Kadéï Vox: Bonjour Martin ZIGUELE, vous êtes le Président du MLPC et candidat à l’élection présidentielle prochaine. Le MLPC fait partie de la plate-forme l’AFDT (Alliance des Forces Démocratiques pour la Transition) qui regroupe en son sein d’autres partis politiques avec leur leader respectif, quelle est votre stratégie ?
Martin Ziguélé: Comme son nom l'indique, l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Transition est une plateforme politique constituée pour soutenir la transition politique en cours dans notre pays. Elle n'est pas une alliance électorale, et n'a pas été échafaudée pour soutenir un candidat unique comme certains l'ont prétendu. Cependant des alliances électorales entre un ou plusieurs partis, s'ils le souhaitent, ne sont pas exclues.
KV: Quelles sont les thèmes que vous allez aborder lors de cette campagne électorale ?
MZ: Un programme politique n'est pas simplement un exercice intellectuel, et il n'est pas intemporel. Notre programme politique est la réponse que mon parti et notre plateforme électorale en constitution comptent proposer aux centrafricaines et aux centrafricains face à la crise que nous traversons. Notre programme s'appuie sur une triptyque Réconciliation-Rassemblement et Reconstruction.
Pourquoi la Réconciliation? Parce que notre nation est aujourd'hui divisée et qu'il faut "réconcilier " les cœurs.
Pourquoi le Rassemblement? Parce que ce pays a trop longtemps vécu dans des divisions factices.
Pourquoi la Reconstruction? Parce que nous avons un pays effondré que nous devons reconstruire impérativement, en mettant en valeur les nombreuses opportunités de notre pays.
KV: Nous arrivons à la fin de la transition en Centrafrique, après deux ans de règne, Catherine SAMBA-PANZA a-t-elle respecté la ligne fixée par la communauté internationale et par les partenaires du Centrafrique ? Je voudrai que vous nous répondiez avec sincérité.
MZ: La transition politique en RCA se déroule selon une " feuille de route" élaborée par le gouvernement de transition et adoptée par le Conseil National de Transition (CNT), après avis conforme de la communauté internationale. Cela signifie que ces mêmes intervenants effectuent le suivi de la bonne exécution de la feuille de route. C'est le cas par la CNT mais aussi par le Groupe des huit pays et organisations (appelée aussi G8 ) qui suivent la crise centrafricaine. Est ce que les objectifs ont été atteints? Je pense que la situation sécuritaire s'est améliorée dans certaines parties du pays même si elle reste globalement fragile. Sur le plan économique, l'activité reprend mais la chute de l'économie a été si forte en 2013 (la richesse nationale a diminué d'un tiers) que la remontée est encore très faible. La situation est donc contrastée mais on revient de loin.
KV: Quel président seriez-vous si vous êtes élu à la tête du Centrafrique ?
MZ: Notre pays n'a besoin ni d'un illuminé ni d'un potentat. Nous avons besoin d'un Président qui a l'expérience de la gestion des affaires de l'Etat, et qui peut mettre au travail des équipes.
Je serai donc, comme notre situation l'exige, un président rassembleur et réformateur, car notre pays a besoin de reformes drastiques pour sa reconstruction. Je ne ménagerai pas mes efforts comme je l'ai fait quand j'étais Premier Ministre pour combattre la corruption et la mauvaise gouvernance, afin que, entouré d'une équipe crédible, nous puissions lancer le vaste chantier de la reconstruction de notre pays. Tous les enfants de ce pays doivent être mobilisés pour apporter chacun sa pierre à la reconstruction de cet édifice commun.
J'ai l'ambition d'être ce mobilisateur pour cette grande réforme en profondeur dans l'unité, la justice et la paix.
KV: Certains de vos compatriotes vous accusent de collaborer et de soutenir l’ex-régime séléka, que leur répondez-vous ? Je me réfère ici à la tribune de notre confrère Guy José Kossa, parue sur le web-journal « Les plumes de RCA » datant du 24 novembre 2014, qui vous met en cause et aussi Maître Tiangaye.
MZ: Il y'a un principe de droit qui dit que lorsque vous accusez quelqu'un vous en apportez la preuve. Il ne suffit pas de répéter mille fois un mensonge pour qu'il devienne la vérité. Cela fera bientôt trois ans que les milieux proches de l'ancien pouvoir intoxiquent l'opinion avec ces mensonges sans en apporter la moindre preuve. C'est un disque rayé utilisé par ceux qui n'ont aucun argument politique contre le MLPC. Ces mensonges permettent aussi aux tenants de l'ancien régime de ne pas s'expliquer sur la responsabilité qui est la leur de n'avoir pas défendu notre pays devant l'avancée des rebelles.
KV: Officiellement, plus de 5000 centrafricains sont tombés lors de la crise fratricide qui a secoué votre pays, quel sort réserveriez-vous aux protagonistes de cette crise si vous êtes le futur Chef de l’Etat centrafricain ?
MZ: Le Forum National de Dialogue de Bangui a réaffirmé la volonté de tous les centrafricains de refuser désormais l'impunité, et d'appliquer la justice et la réparation avant la réconciliation. nous saluons la création de la Cour Pénale spéciale de la RCA qui dira le droit et justice sera rendue.
Je laisserai la justice faire son travail dans le strict respect de la séparation des pouvoirs exécutifs et judiciaires.
KV: Êtes-vous oui ou non pour le vote des 460 000 centrafricains réfugiés à l’étranger (HCR) et ceux qui sont des déplacés internes ? Oui, Non, pourquoi ?
MZ: Nous sommes pour le vote des réfugiés parce que c'est un droit imprescriptible des citoyens centrafricains qu'ils sont. Ce sont pour la plupart des fils et filles du pays qui ont été obligés de fuir le pays devant les graves violences que nous avons connues.
Leur refuser la possibilité de participer au choix de leurs futurs dirigeants les isolerait encore plus , et cela serait un signal négatif et dans tous les cas contraire à la volonté politique exprimée lors du Forum de Bangui de renforcer la cohésion nationale
KV: Ne pensez-vous pas que les prochaines élections générales en Centrafrique sont un peu précipitées ?
MZ: Newton disait que le mouvement se prouve en marchant. L'essentiel est de fixer un cap et de démarrer le
s opérations électorales. Cela fut le cas pour le Forum de Bangui, ce le sera aussi pour les élections.
Je pense que c'est le bon moment pour démarrer le processus, mais je conçois que nous ne devons pas précipiter les choses en faisant attention à bien réunir tous les ingrédients pour obtenir un résultat satisfaisant pour l'ensemble des Centrafricains.
KV: Je vous remercie d'avoir répondu à nos questions.
Propos recueillis par Rocka Rollin LANDOUNG, Directeur de publication Kadéï Vox – Analyste du système international.