Dans un rapport publié le lundi 8 février 2016 sur la spirale de violence de septembre 2015, les Nations Unies demandent des actions urgentes contre l’impunité pour des violations graves des droits de l’homme en République centrafricaine. Le chef de la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) Parfait Onanga Anyanga, demande à tous les acteurs de soutenir le processus électoral afin d’éviter une nouvelle spirale de violence.
Ce rapport fait état de violations graves et d’abus des droits de l’homme commis lors de la reprises des violences à Bangui, la capitale centrafricaine, le 26 septembre dernier et se poursuivant jusqu’au 20 octobre dernier. Les jours qui suivirent furent marqués par des attaques et des homicides contre des civils, ainsi que par la destruction et l’incendie généralisés de maisons et de biens, parmi l’ensemble des violations des droits de l’homme commises. Ce rapport coïncide avec une période critique en République centrafricaine, soit immédiatement avant les élections présidentielle et législatives du 14 février 2016. Dans un communiqué du 10 février 2016 parvenu à notre rédaction, le Chef de la MINUSCA, aussi Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies, Parfait Onanga Anyanga demande à tous les acteurs de soutenir le processus électoral, de rejeter toutes les formes de violence et de respecter l’issue du vote. Des élections paisibles et légitimes marqueront un pas significatif vers la réconciliation, la justice et la paix durable en Centrafrique.
En compilant ce rapport, les enquêteurs de la MINUSCA ont documenté des violations des droits de l’homme, incluant les homicides de 41 civils et au moins 1 blessés, des cas de viol et d’autres formes de violences sexuelles, l’enlèvement et la détention arbitraire, le pillage, l’appropriation et la destruction de biens. Le rapport contient des extraits de récits de témoins et de victimes. De son côté, la MINUSCA a également observé la destruction et l’appropriation généralisées de biens, incluant l’incendie de plusieurs maisons et le vol de biens humanitaires, comme l’équipement médical, d’organisations intergouvernementales et ONG.
Dans les jours suivant la crise, les enquêtes furent limitées en raison de contraintes sécuritaires restreignant la liberté de circulation, et ce particulièrement dans les zones à prédominance musulmane de Bangui. Par conséquent, d’après le communiqué de la MINUSCA, le nombre réel de victimes et de violations est potentiellement beaucoup élevé que celui figurant au rapport. Alors que la majorité des violences ont été commises par les groupes armés antibalaka et ex-seleka et leurs affiliés, le rapport détaille également des violences des droits de l’homme commises par des membres des forces armées centrafricaines. La faiblesse des autorités étatiques à Bangui et leur absence à l’extérieur de Bangui laissent planer le risque que les auteurs de violations des droits de l’homme demeurent impunis. Les violations à Bangui ont également engendré une série d’incidents violents dans toute la République centrafricaine, incluant à Bambari, Kaga-Bandoro, Bouar, Carnot et Sibut.
Le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies demande aux autorités centrafricaines, aux groupes armés et à la communauté internationale de mettre en œuvre une série de recommandation afin d’éviter des violations massives des droits de l’homme à l’avenir, et de prendre des actions effectives afin de lutter contre l’impunité. Le Chef de la MINUSCA a exprimé ses inquiétudes quant à la possibilité que « les auteurs de ces violations graves bénéficient de l’impunité et demande aux autorités centrafricaines de prendre des actions effectives afin que les responsables soient traduits en justice ». Il réitère l’engagement de l’ONU à améliorer l’améliorer l’administration de la justice.
Recommandations du rapport
Ce rapport formule des recommandations incluant la priorisation de la lutte contre l’impunité pour les violations graves et abus passés et présents des droits de l’homme, la cessation des attaques contre les civils par les groupes armés, et la réforme des FACA . De surcroit, le rapport recommande la mise en œuvre des programmes robustes et efficaces de désarment, démobilisation et réinsertion (DDR) et de réduction de la violence communautaire (RVC), aussi la protection et l’assistance pour les victimes de violences sexuelles et basées sur le genre, ainsi que du support technique et financier de la communauté internationale pour la mise en place et le fonctionnement de la Cour pénale spéciale pour la République centrafricaine.
Le 30 septembre 2015, la Procureure de la Cour pénale internationale, Fatou Bensouda, a exprimé sa grande inquiétude face à l’escalade de la violence à Bangui. Madame Bensouda a averti que tous ceux commettant des crimes tombant sous la juridiction de la Cour pourraient être tenus individuellement responsables. Dans une déclaration séparée, la procureure a souligné la tenue prochaine des élections en Centrafrique , disant : « le processus de collecte de la preuve à l’encontre de toute personne incitant ou prenant part à des gestes de violence massive avant, pendant ou après les élections se poursuit. Ces gestes continuent des crimes graves, qui font parties des crimes pour lesquelles la CPI à juridiction ».
La MINUSCA va aussi partager les conclusions de ses enquêtes avec la CPI et la Cour pénale spéciale pour la RCA, qui sera mise sur pied prochainement. Par ailleurs, le Forum national de Bangui a recommandé la création d’une Cour pénale spéciale en Centrafrique pour juger les responsables de crimes commis durant le conflit dans le pays.
Bangui, Eric NGABA Pour CNC