Le scrutin du referendum constitutionnel en Centrafrique a été exceptionnellement prolongé lundi dans le quartier musulman de Bangui en raison des violences qui ont perturbé les élections dimanche et souligné la menace pesant sur les élections générales prévues le 27 décembre.
En province, des "dérogations de prolongation" du scrutin ont également été accordées dans des localités où les électeurs n’ont pu voter normalement dimanche, du fait d’intimidations ou de la destruction de matériel électoral par des hommes armés hostiles au scrutin, a indiqué l’Autorité nationale des élections (ANE), sans fournir de liste des localités concernées.
A Bangui, un imposant dispositif militaire des forces internationales (Casques bleus et soldats français de Sangaris) était en place autour du quartier du PK5 dès le début de la matinée, notamment aux abords du bureau de vote de l’école Baya Dombia visé dimanche par des tirs de mitrailleuse et de lance-roquette.
Le quartier était également survolé par un hélicoptère de la force Sangaris.
Ces tirs ont fait cinq morts et une vingtaine de blessés, dont plusieurs dans un état très grave, selon un nouveau bilan établi lundi matin par la Croix-Rouge centrafricaine.
Les électeurs étaient nombreux à se presser pour voter, alors qu’aucune nouvelle violence n’avait été signalée à la mi-journée dans la capitale centrafricaine.
Débat au Conseil de sécurité -
Selon l’ANE, dans les bureaux où le scrutin s’est déroulé normalement, le dépouillement a débuté dès dimanche soir.Mais aucun résultat n’était disponible lundi en début d’après-midi.
Le référendum vise l’adoption d’une nouvelle Constitution et constitue également un test avant les élections présidentielle et législatives prévues le 27 décembre, sous pression de la communauté internationale.
La participation au scrutin a divisé l’ex-rébellion musulmane Séléka et les rangs des milices chrétiennes anti-balaka, où des factions opposées au processus électoral ont tenté de dissuader la population de participer au vote.
En province également, plusieurs incidents ont été signalés dimanche, surtout dans le Nord et l’Est, selon une source anonyme au sein de la Minusca.
A Ndele, Birao et Kaga Bandoro, fiefs de la faction Séléka de Nourredine Adam, les habitants intimidés par des tirs et des menaces ne se sont pratiquement pas rendus dans les bureaux de vote. De même à Bossangoa, fief anti-balaka dans l’ouest, des tirs ont dissuadé les gens de voter.
Dès dimanche soir, le représentant des Nations unies à Bangui, Parfait Onanga-Anyanga, avait salué le "courage" des Centrafricains "qui ont bravé toutes les peurs et les menaces" pour aller voter malgré les violences.
"Les Centrafricains ont marqué un pas historique dans leur marche vers plus de démocratie dans leur pays", a déclaré à des journalistes le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies : "C’est le courage, la détermination des Centrafricains aujourd’hui, qui ont bravé toutes les peurs et les menaces (...), qui, je crois, restera la marque forte du vote référendaire".
Le représentant spécial a réaffirmé la "volonté" de l’ONU "de mettre un terme aux agissements de ces saboteurs", en référence aux ex-rebelles Séléka et aux miliciens anti-balaka.
Le Conseil de sécurité de l’ONU devait débattre lundi de la situation en Centrafrique après le vote de dimanche.
Les échéances électorales, repoussées plusieurs fois dans ce pays dévasté par trois années de violences intercommunautaires, sont censées clore une transition politique à bout de souffle et permettre un retour à l’ordre constitutionnel.
La Centrafrique, un des pays les plus pauvres au monde, est plongée dans le chaos depuis le renversement du président François Bozizé en mars 2013 par l’ex-rébellion Séléka, elle-même finalement chassée du pouvoir par une intervention internationale début 2014.