Sous la menace de la secte islamiste nigériane Boko Haram et des mouvements rebelles, les pays de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) annoncent le renforcement de leur coopération pour intensifier la lutte contre ces fléaux et d'autres défis sécuritaires comme les trafics de drogues et le commerce des médicaments contrefaits.
A l'ouverture d'une réunion d'experts de cet organe mardi à Yaoundé, le secrétaire permanent du comité des chefs de police d'Afrique centrale (CCPAC) et par ailleurs chef du bureau régional d'Interpol pour cette même zone, Serge Ngoma, a recommandé la mise en place de programmes de formation et l'organisation des opérations de police conjointes ou simultanées entre les différents pays.
"Plus les forces de défense ou de sécurité prennent des dispositions pour lutter contre la criminalité, plus les délinquants trouvent de nouvelles stratégies ou de nouveaux procédés pour commettre leur besogne. Nous évoluons et puis nous faisons en sorte d'adapter nos stratégies en fonction aussi de l'évolution de la criminalité", a-t-il souligné à la presse.
En ligne de mire surtout, le péril terroriste de Boko Haram, qui affecte le Cameroun et le Tchad, deux pays de la région, de la même façon que le Nigeria, le fief d'origine de cette organisation criminelle. Pour les services de renseignement, le défi consiste notamment en un meilleur contrôle des flux migratoires dans ces pays aux frontières poreuses et en outre fragilisés par la circulation des armes légères.
"Nous avons eu à mettre des dispositions sécuritaires qui marchent. Donc, il y a une accalmie. Mais vous savez, la nébuleuse est à l'image même du terrorisme, qui est un phénomène rampant. Il faut nécessairement être sur le qui-vive et c'est ce que nous faisons tous les jours", a relevé dans un entretien à Xinhua le directeur général adjoint de la police nationale du Tchad, Mbaïpiti Diontilo.
Comme ses voisins, le pouvoir de N'Djamena a effectivement engagé une lutte sans merci en vue de l'éradication de Boko Haram. Dix personnes jugées coupables d'actes criminels liés aux actions de ce groupe terroriste ont récemment été exécutées après avoir été condamnées à la peine capitale.
"Nous avons demandé à la population de ne pas se focaliser sur les forces de défense et de sécurité, mais de prendre elles-mêmes à charge en dénonçant tout qu'elles jugent suspect. C'est ce qui a marché dans des lieux de culte et aussi bien quand il y a un spectacle, des jeunes participent à des fouilles corporelles", a précisé M. Mbaïpiti Diontilo.
Prélude à la 16e session du Comité des chefs de police et du Forum des ministres en charge des questions de sécurité en Afrique centrale programmée jeudi et vendredi, la réunion ouverte lundi rassemble des experts des questions policières dans le domaine de la police judiciaire, de la police des frontières, de la lutte contre le trafic de drogues et de la coopération policière internationale, selon des sources officielles.
Pour le délégué général à la Sûreté nationale du Cameroun, Martin Mbarga Nguelé, "ces experts ont la mission de procéder à l'identification et à l'évaluation des phénomènes criminels préoccupants en Afrique centrale, en vue de proposer des solutions techniques et opérationnelles aux chefs de police du CCPAC".
"Il revient également, a-t-il ajouté, d'examiner les problèmes juridiques et pratiques relatifs à la collaboration policière en Afrique centrale. A cet égard, ce groupe d'experts doit, entre autres, veiller à la mise en œuvre de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats" de la région.
En plus de la nécessité rappelée de la planification et de la supervision des opérations de police conjointes ou simultanées, des propositions sont également attendues pour permettre l'harmonisation des législations nationales et l'élaboration des programmes d'enseignement harmonisés dans les écoles de police, en vue d'une meilleure coordination de la lutte contre les formes de criminalité identifiées.
De l'avis du chef de la police nationale camerounaise, l'intensification de cette coopération est impérieuse, étant donné le constat de recrudescence de la criminalité transfrontalière dans la zone CEMAC, "caractérisée par la prolifération des médicaments contrefaits et illicites, qui inondent les coins les plus reculées de nos contrées".
La même inquiétude est justifiée par "la circulation des armes légères et de petit calibre qui facilite la multiplication des bandes armées entre les différents territoires de nos Etats, le trafic de drogues et autres stupéfiants, l'expansion de la criminalité numérique, notamment la cybercriminalité".
C'est dans ce contexte morose que Boko Haram a trouvé son champ d'intervention. Pour le combattre, les stratégies des polices nationales des pays d'Afrique centrale s'associent à un dispositif de sécurisation des espaces frontaliers commun décidé par la Commission du Bassin du lac Tchad (CBLT).
Il s'agit de la Force multinationale mixte (FMM) sous commandement nigérian et dotée de 10.500 hommes (8.500 soldats, et 2.000 gendarmes et policiers) en cours de déploiement par le Nigeria lui-même, le Cameroun, le Tchad, le Niger et le Bénin. L'état-major de cette force en partie financée par les puissances étrangères est basé à N'Djamena. F