Ces combattants rebelles seront transférés dans les prochaines heures vers les deux villes du Centre du pays malgré les récents affrontements
Au moins 300 ex-Séléka désarmés, «démobilisés» et cantonnés au camp du Régiment de Défense Opérationnelle du Territoire (RDOT), seront transférés dans les prochaines heures à Bambari et Bria. L’opération, planifiée par le Ministère d’État en charge de la Défense Nationale et la MINUSCA, sera exécutée par l’Organisation Internationale des Migrations (OIM), après une courte consultation de quelques heures effectuée par cette structure internationale dans la localité auprès des autorités locales et des acteurs humanitaires et sécuritaires, il y a quelques semaines. Une consultation qui pré-date de quatre jours les affrontements interconfessionnels meurtriers qui ont enflammé la ville la semaine dernière, mais ne remettent visiblement pas pour autant en question l’agenda de transfert des éléments du RDOT. Nombre d’acteurs locaux et internationaux présents dans la localité ont exprimé leur inquiétude face au manque de préparation de cette opération devant débuter ce mercredi, 08 ou jeudi, 09 octobre.
Selon le Colonel Haroun, l’un des chefs des ex Séléka du camp RDOT, ces ex-combattants «quitteront le jeudi. Les uns resteront à Grimari, Bambari, Bria, Bangassou, Alindao…pour attendre le processus de DDR. Quant à ceux de Bangui, ils vont rester ici un peu pour attendre leur tour.» Selon le colonel Haroun, tous ces ex-Séléka ont été désarmés et partiront sans effets militaires « comme des civils ».
Informé du transfert des éléments du RDOT plus tôt cette semaine, le préfet de la Ouaka, El Hadji Abakar Ben Othman, a réuni les habitants de la localité en matinée. Alors qu’il salue le transfert des ex-Séléka, qui sera accompagnée selon lui d’un appui financier de l’OIM «pour les utiliser dans le domaine de l’assainissement des lieux publics, des écoles, des hôpitaux en attendant le DDR», le préfet a néanmoins exprimé quelques inquiétudes. Notamment à la suite du transfert récent des déplacés de PK12 par l’OIM au printemps dernier, considérés par certains habitants de la localité comme plus extrémistes que la norme. «Je demande à ces ex-combattants de ne pas agir comme les déplacés de PK12 une fois arrivés à Bambari. Ils ne doivent pas se lancer dans les actes délictuels sinon, ça ne marchera pas», a indiqué le préfet.
D’après une autorité locale, dont les propos tenus lors de la réunion de ce matin sont rapportés par le correspondant du RJDH à Bambari, «l’arrivée des déplacés de PK12 a causé du tort à la population car ils se sont livrés à des actes illicites. Transférer des ex-combattants maintenant, c’est synonyme d’empirer la tension dans la ville.» Selon certains ex-Séléka, une fois transférés en dehors de Bangui, il n’y a aucun plan convainquant pour leur prise en charge, en attendant la réinsertion dans leurs communautés. Et à Bambari, nombreux sont les acteurs locaux et internationaux qui notent la libre-circulation et prolifération des armes aux mains des deux groupes d’ex-Sélékas toujours mobilisés dans la localité. Rien, a priori, n’empêchera les ex-Séléka désarmés prochainement transférés à Bambari de réintégrer les rangs de leur ancienne formation rebelle.
Du côté de l’Organisation Internationale des Migrations (OIM), on soutient que le projet est géré par le «Gouvernement de la République Centrafricaine en coordination avec la MINUSCA» et que l’OIM ne fournit qu’un «appui technique». Questionnée sur l’accueil qui sera réservé aux ex-Séléka une fois transférés vers Bambari - une ville tendue où une large part de la population vit toujours dans des camps de déplacés vulnérables aux attaques des groupes armés civils comme paramilitaires -la structure internationale indique que « le Gouvernement de la RCA, soutenu par la communauté internationale, continuera à mobiliser les ressources nécessaires pour accompagner le processus de retour des combattants dans leurs communautés. Pour faciliter le début d’un processus d’intégration, l’OIM avec ses partenaires facilitent des projets socio-économiques pour la communauté. C’est une processus inclusif et participatif.»
Selon Anne Kathrin Schaefer, gestionnaire de programme de l’OIM, «le processus de retour est un processus volontaire basé sur la déclaration de leur volonté à retourner vers leurs communautés d’origine. Le Gouvernement, la MINUSCA et l’OIM vont faire tout en leur possible pour assister le processus de retour d’une manière efficace, digne et volontaire». Mme Anne Kathrin Schaefer note de plus que chaque retour est accompagné par un désarmement, des séances de sensibilisation, des vérifications médicales, des séances psychosociales et des activités spécifiques pour les femmes et des enfants associés aux groupes armés avec l’appui de l’UNICEF.
Cette opération de transfert des ex-Séléka vers les villes de Bambari et Bria, la troisième du genre depuis le début septembre 2014, intervient une semaine après de récents affrontements meurtriers entre communautés musulmane et chrétienne dans le chef-lieu de la Ouaka.