Tout n’est pas réglé dans le pays, mais l’Eglise a fait comprendre que la paix valait plus que la guerre et aujourd’hui, elle tente de ramener les réfugiés chez eux.
Depuis la visite du pape François, fin novembre 2015, la situation a radicalement changé en Centrafrique. Et toutes les voix interrogées sur place au fil des mois confirment à l’unanimité : « La visite du Pape a soufflé sur le pays un bon vent d’espoir, nous laissant en héritage cette conscience que la guerre ne résout pas les problèmes », confiait à la presse le curé de la cathédrale de Bangui, Mathieu Bondobo, six mois après la visite du Saint-Père.
Après son départ, beaucoup craignaient des dérapages. Or, aujourd’hui, bien que certaines régions entières du pays soient encore « sanctuarisées » par des groupes armés non encore désarmés, a fait savoir le président Faustin-Archange Touadéra, l’Etat et l’Eglise font du retour des déplacés à leurs domiciles – 415 000 à l’intérieur du pays et 300 000 dans les pays voisins – une de leurs grandes priorités. Tout un projet d’accompagnement de ces personnes est en cours de validation avec les humanitaires, souligne VOA Afrique, le service francophone de Voice of America. La plupart des déplacés veulent rentrer chez eux, mais exigent d’abord la sécurisation complète des quartiers.
Dans le bilan de ses 100 premiers jours au pouvoir, le 10 juillet dernier, le président a promis également « une vaste opération de recensement des victimes de violences », après avoir promulgué, un mois auparavant, une loi portant création, organisation et fonctionnement d’une Cour pénale spéciale » pour juger les coupables.
L’Eglise en première ligne
Une première vague de déplacés a quitté le site du grand séminaire Saint-Marc de Bimbo au sud de Bangui, où ils étaient réfugiés depuis le déclenchement des luttes entre les milices Séléka (à majorité musulmane) et les Anti-Balakas (à majorité chrétienne), en décembre 2013 et janvier 2014. Des dizaines de personnes ont accepté volontairement de regagner leurs habitations ou de refaire leur vie ailleurs. La Caritas et la nonciature ont octroyé des appuis financiers, notamment le paiement de 3 mois de location à chaque ménage. l’archevêque de Bangui, Mgr Dieudonné Nzapalainga : « Certains ont tout perdu et sont dans le dénuement total. Le grand séminaire est un refuge. L’église n’a pas fermé ses portes. Mais c’est un début d’efforts (…) nous avons demandé à nos frères et sœurs de trouver des lieux de location ou nous allons financer trois mois de location ».
Retour progressif à la cohésion
Depuis la visite du Pape, un nouvel élan de cohésion s’est peu à peu formé entre les différentes communautés chrétiennes et musulmanes. Le 6 juillet dernier, à Bangui, musulmans et non-musulmans se sont mis ensemble pour fêter la fin du ramadan, une première après trois ans d’affrontements. Pour l’occasion, responsables politiques et religieux se sont succédé aux micros dans les différentes mosquées de la capitale pour prôner la paix entre les communautés. Un responsable de l’ONU qui se trouvait là n’en revenait pas : « Je n’avais jamais vu autant de monde se rassembler pour la grande prière de l’Aïd. C’est un signe, peut-être, que les Centrafricains ne veulent plus la guerre », a-t-il déclaré sur les antennes de RFI.
En venant en Centrafrique et ouvrant la première porte sainte du Jubilé de la miséricorde à la cathédrale de Bangui, « le Saint Père a posé un geste très fort (…) Son geste et son message ont permis de décrisper la situation sécuritaire », a reconnu le président Touadéra, lors de sa visite à Rome en avril dernier. François, a-t-il ajouté, « a contribué » à ce que le pays se trouve dans une « dynamique » d’apaisement pour ouvrir une nouvelle page, et il l’a fait « dans des conditions difficiles de sécurité », avec « courage », et » nous lui en sommes reconnaissants », a-t-il encore affirmé.