La justice française enquête sur de nouvelles accusations de viols portées contre des soldats de la force française Sangaris, par une soeur et un frère centrafricains de 7 et 9 ans, a-t-on appris lundi de source judiciaire.
Des investigations sont déjà menées par les gendarmes français, sur d’autres allégations, portées par des mineurs et susceptibles de concerner quatorze soldats français.
Mais vendredi, le parquet de Paris a étendu pour "viols sur mineurs de (moins de) 15 ans par personnes abusant de l’autorité conférée par leurs fonctions et complicité de ces viols" cette enquête.
Une extension consécutive aux nouvelles déclarations de deux enfants recueillies et révélées fin janvier par l’ONU.Elles font état de fellations sur des militaires non identifiés, selon une source proche du dossier.Des viols qui auraient été commis en échange d’eau et de biscuits, selon le récit de l’ONU.
Ces faits se seraient produits en 2014, et auraient également pour théâtre le camp de M’Poko, près de l’aéroport de Bangui.Selon les propos des deux enfants, d’autres enfants auraient été abusés de la même manière lors d’incidents répétés impliquant plusieurs soldats français.
A la suite de ces témoignages, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian avait saisi la justice, dans un contexte de lourds soupçons sur les militaires intervenus en Centrafrique, objets de plusieurs scandales.
Dans le premier volet de l’enquête, cinq soldats français de Sangaris ont été entendus en décembre, sans être mis en examen.
Ils ont indiqué avoir donné des rations alimentaires à des enfants mais ont réfuté avoir demandé quoi que ce soit en retour et nié tout abus sexuel, selon une source proche du dossier.
Les investigations n’ont pour l’instant pas permis de trancher ce parole contre parole. Les déclarations des enfants ont varié et le nombre de plaignants a augmenté, a par ailleurs indiqué cette source.
Les accusations de la soeur et du frère comptent parmi plusieurs affaires révélées par l’ONU qui se seraient produites en 2014 mais n’ont été découvertes que ces dernières semaines.
Une équipe de l’ONU en Centrafrique a interviewé plusieurs enfants et adolescentes ayant déclaré avoir été abusés sexuellement ou exploités par des soldats participant à une mission européenne (Eufor-RCA) ou à la mission française Sangaris.
"Problèmes massifs" -
Selon quatre de ces jeunes filles âgées de 14 à 16 ans au moment des faits présumés, leurs agresseurs appartenaient à des contingents opérant au sein de la force de l’Union européenne (Eufor-RCA).
Trois d’entre elles ont mis en cause des soldats du contingent géorgien de l’Eufor.Des soupçons pèsent également sur "un autre pays" opérant au sein de l’Eufor, mais l’ONU n’a pas souhaité en dire plus dans l’attente de "davantage de corroborations".
Environ 150 soldats géorgiens participaient à l’Eufor-RCA, forte au total de quelque 700 hommes et présente de février 2014 à mars 2015 à Bangui où elle avait pour mission de rétablir la sécurité.
Les violences sexuelles sont très répandues en Centrafrique et les forces armées "ont joué un rôle très important dans ce contexte de problèmes massifs", a relevé un porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme.
Début janvier déjà, l’ONU avait annoncé avoir ouvert une enquête sur des accusations d’abus sexuels contre des soldats de cinq pays participant à la Mission des Nations unies en RCA (Minusca).
Le 4 février, la Minusca a annoncé avoir identifié sept nouveaux cas présumés d’abus sexuels de la part de Casques bleus, dont cinq au moins concernent des jeunes filles mineures.
Enfin, une autre enquête est en cours en France après les accusations d’une jeune Centrafricaine affirmant avoir été violée à l’été 2014 par un militaire de Sangaris.