Lorsqu’on se dit favori à la présidentielle d’un pays meurtri dont le peuple est dans l’attente d’un vrai changement, l’on doit réfléchir murement avant de poser un acte, même si ceci va dans le sens du rassemblement. A mesure que le temps s’écoule la chance de voir l’ancien président François Bozizé et ses anciens hommes de mains d’entrer dans le cercle des grands hommes s’amenuise. Après la signature du bradage de son parti le KNK à l’URCA de Dologuélé, l’homme d’affaires controversé, ex chef autoproclamé des Balaka, ancien homme de mains de Cathérine Samba-Panza, ancien ministre de Bozizé et candidat écarté à la présidentielle de 2015 pour dossier judiciaire lourd, M.Patrice Edouard Ngaïssiona a scellé hier matin un accord politique avec Martin Ziguélé, président du MLPC.
Justifiant cette union par le fait que le candidat du MLPC est le seul à avoir un bon plan d’action pour le DDR dans son projet de société, les ex Balaka affirment également exécuter le vœu du pape François de voir une RCA unie dans la paix et la concorde.
Là où le bât blesse c’est que cet accord ressemble plus à une manière pour les deux ex ennemis de se protéger mutuellement à l’issue de ces élections, plutôt qu’un acte qui vise l’intérêt des centrafricains qui aspirent à un véritable changement.
Grâce à cet accord, Ngaïssiona qui est poursuivi par la justice pour des crimes économiques et pour des actes de barbares commis par les Balaka, espère un acquittement si Ziguélé était élu président de la république. En cas d’entente mutuelle entre ses deux nouveaux amis, Ngaïssiona pourrait reprendre ses affaires louches qui sont toujours liées à L’État centrafricain .Celles-ci lui permettaient de toucher des centaines de millions du trésor public vers la fin de règne de Patassé et durant tout le magistère de Bozizé. Cette union permettra également à Ngaïssiona de tenir ses troupes et notamment quelques jeunes brigands de Boyrabé, pour permettre à Ziguélé d’avoir une main mise sur ce quartier réputé très difficile.
Notons que Ngaïssiona n’est pas à son premier coup d’essai. Il a trahi Bozizé et les Balaka à plusieurs reprises durant cette transition de la honte. Pour prévenir un dérapage des boyrabéssois et des victimes de la Séléka qui n’étaient pas prêts d’accepter un premier ministre issu des rangs de ce nébuleux groupe armé, CSP avait fait appel à son expertise moyennant espèces sonnantes et trébuchantes. Résultat : Ngaïssiona avait pris position vaille que vaille pour la nomination de Kamoun au détriment de Karim Meckassoua qui avait pourtant le meilleur profil. La pilule passa et aucune grogne n’avait été observée par les balaka après la nomination de Kamoun comme premier ministre.
Autres faits de trahison, invités à Naïrobi par le médiateur Sassou Nguesso, président du Congo, Ngaïssiona et son brave Lieutenant Sébastien Wénézoui ont refusé cette offre et ont présenté leurs billets d’avion à Cathérine Samba-Panza et au « gouverneur » de la RCA, M. Charles Malinas. Les deux chefs traîtres s’en sont sortis avec des millions et cet « acte de bravoure» a été récompensé par une villégiature d’été de Wénézoui en France en compagnie de son ami l’ambassadeur Malinas. Et cerise sur le gâteau, ce dernier sera nommé ministre de l’Environnement deux semaines après son retour.
Selon des informations dignes cette opération de la honte a été initiée par certains diplomates des puissances invisibles qui veulent continuer à piller la RCA. L’objectif de cette union serait de préparer Ngaïssiona et ses soudards à accepter la victoire de MZ à la présidentielle.
A noter qu’il n’y a pas assez des troupes derrière Ngaïssiona et Wénézoui. Le groupe des Balaka le mieux structuré et qui a plus d’éléments est celui qui est dirigé par le commandant Mokom réputé très proche de Bozizé. Les évènements du 26 septembre 2015 avaient pourtant mis à nu la stratégie de la division des Balaka perpetrée par Cathérine Samba-Panza. Que deviendra la RCA si les Balaka de Bozizé rejoignaient Dologuélé comme le souhaite leur mentor? Ziguélé qui passe son temps à se défendre contre des accusations parfois infondées était – il obligé de pactiser avec un groupe armé controversé et remettre sur la table une autre confusion?
Et si cet accord n’était une autre chose qu’une esquisse de la politique colonialiste qui consiste à diviser pour mieux régner? En attendant d’avoir les réponses à nos questions, nous sommes bien en Centrafrique, le pays de tous les paradoxes.
Wilfried Maurice SEBIRO