Les élections dont la campagne a démarré le 12 décembre constituent une porte de sortie pour la RCA. A travers elles j’espère que l’Etat de droit, la démocratie, la cohésion sociale et la paix vont s’installer enfin pour que les douleurs et les souffrances endurées par le peuple puissent s’estomper et c’est vivement souhaité.
Plusieurs candidats se sont présentés à la présidentielle comme aux législatives et cela augure de la volonté des centrafricains de finir avec le désordre et d’aller vers la paix et le développement. Mais ce qui me chagrine c’est le rôle de certains concitoyens qui pensent que sans eux, il n’y aura pas la paix en Centrafrique. S’ils estiment que c’est par ce chemin qu’ils accèderont au pouvoir, ils se trompent. Le peuple est aujourd’hui aguerri. Nanti des expériences accumulées durant des années de crises, il a le regard tourné vers l’étoile de papa Boganda qui doit dorénavant éclairer son sentier. Fini les tergiversations et les manipulations des esprits malins qui, depuis des années, ont pensé que le centrafricain doit demeurer continuellement sous leur emprise. Se cachant derrière des discours ethinicistes, tribalistes et haineux ils ont suffisamment divisé, exploité et ruiné la république. Ils pensent revenir aux affaires pour continuer leurs sales besognes. Je pense et suis convaincu qu’ils n’y arriveront pas. Même si une partie des centrafricains est prise en otage, empêchée de s’exprimer, il y’a d’autres concitoyens qui vont parler à leur place à partir des zones libres. Demain ils nous rejoindront quand les fossoyeurs de la république seront lassés et mis à nu devant l’histoire.
Mais en fait, je me suis tout le temps poser la question de savoir qui parmi tous ces candidats qui claironnent en arpentant les ruelles de Bangui depuis le lancement de la campagne peut amener la paix parmi. Ils sont trente. Parmi ceux-ci je vois un seul qui se détache et risque de passer sans encombre. Il s’agit de Martin Ziguélé. Je vais dire pourquoi.
Martin ZIGUELE un homme que j’ai détesté simplement pour des convictions qu’on m’a inculquées quand j’étais jeune étudiante. Après l’obtention de mon bac en 1996, mes parents m’ont envoyée à Lomé au Togo pour mes études supérieures. Avant mon départ ils m’ont donné des strictes consignes. Ne jamais faire confiance aux « nordistes » parce qu’ils sont très méchants. Pour mon malheur, cette première sortie à l’extérieur a coïncidé avec les temps forts des mutineries où la haine s’est installée dans les cœurs des parties en conflit. Les préjugés et la méfiance étaient à leur paroxysme et je ne pouvais que me soumettre aux conseils de mes parents. Arrivée à Lomé, je fis la connaissance d’une amie proche de la région d’origine de mes parents avec qui on a partagé le même lit en attendant de trouver ma petite chambre. Celui-ci m’invita un jour à une cérémonie organisée par la colonie centrafricaine chez M. Ziguélé, un compatriote, cadre d’une compagnie d’assurance de la place. Me référant aux conseils de mes parents je lui ai posé la question de savoir de quelle région est ce monsieur. Mon amie me répondit qu’elle ne savait pas trop bien, mais il parait qu’il est du nord. J’ai décliné l’invitation. Après son retour elle m’a raconté comment les compatriotes avec qui elle était partie ont été reçus. Au fil du temps, la vie estudiantine devenait de plus en dure, je ne pouvais plus me fier aux consignes de mes parents. Je finis par accepter une seconde invitation à l’occasion de la fête du 1er mai où Ziguélé avait offert un repas aux étudiants. En nous présentant un à un, dès que j’ai prononcé mon nom, il me demanda : « es-tu la fille de… ». J’eus hésité un instant avant de répondre « oui ». Il me dit : « je connais très bien ton père qui était mon condisciple au lycée d’Etat des Rapides et avec qui je partageais le chicouange au bakpa qu’il adorait bien ».
C’était vrai qu’à l’époque il n’y avait pas les divisions que nous connaissons aujourd’hui. A la fin de la cérémonie, il m’a demandé de ne pas hésiter à venir vers lui en cas de besoin. C’est ainsi que, de temps en temps, je venais avec mes amis chez ce monsieur qui nous aidait et nous prodiguait des conseils, toujours jovial et fraternel. Mes préjugés ont fini par s’estomper et j’ai fini par nouer des relations avec tout le monde sans distinction de région, d’ethnie ou de parti politique. Ces préjugés étaient, si je comprenais bien, une construction de mes parents et l’ensemble de ceux qui ont développé la haine et les rancœurs uniquement pour des raisons politiques et politiciennes.
Je n’eus pas le temps de mieux échanger avec M. ZIGUELE quand celui-ci, fut nommé 1er Ministre et a quitté Lomé pour ses nouvelles fonctions. Et moi, deux ans après, j’ai pris le chemin de la France pour le reste de mes études. Malgré la distance, je n’ai cessé de demander de ses nouvelles parce que je connais ses convictions et l’amour qu’il a pour sa patrie. Il aimait la jeunesse et je pense qu’il garde encore les mêmes convictions. Je garde de très bons souvenirs de lui car c’est un unificateur et à la limite, l’homme providentiel pour la République centrafricaine.
C’est pourquoi, je demande à mes sœurs centrafricaines de casser les barrières érigées par les préjugés et d’aller voter massivement pour Martin Ziguélé pour un Centrafrique uni et prospère.
Eléonore TITIKAR.