Dans un discours à la nation diffusé sur les antennes de Radio Centrafrique, la chef d'Etat de la Transition, Catherine Samba Panza, impute aux signataires de l'accord de Nairobi que sont François Bozizé, Michel Djotodia et Nouredine Adam la recrudescence de violence aveugle dont Bangui est encore le théâtre. Elle demande à la justice d'utiliser tous instruments juridiques nationaux et internationaux pour poursuivre les auteurs de ces barbaries et leurs complices afin qu’ils répondent de leur actes devant les tribunaux. Mme Samba-Panza appelle aussi à une action rigoureuse contre les extrémistes.
Texte du discours ci-dessous
Centrafricaines, Centrafricains,
Chers compatriotes,
C’est avec une profonde consternation que je m’adresse à vous aujourd’hui. Une fois de plus, les ennemis de la paix sévissent depuis quatre jours dans les 2ème, 3ème, 4ème, 5ème et une partie du 6ème Arrondissement de la ville de Bangui.
En effet, à la suite d’une embuscade suivie d’assassinats dont ont été victimes des éléments de l’UPC en se rendant au Camp Mpoko pour des raisons privées, les extrémistes du KM5 bien connus de tous et leurs alliés des Accords de Nairobi ont engagé des représailles contre les populations de ces quartiers. Il s’en ait suivi un cycle de représailles contre représailles qui sèment la désolation par la tuerie de paisibles citoyens, hommes, femmes et enfants, et par l’incendie de plusieurs habitations. De nombreuses familles sont ainsi endeuillées et entièrement privées de leurs biens matériels et immobiliers. Plusieurs ont trouvé refuge soit dans les sites des déplacés, soit dans des familles d’accueil.
J’adresse aux familles des disparus mes sincères condoléances et à toutes les autres victimes ma profonde compassion.
Sur le plan humain et de notre vivre ensemble, ces évènements montrent que les cœurs sont encore en guerre et que les engagements pris par les acteurs politiques et les groupes armés lors du Forum de Bangui et précédemment ne sont pas sincères.
Ce sont précisément ceux qui ont pris l’engagement de faire la paix qui dressent les centrafricains contre les centrafricains.
C’est pourquoi, je condamne avec la dernière vigueur ces pratiques barbares et inadmissibles ayant pour but avoué d’accentuer la fragilisation de la Transition et pour funeste objectif de saborder la visite annoncée du pape François et de porter un coup fatal au processus électoral.
Nous devons tous condamner cet extrémisme sans retenue qui s’attaque ouvertement et de manière blasphématoire à des figures morales emblématiques de notre pays.
Mes chers compatriotes,
Je sais que vous tous vivez dans la colère le fait que des malfrats bien connus continuent de commettre des exactions contre la population au vu et au su de tout le monde sans être inquiétés. Ils défient l’autorité de l’Etat et prennent en otages les paisibles populations, principalement au Km5 et à Boy-Rabe mais aussi sur les routes de l’arrière-pays où ils érigent des barrages pour racketter et tuer.
Tant qu’il n’y a pas de riposte rigoureuse contre ces extrémistes qui ne veulent visiblement pas de paix dans notre pays, il sera difficile pour la Transition d’agir efficacement. J’ai donc ordonné à la justice d’utiliser tous les instruments juridiques nationaux et internationaux pour poursuivre les auteurs de ces barbaries et leurs complices afin qu’ils répondent de leur actes devant les tribunaux. Certains de ces complices sont déjà sous les verrous et je veillerai à ce que la justice poursuive son travail dans ce sens jusqu’à la neutralisation de tous les acteurs sur le territoire national et à l’extérieur. Mes chers compatriotes,
Il y a environ un mois, Bangui a connu une recrudescence de violences sur fond de tensions intercommunautaires avec un bilan lourd d’une centaine de morts et plus de 300 blessés qui ont mis à mal la cohésion sociale. La communauté Internationale avait alors estimé qu’il était urgent d’apporter un soutien immédiat à la stabilisation et la consolidation de la paix en RCA.
Les derniers évènements dramatiques intervenus à un mois d’intervalle de ceux du 26 septembre confirment que les efforts de la MINUSUCA sont insuffisants pour garantir la sécurité à Bangui et que des efforts supplémentaires doivent être faits pour recadrer les interventions des forces internationales et notamment négocier la mise en place des postes avancés dans tous les quartiers afin d’assurer une sécurité de proximité aux populations. C’est pourquoi, nous exhortons les forces internationales à une action vigoureuse afin que Bangui soit sanctuarisé à l’approche d’évènements importants, et le pays sécurisé. La visite du pape et les élections doivent être vécues par les centrafricains comme des évènements unificateurs, œcuméniques et refondateurs, à vivre dans l’apaisement.
Face au danger qui menace la population, j’ai instruis nos forces de défense et de sécurité nationales de se joindre aux troupes internationales pour s’interposer entre les parties au conflit et frapper les récalcitrants qui persistent dans la voie de la violence. Ainsi, les FACA, la Gendarmerie et la Police Centrafricaine vont être plus actives sur le terrain aux cotés de la SANGARIS et de la MINUSCA. Malgré leurs interventions conjointes, les ennemis du peuple ont frappé durement. Cela démontre à quel point ces derniers sont déterminés à détruire la paix si chèrement retrouvée par les efforts conjugués des populations à tous les niveaux depuis mon accession à la tête de l’Etat. Je m’incline devant la mémoire de tous les soldats qui ont payé de leur vie en combattant pour la paix. Je salue la bravoure et la détermination de toutes les troupes nationales et internationales.
En ma qualité de Chef Suprême des armées et de première garante de la sécurité du peuple centrafricain, j’ai demandé à la MINUSCA de mettre à la disposition de nos forces de défense et de sécurité nationales les armes de l’armée nationale sous séquestre, ceci afin de renforcer les capacités d’actions de nos troupes engagées dans les combats. J’y veillerai personnellement. J’ai demandé également aux forces internationales de redoubler d’efforts conformément à la résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies en utilisant les moyens forts aux cotés de nos troupes pour traquer les auteurs de ces troubles et les mettre hors d’état de nuire.
Je ne peux tolérer que les centrafricains soient manipulés à s’entretuer ainsi pour satisfaire des ambitions politiques personnels des individus et des intérêts inavoués. C’est pourquoi, j’ai réitéré ma demande au Comité des Sanctions des Nations Unies et à la Cour Pénale Internationale ainsi qu’aux pays concernés de tout mettre en œuvre pour appliquer les sanctions qui pèsent sur les leaders politiques impliqués dans ces troubles afin que ces derniers soient arrêtés où qu’ils se trouvent et répondent de leurs actes devant la justice.
Mes chers compatriotes,
Tous, nous savons la longue période difficile que notre pays a traversée et continue de traverser. Mais, en dépit de la gravité et de la complexité de la situation, les questions humanitaires mobilisent nos efforts. Nous ne laissons pas de répit à nos partenaires et aux ONG nationales et internationales pour offrir l’aide d’urgence et les services appropriés aux personnes déplacées. Nous suivons aussi de près la situation des réfugiés centrafricains à l’extérieur. Le Gouvernement apporte aussi dans la mesure de ses moyens son aide financière directe.
Centrafricains,
Centrafricaines,
La transition n’a pas vocation à durer. Il n’y a pas une autre voie viable que celle qui consiste à ramener le pays à l’ordre constitutionnelle. Tous nos efforts jusqu’ici ne sont mus que par ce but ultime. Plus de deux millions d’électeurs se sont inscrits sur les listes électorales, démontant ainsi leur volonté d’aller aux élections. Le processus en cours avance bien. Ainsi, la liste électorale provisoire est en train d’être confectionnée. Les matériels électoraux dans l’ensemble sont en voie de colisage pour le déploiement dans les provinces. L’ANE a engagé le dialogue avec les forces vives de la Nation pour la validation du nouveau calendrier électoral qui sera publié dans les meilleurs délais après ces consultations. Par conséquent, je peux vous affirmer que nous sommes sur la bonne voie pour organiser le referendum constitutionnel et le 1er tour du scrutin présidentiel et législatif avant le 30 décembre 2015. Vous avez compris que la toile de fond de ce désordre organisé et de ces tentatives de déstabilisation, ce sont les élections qui inquiètent certains de nos compatriotes à l’avenir incertain. Il ne faut pas les suivre mais aller résolument aux élections.
Cependant, il faut rejeter l’idée de mauvaises élections qui nous ont déjà causé beaucoup de malheur par le passé. J’ai le devoir d’organiser des élections dans un minimum de conditions de sécurité et de paix pour que ces élections soient transparentes, libres et incontestables. J’ai la responsabilité d’organiser des élections apaisées qui marquent une fin apaisée de la Transition et un retour tout aussi apaisé à l’ordre constitutionnel. Cette responsabilité, je vais l’assumer jusqu’au bout comme vous me l’avez confiée.
Je veillerai donc à ce que les dispositions de notre code électoral soient scrupuleusement respectées et que le plan de sécurisation du processus effectivement déployé pour que la liberté d’aller et venir soit garantie pendant la période électorale et que nos compatriotes qui vont exercer leur devoir citoyen ne soient jamais contraints dans leur choix.
Mes chers compatriotes,
Nous sommes désormais à quelques mois de la fin de la Transition. Je souhaite vivement que nous nous mobilisons tous pour réussir cette dernière et décisive étape de la Transition. Pour le court temps qui nous reste, toutes les forces vives doivent constituer une union sacrée autour la Transition afin de créer les conditions d’aller aux élections dans la sérénité et la paix.
J’invite donc tous les compatriotes à un sursaut national : l’avenir et le sens de l’histoire, c’est d’aller aux élections et de passer la main. Mais, pour réussir cette mission, nous avons besoin, comme par le passé, d’être uni et de nous transcender, de mettre entre parenthèses nos propres intérêts et de privilégier le pays. Car c’est l’affaire de tous les Centrafricains sans exception. Chaque centrafricain doit y prendre sa part car la Centrafrique a besoin de nous tous.
Aujourd’hui, il nous appartient à nous, filles et fils de Centrafrique, de nous mobiliser ensemble pour empêcher un nouveau cycle d’atrocités instrumentalisé par des forces occultes. L’heure est grave. Restons unis et comme un seul homme, barrons la route aux ennemis de notre Nation.
A tous mes compatriotes, hommes, femmes et jeunes, je demande la vigilance. Je demande aux autorités locales que sont les maires et chefs de quartiers ainsi qu’aux jeunes et aux femmes d’organiser et de renforcer les comités de surveillance dans leurs arrondissements respectifs pour une sécurité de proximité et afin d’aider les forces nationales et internationales à débusquer les auteurs des troubles qui prennent aujourd’hui les populations en otage, notamment dans le 3ème Arrondissement de Bangui.
Nous devons opter pour l’apaisement, la sérénité et la paix sans lesquelles on ne peut rien construire.
Ensemble, mobilisons-nous donc pour arrêter les violences et aller aux élections dans la paix.
Vive l’unité nationale
Que Dieu bénisse notre chère patrie la République Centrafricaine.