Selon la Délibération n° 7 de la Commission « Gouvernance » du Forum de Bangui, il a été retenu que: «Adopter une loi sur la liberté religieuse, la liberté de culte, et sur les relations entre l’Etat et les religions ; ces relations doivent être axées essentiellement sur une problématique de la laïcité. Toutefois, dans un esprit d’équité, le forum propose qu’à l’instar des fêtes de religieuses chrétiennes, les deux principales fêtes religieuses musulmanes soient reconnues dans le calendrier officiel comme jours fériés.»
Si aucune date officielle du démarrage du calendrier qui intègre les fêtes musulmanes n'a encore été communiquée, une source proche du gouvernement à indiqué à Anadolu que "cela est en cours d'étude et que ça ne saurait tarder".
De son côté, le Conseil de sécurité des Nations Unies a appelé à mettre en œuvre rapidement les recommandations formulées dans le cadre du forum.
Les Musulmans représentent près de 15% d'une population centrafricaine estimée à 5,2 millions d'habitants, selon des statistiques non-officielles. La plus grande partie est concentrée dans le nord du pays aux frontières du Tchad et du Soudan, mais il en existe une importante communauté à Bangui.