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Centrafrique : «Comment se réconcilier? Nos cœurs sont en guerre»
Publié le lundi 19 octobre 2015  |  tdg.ch
Centrafrique
© Autre presse par DR
Centrafrique : «Comment se réconcilier? Nos cœurs sont en guerre»
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Le climat reste très tendu en République centrafricaine, où la perspective d’une réconciliation nationale s’éloigne

Les Centrafricains devaient se rendre aux urnes ce dimanche. Mais les scrutins présidentiel et législatif ont été reportés. Dans le climat actuel, des élections apparaissent plus comme un déclencheur potentiel de nouvelles violences que comme la solution miracle voulue par la communauté internationale.

«Comment peut-on se réconcilier alors que nos cœurs sont toujours en guerre?» s’interroge Toussaint Nasombé, en avançant prudemment au milieu des maisons désertées de leurs habitants. «Le 26 septembre, les musulmans nous ont attaqués», raconte ce père de famille qui vit dans le quartier Bazanga à Bangui, la capitale centrafricaine. «Ils ont brûlé, pillé… Plusieurs personnes ont été tuées, dont un de mes frères.»

Couvre-feu en vigueur

A la fin de septembre, le meurtre d’un jeune musulman a entraîné une nouvelle flambée de violences intercommunautaires qui a paralysé Bangui pendant quatre jours. Une soixantaine de personnes ont perdu la vie, selon le gouvernement centrafricain, et plus de 300 ont été blessées. Depuis, un couvre-feu est toujours en vigueur. Malgré un calme apparent, la situation reste volatile.

A Bazanga, des hommes patrouillent, un fusil automatique posé négligemment sur l’épaule. «Le quartier musulman se trouve à quelques centaines de mètres. Nous sommes dans la «zone rouge», plus personne n’habite ici», explique l’un d’eux. Ses propos sont ponctués de tirs d’intimidation venus d’un côté ou de l’autre de la ligne de démarcation. «Lorsqu’ils tirent, on tire aussi, commente-t-il. On leur signifie ainsi qu’on n’a pas l’intention de se laisser faire.»

Non loin de là, dans le quartier PK5, la dernière enclave musulmane de Bangui, l’appel du muezzin retentit. La vie a repris depuis quelques mois, des familles parties se réfugier dans les pays voisins sont revenues au compte-gouttes. Mais, ici aussi, les dernières violences font craindre une nouvelle escalade. A Bangui, la moindre étincelle peut faire jaillir le feu. Jeudi soir, des affrontements se sont produits en bordure du quartier.

«Des antibalakas ont fait irruption et ont tiré sur de jeunes musulmans qui jouaient au football, raconte Youssouf Mahamat, un des représentants du quartier. Nos groupes d’autodéfense ont réussi à les repousser, mais il y a eu des blessés.» La pluie a fini par faire taire toutes les velléités des combattants. Jusqu’à la prochaine fois.

Le cycle de représailles est bien rodé entre les milices musulmanes et celles des «antibalakas», souvent qualifiées de «chrétiennes». Dans ce pays où les armes prolifèrent, les forces internationales peinent à maintenir un semblant de paix.

Gouvernement de transition

«Nous sommes confinés ici, nous ne pouvons pas sortir sans risquer notre vie», confie Houda Daoud, la mère de l’adolescent dont l’assassinat a déclenché les violences de septembre, qui vit dans le PK5. «Nous étions venus à Bangui il y a quelques mois car je pensais que ce serait plus sûr qu’en province», regrette-t-elle en montrant des photos de son fils en tenue d’étudiant. «Mais certains ne veulent pas la paix. Chacun campe sur ses positions et se renvoie la responsabilité», lâche-t-elle amèrement.

Un gouvernement de transition, dirigé par la présidente Catherine Samba Panza, a été désigné en janvier 2014. Il est censé céder prochainement la place à un gouvernement élu. Mais le scrutin présidentiel initialement prévu ce dimanche a été reporté sine die, sans annonce officielle. «Beaucoup de gens ont intérêt à ce que le processus électoral traîne, ou échoue, confie une source sécuritaire. Certains pour des motifs politiques, car ils estiment qu’ils n’ont pas été suffisamment impliqués, d’autres pour des motifs économiques car ils profitent du chaos qui règne dans le pays. Les intérêts vont bien au-delà du conflit confessionnel.» Quant aux milices d’autodéfense, elles sont instrumentalisées pour servir les desseins des uns et des autres.

Le conflit, initié en décembre 2012, a laissé des cicatrices indélébiles. Et pour la population centrafricaine, le bout du tunnel semble encore loin.
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