Les autorités de transition en Centrafrique ont fixé il y a quelques semaines, la tenue du premier tour de l'élection présidentielle au 18 octobre 2015. Le second tour est prévu pour le 22 novembre, soit plus d’un mois après. Avant ces deux dates, un référendum constitutionnel doit se tenir le 4 octobre. En somme, une feuille de route claire a été fixée par Catherine Samba-Panza, la présidente de transition qui est décidée à quitter le pouvoir avant la fin de cette année 2015. Mais entre la volonté clairement affichée de la présidente centrafricaine de procéder à un passage de témoin, il y a la réalité du terrain qui suscite de graves inquiétudes.
En effet, la Centrafricaine traîne encore les stigmates du conflit armé qui a opposé les forces de l’ex-président François Bozizé et celles de la Séléka de son tombeur, Michel Djotodia. Bien plus, ce conflit armé a créé un clivage entre les communautés musulmanes et chrétiennes du pays, qui aujourd’hui encore se regardent avec une méfiance réciproque. Les batailles de pouvoir ont ainsi ébranlé les bases du vivre-ensemble des Centrafricains, ainsi que celles de l’Etat, en tant que garant de l’ordre, de l’autorité et de la coexistence pacifique. Et c’est dans un flot d’incertitudes que vogue la Centrafrique. Pourtant, la présidente de transition pousse pour les élections soient organisées avant la fin de l’année 2015. Y parviendra-t-elle ? Rien n’est moins sûr.
A la pratique, le processus électoral qui a débuté par le recensement des potentiels électeurs il y a quelques temps, est tributaire de la mobilisation d’énormes ressources financières. Aux dernières nouvelles, à peine la moitié des sommes requises ont été mobilisées. Au-delà des questions d’argent, malgré toutes les déclarations de bonnes intentions du gouvernement de transition, l’autorité de l’Etat n’a pas été rétablie sur toute l’étendue du territoire centrafricain. Ces derniers jours, après plusieurs semaines de relatives accalmies, de nouveaux actes de violences impliquant des groupes armés et des soldats onusiens ont éclaté, entraînant de nouveaux morts. Ces derniers éléments sont ainsi venus rappeler aux observateurs que la paix demeure encore fragile en Centrafrique. Dans ces conditions peut-on valablement envisager des élections crédibles dans moins d’un trimestre ? Bien malin qui pourrait donner une réponse péremptoire à cette interrogation.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que pour les autorités de la transition, le temps presse. Le calendrier très serré est à l’évidence une gageure au regard du délabrement de l’administration qui a cessé d'exister dans certaines zones du pays. Par ailleurs, les populations lassées par les interminables conflits, n’ont guère manifesté un grand enthousiasme lors du récent recensement électoral. Quand on y ajoute, les déplacements massifs de populations provoqués par les violences, de nombreux acteurs politiques centrafricains sont sceptiques sur la tenue aux dates indiquées d’un scrutin présidentiel crédible. « On ne vote pas avec un pistolet sur la tempe. Si toutes les conditions ne sont pas réunies, on risque d'avoir un président mal élu et c'est justement ce qu'il faut éviter si on ne veut pas repartir pour 10 ans d'instabilité », selon une source politique centrafricaine.
Malgré les réserves émises sur la situation administrative, financière et sécuritaire du pays, les acteurs politiques de tous les bords sont néanmoins déjà dans les starting-blocks. Chacun compte ses soutiens et jaugent ses forces dans la perspective de la présidentielle d’octobre. Pour Catherine Samba-Panza, tenir la présidentielle avant la fin d’année est un défi qu’elle tient à relever. D’après des obeservateurs de la vie politique centrafricaine, la présidente de transition veut sortir en beauté en cédant le pouvoir comme promis avant la fin de l’année 2015. Pour ce faire elle met les bouchées doubles. Mais le temps lui est compté…