Les électeurs centrafricains se rendaient timidement aux urnes dimanche pour élire leur futur président pour les cinq prochaines années, lors du second tour de la présidentielle tenu dans le calme et qui oppose les ex-Premiers ministres Anicet Georges Dologuelé et Faustin Archange Touadéra, arrivés en tête le 30 décembre face à 28 autres candidats.
Dans beaucoup de bureaux de vote à Bangui, la capitale du pays, ont débuté les opérations électorales après l'heure officielle de 06H00 locales (05H00 GMT) prescrite par la loi électorale centrafricaine.
La République centrafricaine (RCA) tente de tourner la page de trois ans de violences sans précédent dues à la prise du pouvoir le 24 mars 2013 à Bangui de Michel Djotodi, leader de l'ex-coalition rebelle, la Séléka, qui a renversé le régime de François Bozizé, aujourd'hui en exil à Kampala (Ouganda).
Sur une population estimée à près de 5 millions d'habitants, plus de 1,9 million d'électeurs inscrits sont enregistrés sur les listes électorales publiées par l'Autorité nationale des élections (ANE).
AUCUN INCIDENT MAJEUR
Jusqu'en mi-journée, aucun incident majeur n'est à déplorer, en dépit des accusations de planification de fraudes mutuellement exprimées par les camps des deux candidats en lice lors d'une réunion tenue la veille avec les dirigeants de l'ANE et les partenaires dans les locaux de la Commission de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) à Bangui.
Faustin Archange Touadéra, qui avait réussi à déjouer les pronostics des observateurs non avisés de la scène centrafricaine pour se classer deuxième au terme du premier tour, avec 19,05% des voix, et qui passe pour être aujourd'hui en pole position, a voté aux environs de 10h00 locales (09h00 GMT) au bureau de vote numéro 7 du lycée Barthélémy Boganda, dans le 1er arrondissement de Bangui.
"Je viens juste de voter, je suis arrivé donc dans ce centre-là, je n'ai pas encore eu des informations, mais je crois que tout se passe dans le calme. Et c'est déjà ça : les compatriotes viennent voter avec érénité et dignité", a-t-il déclaré à Xinhua à propos du déroulement du scrutin.
"Pour l'instant, rien ne présage quoi que ce soit et je ne peux qu'être serein", a-t-il ajouté, s'exprimant notamment sur les accusations de fraudes, se déclarant plutôt "serein".
"Le message, c'est que tous les compatriotes, je les invite à aller remplir le devoir citoyen, comme nous venons de le faire, a conclu l'ex-recteur de l'Université de Bangui et professeur de mathématiques pures âgé de 58 ans qui a choisi de se présenter en candidat indépendant et a mené sa campagne sur son "bilan positif" à la tête du gouvernement sous Bozizé entre 2008 et 2013.
Anicet Georges Dologuelé, grand favori des sondages au premier tour, où il s'est finalement imposé avec un score de 23,74% des voix, avoté près d'une heure plus tard au bureau de vote de l'Hôtel de ville de Bangui, entouré de son épouse.
Cet ancien Premier ministre sous feu Ange-Félix Patassé (seul chef d'Etat démocratiquement élu de l'histoire de la RCA) de 1999 à 2001, et ex-président de la Banque de développement des Etats de l'Afrique centrale (BDEAC), également âgé de 58 ans, a lui aussi balayé les appréhensions au sujet de la sincérité et de la régularité de l'élection.
"Vraiment, ce serait important qu'il y ait de l'affluence comme la première fois. Parce que la première fois quand j'étais venu voter, il y avait une longue queue. Aujourd'hui il n'y a pas de queue du tout", a-t-il cependant regretté.
Le 30 décembre, le taux de participation s'était établi à 62,57% de l'électorat. Le constat établi lors de ce second tour de la présidentielle continuait de laisser découvrir en mi-journée une résence timide des électeurs devant la plupart des bureaux de vote de la capitale centrafricaine, que ce soit dans le 1er, le 2e, le 6e ou encore le 7e arrondissement plusieurs fois visités par Xinhua.
Mais le leader de l'Union pour le renouveau centrafricain (URCA, formation créée il y a un peu plus de deux ans) a tenté d'expliquer cette tendance baissière par le fait que "la première fois, c'était un jour de semaine".
"Aujourd'hui, c'est dimanche et les Centrafricains sont très pieux. Et j'espère que d'ici 11h00-midi il y aura de l'affluence", a-t-il affirmé.
"Je ne pense pas qu'il y aura un fort taux d'abstention. Il est trop tôt pour le dire. Comme je l'ai dit, c'est parce que c'est dimanche et à partir de 11h00-midi il y aura plus de monde", a-t-il insisté.
La loi électorale fixe à dix heures la durée des opérations de vote.
Autrement dit, la clôture officielle est prévue à 16h00 locales (15h00 GMT). Mais, les bureaux de vote ayant démarré leurs activités en retard seront autorisés à aller au-delà de cette limite légale.
Comme lors des deux précédents rendez-vous, le référendum constitutionnel du 13 décembre et le premier tour de la présidentielle du 30 décembre, la sécurisation du vote est assurée par les Casques bleus de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en Centrafrique (MINUSCA), visibles avec des patrouilles motorisées et héliportées.
DEUXIEME TOUR MIEUX ORGANISE
Chef de la mission d'observation électorale de l'Union africaine (UA), l'ex-Premier ministre sénégalais Souleymane Ndéné Ndiaye, s'est félicité de ce que "le deuxième tour est mieux organisé".
"Il y a d'abord que le matériel a été mis en place bien avant, dans la plupart des centres de vote que j'ai visités. Les gens avaient démarré à 06h00 du matin, parce que le matériel était là bien avant", a-t-il dit.
"Ensuite, il me semble que le personnel des bureaux de vote aussi a connu une amélioration, parce qu'on s'est plaint de ce que les PV [procès-verbaux] étaient mal remplis, que ceux qui devaient les remplir n'avaient pas de formation ou simplement ne savaient ni lire ni écrire".
"Jusque-là il n'y a rien à signaler d'anormal. Jusque-là tout se déroule normalement", a-t-il aussi relevé.
C'est la même appréciation faite par la présidente de l'ANE, Marie Madeleine N'Kouet Hoornaert, qui a précédé de quelques minutes pour son vote Dologuelé à l'Hôtel de ville de Bangui, qui enregistrait une arrivée au compte-gouttes des électeurs, à l'instar de l'école mixte de Ngaragba, dans le 7e arrondissement, où a voté pour sa part la présidente de transition Catherine Samba-Panza.
"Déjà, je peux vous confirmer que dans l'ensemble ça se déroule très bien, sauf quelques soucis, parce que je profite ici, j'espère bien qu'il y a des radios, pour dire que on a été d'accord avec les candidats à la présidentielle et puis tous les autres candidats que ne voteront que les gens dont le nom figure sur la liste électorale", a précisé la dirigeante de l'organe électoral.
"Parce que vous savez que la Cour constitutionnelle nous a reproché le fait qu'il ait eu beaucoup de fraudes. Pour éviter ces fraudes, on ne plus venir avec un récépissé seul. Donc, c'est par rapport à ces directives-là qu'il y a quelques incidents dans certains quartiers", a-t-elle poursuivi.
C'est l'une des sources des préoccupations notamment exprimées avant le déroulement du scrutin par le camp de Dologuelé, qui a fait état de votes multiples au premier tour, favorisés selon celui-ci par l'établissement de cartes d'électeur non sécurisées, car non accompagnées d'une photo jugée utile pour permettre l'identification des électeurs.
La directive de l'ANE s'est cependant heurtée à la résistance des électeurs, qui ont fini par se faire admettre dans les bureaux de vote, sans la présentation d'une pièce d'identité exigée en plus par cette structure.
Au lycée Barthélémy Boganda, certains sont allés jusqu'à accuser les responsables des bureaux de vote de manœuvre visant à les empêcher d'exercer leur devoir citoyen.
A l'école d'excellence Centrafrique-Chine située à côté du palais présidentiel, la poignée d'électeurs arrivée tôt a dû attendre plus de trente minutes après l'heure officielle pour être admise dans les ureaux de vote, à cause de l'absence du vigile de service qui a amené leurs responsables à user de grosses pierres pour casser les portes d'accès.
"C'est l'urgence de l'Etat", s'est défendu l'un d'eux pour justifier cet acte.
Qu'il s'agisse des partisans de Dologuelé ou ceux de Touadéra, les Centrafricains attendent désormais avec impatience de connaître le nom de leur futur président qui sera connu au terme de ce scrutin dont le rincipal enjeu se résume par l'urgence d'un retour à une paix durable, la relance de l'économie nationale et la réconciliation nationale.
Pour l'heure, les sondages au sortir des urnes à Bangui sont favorables à l'ex-Premier ministre de Bozizé. Fin