Aussitôt que la coalition seleka ait déclenché les hostilités contre le pouvoir de Bozize en Décembre 2012, la Centrafrique prit immédiatement l’allure d’un cimetière à ciel ouvert. Les scènes de tueries étaient indescriptibles. Les éléments de la coalition seleka décimaient en coupe réglée tous les Centrafricains qui étaient réfractaires à leur avènement.
Aucune famille centrafricaine, fut ‘elle proche ou lointaine des selekas, n’était épargnée par ce psychodrame historique. Aucunes personnalité, fut’elle membre de la junte au pouvoir en ce temps, ne pouvait se targuer de ne pas être endeuillée pendant cette crise. Pire, lorsque les Anti Balakas attaquèrent le pouvoir sanguinaire de Djotodjia en Décembre 2013, ce fut le début d’une hécatombe historique de la population centrafricaine. De part et d’autres, on enregistrait des actes inhumains d’une autre ère. Tout portait à croire que le pays était tombé sous le charme macabre des charniers, des exécutions sommaires, des crimes odieux et des tueries crapuleuses.
La crise était violente, les corps en pleine décomposition jonchaient les bordures de la route. En plus, beaucoup de familles avaient perdu leurs proches parents sans avoir une idée sur la circonstance de leur mort. Bon nombre de Centrafricains refusent toujours d’accepter la disparition inexpliquée des leurs. Au moment où certains Centrafricains recherchent désespérément le corps de leurs parents, d’autres souffrent encore des problèmes psychiques liés à l’assassinat cruel d’un membre de leur entourage. Pourquoi, Comment, Quand, Où ? Telles sont les questions qui taraudent l’esprit des Centrafricains qui ne maîtrisent pas le contour du décès des leurs proches.
En dépit des efforts consentis par les autorités de la transition et tous les acteurs impliqués dans la crise actuelle, beaucoup de Centrafricains peinent à faire leur deuil. Il serait souhaitable que le pouvoir de Bangui institue une Journée de Deuil National pour permettre aux fils et les filles du pays se d’apaiser et enterrer définitivement la hache de guerre car ils traînent encore par devers eux les miasmes de la vengeance et de la haine.
Tant que les Autorités de Bangui ne décrètent pas une Journée d’enterrement symbolique de toutes les victimes des Selekas et des Anti Balakas, aucun Centrafricain ne s’affranchira de la perte non élucidée d’un membre de sa famille. L’enterrement symbolique dédiabolise la crise dans un premier temps et facilite le deuil intérieur de chaque Centrafricain dans un second temps. Pour que cet enterrement symbolique porte ses fruits sur toute l’étendue du territoire centrafricain, il serait enviable que les autorités de Bangui érigent un mémorial national de toutes les victimes de la crise. Sur les murs de ce mémorial, devront figurer les noms de toutes les victimes du conflit afin que l’on s’en souvienne à jamais d’eux.
Espérant que le Conseil National de la Transition et le Gouvernement s’empareront de cet aspect très subtil de la crise, car sous d’autres cieux, la Communauté internationale déverserait déjà une cohorte de psychologues pour apporter des solutions et aides au plus fragiles. D’ores et déjà, on raconte un peu partout que le syndrome de « soliloquie » s’empare peu à peu des Centrafricains. Peut être que la journée du deuil historique et l’enterrement symbolique de toutes les victimes contribueront davantage à la réminiscence nationale d’appartenance à une nation voire un pays.C’est en cela que les mots peuvent agir contre les maux de la société.
Rodrigue Joseph Prudence MAYTE
Chroniqueur, Polémiste