« Dénoncez, dénoncez, dénoncez…» ; le Centrafricain attend de vous ce courage. Le pape François nous donne chaque jour, dans sa simplicité, les armes de la vérité dans ses sermons.
Chers Pères et Frères dans le ministère,
Je suis profondément ému de tout le travail combien intéressant que vous abattez depuis le début de cette crise chez nous en Centrafrique pour sauvegarder la Paix, la concorde et la survie du peuple. Je refuse personnellement le concept de cohésion sociale utilisé par beaucoup d’acteurs en Centrafrique car il est très équivoque et ne cadre pas encore au contexte centrafricain.
Merci pour votre présence, merci à la plate-forme. C’est en cela que nous tous, pasteurs et missionnaires, sommes appelés. J’admire votre courage et votre détermination s’ils sont vrais et sincères, et s’ils ne sont surtout pas intéressés. Je vous rassure de tout mon soutient spirituel pour l’instant. Cependant, permettez-moi de faire une observation sur le fond du mécanisme opérationnel de votre fonctionnement :
Vos déclarations : Elles sont encore légères et incohérentes avec les réalités que vivent les centrafricains. Ce décalage de discours fait douter quelques-fois de votre neutralité. Parfois votre rôle ne se distingue pas des Pompiers qui pourraient voler seulement au concours des membres de la transition pour sauvegarder leur pouvoir. Je pense que vous pouvez aller au-delà de cette typologie qui caractérise votre mission jusque là.
Je vous propose le modèle du Pape François qui crie clairement dans le désert : « Arrêtez de fabriquer des armes, arrêtez les trafics d’armes » avant de proposer un discours sur le modèle de société qu’il entend voir promouvoir pour notre temps. Dans le cas centrafricain, j’aurais aimé vous entendre dire, aux Institutions de l’ONU et à la France par son Ambassadeur d’arrêter de nous tromper et de nous instrumentaliser ; d’arrêter de sacrifier des vies humaines au profit des intérêts politiques (diamants et ors). Aussi de dire à Samba Panza d’arrêter d’être naïve et commerçante de poulets au détriment des vies humaines. Le peuple réclame un droit de survie, elle s’alarme de coup d’Etat. J’aurais aimé que vous lui dites d’arrêter de rêver de longs jours en tête de transition car sa politique en deux ans ne sied pas aux réalités des centrafricains. Je vous propose donc d’écrire unanimement vos discours. Ce qui seraient mieux construits que de vous livrer à la spontanéité qui vous discrédite et qui reste jusque-là très loin des réalités.
Vos rôles : Je n’ai pas la prétention de vous rappeler que vous êtes prophètes pour annoncer la vie et non que de malheurs.
Relisons ensemble toute la construction de la Bible : Les prophètes n’ont pas seulement annoncé le pardon et la réconciliation comme vous vous acharnez à le faire. Ils ont aussi largement dénoncé l’oppression des rois, l’injustice des leaders politiques etc… Sur cet aspect d’agent de fonction, je pense qu’il y a encore du pain sur la planche. Je vous exhorte à vous mettre véritablement à l’écart pour comprendre au-delà d’une lecture politique, la misère que court le peuple centrafricain.
Quand nous, Eglise catholique, avions fait louer à une grande ONG internationale des locaux qui ont servi à l’hébergement des « enfants soldats » qui ont par la suite attaqué les quartiers sud et assiégé la ville de Bangui par le Sud lors du putsch de 2012, c’était une pareille naïveté.
Nous devons l’avoir encore sur la conscience.
Oui, nous devons crier et travailler sans nous lasser à la réconciliation et au pardon. Mais nous devons aussi conseiller ardemment à l’établissement d’un Etat de droit, gage des libertés individuelles et collectives.
Depuis un mois, j’ai quitté Bangui. Mais j’ai vécu, comme vous, la crise et j’en sais quelque chose. Cet appel s’inscrit dans une perspective de collaboration. Vous savez qu’à plusieurs occasions, nous avions réfléchi et travaillé ensemble. Je me dois le devoir de conscience de vous accompagner dans cette lourde responsabilité.
Recevez tous mes soutiens indéfectibles pour la justice, la liberté, le pardon et la réconciliation en Centrafrique.