Dévoilé enfin au grand public par Alexandre N’Guendet, le président du Conseil National de Transition (CNT), voici ci dessous, le texte intégral de ce projet Constitutionnel mis au point par les “Conseillers” du C.N.T.
Pour le lire en bas, faire dérouler en usant des flèches : déroulant
Observations :
De prime abord, il est long trop long. 25 pages pour 126 articles, du fait des redondances et des délayages inutiles.
En analysant les textes de la Constitution d’un pays- dans la mesure ou ils sont respectés – il est aisé de se former une idée de la manière dont ce pays est dirigé.
Une Constitution est dite “La Loi des Lois”, mais c’est avant tout un document très politique et sensible.
Pour cela qu’en Afrique noire, elle n’est pratiquement pas respectée, ce qui clos le débat sur ce “papier des blancs” histoire de ne pas trop en faire inutilement.
Malheureusement, depuis leurs indépendances, les pays francophones ont tous pris l’habitude de reproduire artificiellement les textes de la Constitution française, tout comme les différents autres livres de Droit (fiscal, pénal, etc..) qui pourtant leur sont exogènes.
PHILOSOPHIE DU PRESENT PROJET DE CONSTITUTION
Globalement, Nous voilà revenus en France à la IIIème République, avec un fort pouvoir de contrôle accordé au Parlement, au détriment du Président de la République, qui si ce texte est adopté, devra pour pratiquement chacun de ses actes, consulter, en référer, les soumettre au Parlement. Le chef de l’Etat ici est corseté de toutes parts par l’Assemblée nationale.
Mais dans l’exercice in vivo, il est évident que de telles textes ne peuvent qu’à court termes mener à la paralysie des Institutions.
On sait comment a fini la 3ème République ou “République des parlementaires” en France, dans la chienlit (pagaille) !
UN FOURRE TOUT SOUVENT CONTRADICTOIRE
Si on abonde souvent dans le lyrisme inutilement, parfois les essentiels techniques sont oubliés, à l’exemple des modalités des différentes élections.
Comment élit-on ? Par suffrage universel, c’est dit, mais comment, avec ou sans proportionnelle ? Ceci n’est pas préciser. Pourtant cela, puissamment affecterait beaucoup de choses.
Quel sera le nombre des députés ? Le texte ne le dit pas.
Ce projet constitutionnel alourdit à loisir les institutions, en en créant un certain nombre, et des inutiles, comme l’idée saugrenue de mise en place d’un Sénat. Usine à gaz sans rôle défini ni nécessité.
Par ailleurs question terre à terre, qui va financer tout ça ? Entre les Députés, les Sénateurs, les Conseillers etc… où trouvera t-on l’argent pour payer toutes ces gens ?
L’Etat peine déjà à honorer son devoir minimal de paiement des salaires des fonctionnaires.
En bref, il faudrait être fou pour avaliser un tel texte !!
DANS LE DETAIL
– Un préambule très long et répétitif, qui aurait mérité la concision et éviter les redites sans intérêt.
– Les 5 premiers articles sont justement pratiquement des redites du préambule.
– Dans l’article 5 “La loi garantit à l’homme et à la femme des droits égaux dans tous les domaines.” Ce qui est faux, en Centrafrique les hommes et les femmes ne sont pas égaux. La polygynie (polygamie) y est légale, mariage d’un homme avec plusieurs femmes; tandis que la polyandrie est illégale – mariage d’une femme avec plusieurs hommes. Si les hommes et les femmes sont égaux, dans la mesure ou la polygynie est permise, point que n’aborde pas le texte de projet, la polyandrie devrait y être évoquée. Plus sérieusement, la Constitution ne doit considérer que la monogamie, pour être en conformité avec le principe de l’égalité des sexes.
– Article 6 “Le mariage est l’union entre un homme et une femme” ce qui exclut toute aventure dans les mariages homosexuels.
– Art. 16 : Une nouveauté ! “Le service militaire est obligatoire”, mais sous quelles conditions ? Pour quelle durée ? Cela n’est pas précisé.
– Art. 18 : “La forme de l’Etat est la République. L’Etat Centrafricain a pour nom : REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE.” Ceci est incomplet et nuisible à l’international en ne gardant comme nom officiel qu’uniquement République Centrafrique. Car les noms plus court et plus malléables de “La Centrafrique“, “Le Centrafrique” (dénomination donnée par B. Boganda lui-même en 1958), et Centrafrique en Sangö “Bè-Afrika” mériteraient d’y être inclus.
– Dans ce même article 18 : “La République Centrafricaine est un Etat de droit, souverain, indivisible, laïc et démocratique.” Ceci précise bien que le pays est laïc et non une république religieuse. Dès lors, faire jurer dans l’article 26 le président élu lors de sa prestation de serment devant Dieu, est incompatible avec le principe même de la laïcité. Un chef d’état en pays laïc ne jure pas devant Dieu, car la foi est affaire privée. Les politiciens centrafricains ont pris le sale travers de toujours mélanger les genres. Cela est encore sanctifié là par cette contradiction.
– Art. 24 : “Le Président de la république est élu au suffrage universel direct et au scrutin secret, majoritaire à deux (2) tours. La durée du mandat du Président de la République est de cinq (5) ans. Le mandat est renouvelable une seule fois. En aucun cas, le Président de la République ne peut exercer plus de deux (2) mandats consécutifs ou le proroger pour quelque motif que ce soit. Ne peuvent être candidats à l’élection présidentielle que les hommes et les femmes remplissant les conditions suivantes….” Doublon !
– Art. 29 : Contenant une aberration : “Lorsque les circonstances l’exigent, le Président de la République peut soumettre au référendum, après avis du Conseil des Ministres, celui du Bureau de l’Assemblée Nationale, celui du Bureau du Sénat et celui du Président de la Cour Constitutionnelle, tout projet de loi ou, avant sa promulgation, toute loi déjà votée par le Parlement. Le texte adopté par le peuple à l’issue du référendum est promulgué dans un délai de quinze (15) jours.” Un referendum sur initiative du président, mais après avis notamment du Bureau de l’Assemblée Nationale, tout en sachant que ce serait pour contester un texte de loi voté déjà par l’Assemblée Nationale ? A moins d’être des idiots finis et des schizophrènes, les députés ne peuvent pas se déjuger après un vote, et surtout eux les élus du peuple, accepteraient un referendum soumis à ceux dont ils sont les représentants. C’est se nier soi-même. Ceci est totalement absurde !
– Art. 33 : “Le Président de la République communique avec le Parlement, soit directement, soit par message qu’il fait lire.” C’est flou; que signifie communiquer avec le parlement directement ? Doit-il se rendre à l’assemblée pour s’exprimer devant les députés ?
– Art. 34 : “Le Président de la République peut après consultation du Conseil des Ministres, du Bureau de l’Assemblée Nationale, du Bureau du Sénat et du Président de la Cour Constitutionnelle, prononcer la dissolution du Parlement.” Le président a besoin de consulter le Bureau de l’Assemblée Nationale avant de la dissoudre ? C’est du n’importe quoi ! Et si le Bureau de l’Assemblée Nationale refuse de se tirer une balle dans le pied ? et “En cas de dissolution du Parlement, le Président de la République ne peut légiférer. “ Ah oui, dans ce cas, il fait comment ?
– Art. 41 : “Le Premier Ministre……. Il peut être mis fin, à tout moment, aux fonctions du Premier Ministre par le Président de la République ou à la suite d’une motion de censure adoptée à la majorité absolue des membres composant l’Assemblée Nationale.” Situation pouvant être cocasse, avec un Premier ministre débarqué par une motion de censure et un gouvernement toujours en place. Cet article est aberrant !
– Art. 49 : Une nouveauté ! “le Gouvernement a l’obligation de recueillir l’autorisation de l’Assemblée Nationale avant la signature de tout contrat relatif aux ressources naturelles.” Aucune chance que ceci fonctionne, cela retarderait de par trop, voire ferait capoter la conclusion du dit contrat. Le contrôle du parlement ne peut être qu’à posteriori.
– Art. 51 : “Lorsque l’Assemblée Nationale adopte une motion de censure ou lorsqu’elle désapprouve le programme ou une déclaration de politique générale du Gouvernement, le Premier Ministre doit remettre, sans délai, au Président de la République, la démission de son Gouvernement.” C’est flou, qu’entend-on par désapprouver le programme ou une déclaration de politique générale du Gouvernement ?
– Art. 52 : “Le pouvoir législatif est exercé par un Parlement qui comprend deux (2) chambres : – lʼAssemblée Nationale ; – le Sénat. Le Parlement légifère et contrôle lʼaction du Gouvernement.” Et le dit Sénat lui fait quoi ?
– Art. 55 : “Le peuple centrafricain élit, au suffrage universel direct pour un mandat de cinq (5) ans, des citoyens qui constituent l’Assemblée Nationale et qui portent le titre de DEPUTE.” Suffrage universel direct soit, mais à un tour ? Deux ? A la proportionnelle ? Article manquant de précision pour un point aussi capital.
– Art. 59 : La cerise sur le gâteau “Les représentants élus des collectivités territoriales élisent, au suffrage universel indirect pour une durée de cinq (05) ans des citoyens qui constituent le SENAT et qui portent le titre de SENATEUR.” Une véritable usine à gaz inventée par le CNT, sans doute la trouvaille la plus crétine de ces textes. Un sénat, pourquoi faire à part alourdir les charges financières de l’Etat qui est dépourvu de moyens. Et qui sont ces représentants élus des collectivités territoriales ? Et de quelles collectivités territoriales parle-t’on ?
– Art. 64 : Nouveauté ! “Le Parlement est seule à autoriser la déclaration de guerre. Elle se réunit spécialement à cet effet. Le Président de la République en informe la Nation par un message.” Ce qui court-circuite le pouvoir du Président de la République en tant que chef suprême des armées et garant de la défense nationale (article 22). Soit il est le chef suprême des armées, donc pouvant déclencher seul une guerre s’il la juge nécessaire, soit il ne l’est pas, c’est contradictoire.
– Art. 72 : Cet article n’est qu’un copier-coller ou presque du jeu français entre le Sénat et le Parlement. Les modifications apportées ici démontrent bien l’inutilité d’un Sénat, et alourdissent inutilement le processus législatif. D’autant plus que ce projet de Constitution ne justifie nulle part la nécessité d’un Sénat en Centrafrique.
– Art. 73 : ” Le Président de la République promulgue les lois adoptées par le Parlement dans un délai de quinze (15) jours” Article redondant, faisant doublon avec l’article 28.
– Art. 80 : Nouveauté ! “La République peut, après référendum, conclure avec tout Etat Africain des accords d’association ou de fusion comprenant abandon partiel ou total de la souveraineté en vue de réaliser l’unité africaine. Elle peut créer avec tous les Etats des organismes intergouvernementaux de gestion commune, de coordination et de libre coopération.” Qu’entend-on par ‘La République” ?
– Art. 112 : Nouveauté ! “Le Conseil Economique et Social est une Assemblée consultative en matière économique, social, culturel et environnemental. Les membres du Conseil Economique et Social portent le titre de Conseiller.” Une nouvelle trouvaille au domaine si vaste qu’il pourrait se mêler de tout en semant la confusion avec les différents ministères de chaque domaine.
– Art. 114 : “Les Collectivités Territoriales de la République Centrafricaine sont les régions et les communes. Elles ne peuvent être créées et modifiées que par la loi. D’autres catégories de Collectivités Territoriales peuvent être créées par la loi. Les Collectivités territoriales s’administrent librement par des organes élus. Une loi organique détermine les modalités d’application de la présente disposition.” Le flou artistique complet. “Les Collectivités Territoriales de la République Centrafricaine sont les régions et les communes”, On réinvente l’eau chaude, ça ne veut rien dire.