Seul le Cameroun renouera avec l’élection présidentielle en 2018, à la fin du mandat actuel du Sphinx de Sangmélima, Paul Biya. Dans une Afrique centrale en proie aux coups d’Etat électoraux, avec des chefs d’Etat qui aiment à s’incruster au pouvoir, les populations qui rêvent d’alternance au sommet de l’Etat vont-elles encore devoir se mettre dans la rue pour y parvenir ?
Après la République Centrafricaine qui organise le scrutin présidentiel ce 30 décembre, et pour lequel 30 personnalités se sont portées candidates, les autres Etats membres de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), à l’exception du Cameroun, tiendront leurs élections présidentielles en 2016.
Premier de cordée, le Congo de Sassou Nguesso se rendra aux urnes à la deuxième quinzaine de mars prochain. Le chef de l’Etat sortant va solliciter un nouveau mandat. Depuis l’adoption de la nouvelle Constitution par referendum le 25 octobre dernier, la durée du mandat présidentiel a été ramenée à cinq (5) ans au lieu de sept (7), et il est renouvelable deux fois. En clair, un chef d’Etat peut rester au pouvoir pendant quinze (15) ans au Congo-Brazzaville. Denis Sassou Nguesso devrait affronter Mathias Dzon, Clément Miérassa et Alain Okombi Salissa, les chefs de file de l’opposition, voire Parfait Kolelas ou Jean-Marie Michel Mokoko.
Au Tchad, qui va affronter Idriss Déby Itno en avril ? Au pouvoir depuis un quart de siècle, précisément depuis décembre 1990, le chef de l’Etat actuel devrait voir s’opposer à lui Kaleh Kebzabo, journaliste et ancien ministre, et Ngarléjy Yorongar. Malgré une santé quelque peu chancelante, Déby Itno qui a séjourné à l’hôpital américain de Neuilly début-novembre dernier, va sans aucun doute aller encore une fois à la «bataille» pour se maintenir. Son bilan plaide-t-il pour lui ? Ses adversaires pensent que non.
Les 800.000 électeurs gabonais iront, quant à eux, choisir leur président au mois d’août. Ali Bongo sera à n’en point douter candidat à sa succession. Pour l’hebdomadaire Jeune Afrique si proche du Palais du bord de mer, «Ali Bongo Ondimba va compter, comme en 2009, sur l’appareil d’Etat (Ministère de l’Intérieur, CENAP, Cour constitutionnelle – ndlr) légué par son père pour être élu. Son atout, c’est qu’il n’y aura qu’un tour (…). Son handicap, c’est que les défections se multiplient dans son propre parti. Si l’opposition est divisée, comme c’est pour l’instant le cas, il repassera sans doute. Si l’un de ses opposants -l’ex-Président de la Commission de l’Union africaine Jean Ping par exemple- parvient à rassembler derrière lui les déçus et les victimes de la crise pétrolière, le Président sortant aura beaucoup plus de mal à l’emporter». L’appareil d’Etat au Gabon, toujours soupçonné de partialité… L’actuel chef de l’Etat gabonais aura-t-il la prime du sortant ou sera-t-il littéralement balayé par les urnes dans un pays où une haine populaire sourde s’est accumulée contre les tenants du pouvoir ?
Quant aux Equato-Guinéens, ils se rendront aux urnes au mois de novembre. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo va de toute évidence solliciter un nouveau mandat. Au pouvoir depuis 1979, «l’Emir de Malabo» qui a un bon bilan économique et social, mais dont la gouvernance politique et démocratique est contestée par son opposition interne et externe, ne devrait pas manquer d’adversaire d’envergure au cours de ce scrutin. Severo Moto Nsa, par exemple, exilé en Espagne depuis trente ans, ayant été autorisé à regagner le pays.
Que vont réserver tous ces scrutins dans une zone – l’Afrique Centrale – où les populations rêvent infiniment d’alternance, mais où les chefs d’Etat aiment à s’accrocher au pouvoir ? Une région qui détient toujours les records de longévité au pouvoir (Omar Bongo du Gabon 42 ans à la tête de son pays, remplacé par son fils Ali Bongo, 7 ans, soit un demi-siècle au pouvoir, Obiang Nguema 36 ans de pouvoir, Paul Biya 33 ans, Sassou Nguesso 31 ans, Idriss Déby 25 ans…) Si l’alternance est certaine en Centrafrique en raison notamment d’une transition dont il faut sortir, qu’en sera-t-il des autres pays ? Le résultat sorti des urnes sera-t-il annoncé ? Beaucoup d’observateurs se posent ces questions sans être sûrs de rien, car les «appareils d’Etat» ne se sont pas toujours montrés impartiaux lors des scrutins précédents.