Les occasions s’accumulent pour démontrer l’amateurisme à tous les étages de la Transition. On fini par comprendre comment le processus devient pause et la pause processus de Transition. La cérémonie, ce jour 12/11/2014, dite de rentrée académique à l’université de Bangui, conjuguée avec la journée de l’université africaine, en présence de Mme Catherine Samba Panza, Présidente de la Transition, illustre la place inexistante de la production du savoir, du concept de « société de la connaissance » et de l’excellence dans la pensée de ceux qui gouvernent le Centrafrique à l’agonie.
L’organisation de cette cérémonie à laquelle le corps diplomatique accrédité à Bangui était convié a encore offert un spectacle peu luisant, voir ridicule, des autorités de la Transition et de sévères lacunes organisationnelles comme l’illustrent quelques clichés compromettants: Une agente de sécurité qui balaie le tapis rouge pendant que des invités de marque étaient installés. L’ambassadeur de France à son arrivée a du mal à éviter la surface couverte de boue où s’est déroulée la cérémonie. Les expositions sont installées dans un grand hangar officiellement appelé « Amphithéâtre Bozizé »
Dans un discours probablement sous inspiré au cours duquel elle s’est fait huée par des universitaires scandalisés, CSP a qualifié les revendications portées par le Syndicat National Autonome des Enseignants du Supérieur (SYNAES) d’agitations inopportunes. La pilule a du mal à passer lorsqu’on sait que des primes sont versées régulièrement pour la violence et la prédation budgétaire, et que la rhétorique martiale ou le discours radical comme celui-ci ne s’emploie jamais à l’adresse des seigneurs de guerre qui fustigent l’autorité de l’Etat et en face desquels le mutisme s’érige en loi!
Il faut dire que les enseignants du Supérieur réclament depuis plusieurs mois le paiement d’arriérés d’heures supplémentaires de l’année 2011-2012 dont le montant résiduel se situe autour de 300 millions. Le Gouvernement, qui doit par ailleurs 3 mois d’arriérés de salaire aux fonctionnaires, avait pris un engagement de règlement non tenu vis-à-vis du SYNAES qui ne fini pourtant jamais de faire des concessions dans les négociations, au regard de la conjoncture nationale qui affecte particulièrement les conditions d’exercice du métier de l’enseignant.
On pourrait présumer une stigmatisation programmée du SYNAES et des enseignants du supérieur au cours d’une cérémonie qui dénote davantage une brutalité politique, relevant de l’ordre ancien, en un lieu du symbole de la liberté intellectuelle : Le SYNAES n’a pas eu droit à la parole et le privilège de donner la leçon inaugurale est allé à un orateur extérieur au contexte national et académique, visiblement orienté, complexé et motivé par des préoccupations bassement subjectives l’ayant entrainé dans un exposé ennuyeux pour les étudiants et l’auditoire, sans un intérêt pédagogique réel pour tous…
La Présidente de la Transition aurait pourtant eu droit à un enseignement de niveau supérieur pour l’aider à rehausser son niveau du débat dans une Transition en perte de vitesse. Mais qui en cette période de politique d’austérité se permet le luxe d’inviter au frais du contribuable un prestataire de service qui perturbe le sacerdoce académique ?
Y avait-il meilleure occasion que cette cérémonie pour dire en toute franchise à qui doit l’entendre les difficultés auxquelles l’université de Bangui et la nation sont confrontées ? Pourtant les étudiants et les enseignants ont écouté un intervenant sérieux différer l’opportunité de parler des problèmes d’infrastructures cruelles et urgentes qui empêchent même la modernisation de l’université de Bangui : La vétusté des locaux, les services sociaux aux étudiants, la capacité d’accueil limitée, la bibliothèque sous documentée, la fracture numérique, les contraintes à la recherche, le passage au système LMD etc.
On remarque aussi que la promotion de l’excellence scientifique a aussi été différée au profit d’autres considérations : L’admission récente du Professeur Gaston N’Guérékata, mathématicien centrafricain, à l’Académie Mondiale des Sciences (TWAS) n’a même pas été évoquée, pas plus que son don d’un équipement de connexion wifi en faveur d’étudiants de l’université de Bangui. Pourtant cet évènement scientifique majeur, le 4ème pour le continent africain, a été largement commenté à l’extérieur du pays.
L’amateurisme et le manque de pragmatisme de la Présidente sont apparus dans son discours évasif et sa lecture approximative des réalités universitaires. Elle n’a proposé aucune solution aux urgences socio universitaires ni à l’endroit des étudiants, ni à l’endroit des enseignants ou de l’administration. Le prisme sécuritaire, on l’a vu, a occulté le besoin indispensable de (ré)former pour (re)construire la nation…
Betsido Eugonata