Il y a deux jours, des miliciens antibalaka [groupe d'autodéfense chrétien] ont perpétré des violences dans la capitale. Bilan : quatre morts. Hier, six miliciens antibalaka ont été tués. Accusée de laxisme, la présidente de transition est sur la sellette.
Contrairement à ce que semble penser la présidente de la transition en République centrafricaine, ses négociations avec une frange de la milice [chrétienne] des antibalaka ne suffisent pas à faire revenir la quiétude dans la capitale, Bangui. Versant, de plus en plus, dans le banditisme le plus ordinaire, les miliciens à dominante chrétienne, prenant goût aux prébendes qu'ils prélèvent sur les pauvres citoyens au niveau de leurs innombrables barrages, n'entendent visiblement pas honorer leur engagement de les enlever. Au risque d'entrer en guerre contre les forces armées régulières.
Chantages
Si Catherine Samba-Panza comptait sur la stratégie de la main tendue pour faire entendre raison aux antibalaka, elle s'est quelque peu trompée. Dans le meilleur des cas, elle ne peut en tirer que sa propre fragilisation, à travers la perversion de son autorité. Le 10 octobre, en rencontrant les responsables des antibalaka, elle a donné l’image d’une responsable prête à renoncer à toutes les convictions pour conserver son fauteuil. C’est ainsi qu’elle avait promis d’examiner favorablement les requêtes de la milice chrétienne.
Ces requêtes elles-mêmes allant de la libération de détenus à l’entrée de cadres de la rébellion au sein du Conseil national de transition (CNT), en passant par la nomination de certains d’entre eux à des postes de responsabilité au sein même de l’administration centrafricaine ou à la présidence de la République. Toutes ces concessions, les miliciens les ont obtenues en contrepartie de leur menace de faire partir Catherine Samba-Panza.
Engagements non tenus
Or, en retour, ils ne paraissent pas disposés à honorer leur part du contrat. Alors qu’ils avaient promis de faire en sorte que la capitale centrafricaine soit débarrassée des barrages qu’ils y ont érigés pour rançonner la population, ils s’y sont catégoriquement refusés. Au point où les forces armées centrafricaines (Faca) ont été obligées d’intervenir.
Ne voulant pas renoncer à cette activité plutôt lucrative, les rebelles ont opposé une farouche résistance, notamment dans les quartiers sud de Bangui. Et, quand ils ont senti qu’ils ne pouvaient pas tenir devant l’adversaire, ils se sont tournés vers les populations des quartiers environnants et ils ont littéralement pillé les maisons. Avec de graves violences infligées à certains des habitants, femmes, enfants et personnes âgées compris.
Eléments incontrôlés
Au niveau du commandement des antibalaka, on attribue ces violences à une frange incontrôlée du groupe ou à des éléments qui ne partageraient pas l’approche du dialogue avec le régime en place. Mais c’est à se demander si tout cela ne participe pas d'une savante mise en scène destinée à replonger le pays dans le chaos ? La suspicion est d’autant plus permise que des musulmans centrafricains, à leur tour, commencent à s’élever contre la détention de personnes qui leur sont proches.
Catherine Samba-Panza ayant démontré qu’elle est vulnérable à l’intimidation, elle ne risque plus de demeurer tranquille. Réalisant que le langage de la force est plus audible, tous les groupes armés devraient désormais s’en servir pour se faire comprendre. Ce qui retournerait naturellement le pays dans le cycle des violences inouïes que l’on croyait pourtant révolu.
Guinée Conakry Info
| Boubacar Sanso Barry