Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Centrafrique    Publicité
aBangui.com NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Afrique : Crises postélectorales – Eviter le scénario du pire en Afrique centrale
Publié le lundi 26 septembre 2016  |  LNC
Gabon
© AFP par MARCO LONGARI
Gabon : affrontements à Libreville après l’annonce de la victoire d’Ali Bongo
Comment




Après des processus électoraux conflictuels chez certains de leurs voisins de la sous-région, le Gabon, la république démocratique du Congo, et la Centrafrique font figure, aujourd’hui, de points chauds dans cette partie du continent guettée par une instabilité aux conséquences imprévisibles.
Gabon

Ce vendredi 23 septembre est la date butoir du verdict de la Cour constitutionnelle gabonaise sur le recours introduit par l’opposant Jean Ping, en contestation du résultat de la présidentielle du 27 août qui le donne perdant. Dans le camp du chef de l’Etat sortant, Ali Bongo Ondimba, déclaré vainqueur du scrutin, comme dans celui du candidat arrivé en deuxième position, la conviction est faite que l’un et l’autre ont gagné cette élection. Ces positions tranchées ne laissent entrevoir pour le moment aucune lueur d’apaisement et mettent le juge du contentieux électoral dans une posture fort-délicate.

D’abord hésitant, Jean Ping avait fini par saisir la Cour constitutionnelle au dernier moment, mais alertait dans le même temps contre une « instabilité durable » si les délibérations de la Cour n’étaient pas en sa faveur. Des observateurs y ont vu une façon pour l’opposant de préparer ses partisans à de nouvelles manifestations de rue. À l’annonce des résultats provisoires, le 31 août, le Gabon était passé d’une situation de calme précaire à une irruption de violences qui s’étaient soldées par des pertes en vies humaines et l’incendie d’édifices publics et privés.

Convaincu, pour sa part, de sa victoire, Ali Bongo Ondimba semble jouer sur tous les tableaux. En effet, après avoir plus ou moins décliné l’offre d’une rencontre avec son principal opposant, le chef de l’Etat gabonais a mis un peu d’eau dans son vin. D’après le porte-parole du gouvernement, Alain-Claude Bilie-By-Nzé qui s’exprimait à la télévision nationale, le 20 septembre, le président gabonais est disposé à « rencontrer tous les candidats de la dernière élection présidentielle, y compris M. Ping afin qu’aucun Gabonais ne trouve la mort sous prétexte d’une revendication démocratique dont les mécanismes de résolution sont prévus par la loi et connus de tous ».

Ces propos faisaient suite à ceux prononcés par Ali Bongo Ondimba en marge des obsèques, à Libreville, d’un soldat tué lors des émeutes postélectorales. Mais la référence au respect de la loi chaque fois répétée par les proches du chef de l’Etat signifie aussi que pour le pouvoir en place, seul le verdict de la Cour constitutionnelle tranchera le contentieux électoral en cours. Lors d’une conférence de presse conjointe, le 21 septembre les ministres de l’Intérieur, de la Justice, de la Communication ainsi que le Porte-parole du gouvernement ont mis en garde l’opposition. D’après les orateurs, les proches de Jean Ping seraient en train de se préparer à mettre le Gabon à feu et à sang. « Nous les connaissons et savons où ils sont », insistait le porte-parole du gouvernement.

MÉDIATION

L’Union africaine avait envisagé une médiation peu après la publication des résultats contestés de la présidentielle gabonaise. Sur place, les esprits s’échauffaient encore et aucune des parties ne semblait vraiment prête à discuter avec la délégation de l’Organisation continentale. Ce, malgré des assurances qui émanaient plus de la bonne convenance que de la bonne disposition d’esprit. Néanmoins, des experts de l’UA se sont joints à la Cour constitutionnelle pour examiner le recours de l’opposition ainsi que les remarques de la partie adverse. Les observateurs s’accordent à dire que la garantie offerte par cette présence de juristes extérieurs au Gabon ne suffira pas à calmer les esprits.

Il n’est pas exclu, en cas de regain de tension dans le pays après le délibéré de la Cour que l’UA, la Francophonie, et plus proches, la CEMAC et la CEEAC prennent fait et cause pour un rapprochement de vues entre adversaires. A moins que la Cour renvoie les deux candidats aux urnes pour mieux les départager ? Mais même dans une telle hypothèse les violences pourraient éclater.

RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

C’est l’impasse pourrait-on dire : le dialogue initié par le président Joseph Kabila, avec l’appui de la Communauté internationale qui a apporté tout son soutien au médiateur désigné, Edem Kodjo n’a pas rempli son objet. L’idée était de voir les délégués à ces concertations adopter une feuille de route consensuelle censée sortir la République démocratique du Congo du cercle vicieux dans lequel elle se trouve : sans élections, sans dates fixées pour les tenir. Ce qui apporte de l’eau au moulin des opposants radicaux menés par Etienne Tshisekedi devant le fait que non seulement les élections n’auront pas lieu selon le calendrier initial, mais aucun consensus n’est trouvé pour un nouveau chronogramme.

Ayant boycotté le dialogue, les membres du Rassemblement (opposition radicale) sont en effet accrochés au calendrier constitutionnel qui fixait l’élection présidentielle au 20 décembre prochain, et que le président Joseph Kabila, en fin de mandat, passe les pouvoirs au futur nouveau président élu. Alors qu’ils sont tous d’avis que le fichier électoral doit être « toiletté » pour permettre la tenue d’élections fiables, les protagonistes ne partagent pas l’idée de repousser à plus loin la convocation du corps électoral. La Commission électorale propose seize mois, l’opposition radicale insiste quant à elle sur le respect des délais constitutionnels, les opposants partie prenante au dialogue voudraient pour leur part retenir une date toute proche.

Telle une pluie qu’annonce l’amoncèlement de nuages, la marche de l’opposition radicale, le 19 septembre a mis le feu aux poudres. Durant deux jours, des échauffourées entre manifestants et forces de l’ordre ont occasionné un lourd bilan de personnes tuées (17 selon les sources officielles), d’édifices publics et privés incendiés, des commerces pillés. S’en est ajoutée la suspension par les délégués de l’église catholique de leur participation au dialogue, réduisant par avance sensiblement la portée des recommandations qui sortiront du conclave.

La situation actuelle en RDC devient incertaine qu’il parait urgent, impérieux, de relancer les discussions entre les différents acteurs. Auquel cas, dans l’impasse, on pourrait assister à un passage en force du pouvoir et un raidissement des positions de ses adversaires de l’opposition. Cette dernière, faut-il le rappeler s’est fixé pour objectif, la date du 19 décembre qu’elle considère comme celle de la fin du mandat du président Joseph Kabila. Elle menace en effet de manifester jusqu’à cette date. Ce que ne pourra pas tolérer la puissance publique.

RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

La remontée de tension en République Centrafricaine tranche avec l’espoir qu’a suscité auprès de la population de ce pays et de ses partenaires extérieurs, la fin de la transition tumultueuse des trois dernières années. Les autorités actuelles de Bangui ont, en effet, été installées au pouvoir au terme d’un processus électoral salué par tous et auquel les Centrafricains, dans leur écrasante majorité, ont cru.

Mais alors que le pays s’engage sur la voix de la reconstruction, le défi de l’insécurité rappelle aux uns et aux autres que tout cet ensemble est encore fragile. Ceci d’autant plus qu’à ce défi, qui semble le premier de tous par sa transversalité, la situation sociale des Centrafricains demeure préoccupante. Nombreux étaient restés au pays pendant les moments difficiles vivant pour certains dans des centres d’accueil précaires, mais beaucoup d’autres ont trouvé refuge dans les pays voisins (Congo, Tchad, RDC, Cameroun) et y sont toujours. Ce n’est évidemment pas dans ce contexte que l’économie centrafricaine pourrait répartir. Au premier trimestre de cette année pourtant, les annonces étaient encourageantes sur ce plan. Selon un rapport de la BEAC commenté par le vice-gouverneur de l’institution, Mahamat Taïr Nguilid, le 21 mars, le pays affichait un PIB de 5,2% égalant le niveau qu’il avait atteint avant 2010.

Si les ex-Séléka et les Anti-balaka, à l’origine de troubles ayant occasionné des pertes en vies humaines dans les localités de Kanga Bandoro reprennent du service, ils compromettront davantage une situation encore délicate.

CONSOLIDER LA PAIX

Au plus fort de la crise centrafricaine début 2013, la CEMAC s’était placée aux avant-postes comme faiseuse de paix. Sa mission s’était consolidée avec l’arrivée de la Force française Sangaris, puis l’avènement de la MISCA, soutenue par l’Union africaine et, finalement la MINUSCA sous-tutelle des Nations unies. Il faut parvenir à enrayer l’insécurité entretenue par les ex-miliciens au risque d’assister à la déstabilisation des nouvelles institutions centrafricaines.

On peut néanmoins pour l’heure se poser la question de savoir si la CEMAC sera en mesure de se lever du bon pied comme elle l’avait fait pour sauver la Centrafrique au début de la crise de 2013. Bien évidemment qu’aujourd’hui, la donne a changé, la RCA n’est plus sous un régime de transition abonné aux injonctions de ses donateurs. Il n’empêche que ce pays a encore besoin de l’aide de ses voisins et des partenaires extérieurs pour cheminer vers une sortie de crise durable. Parmi ces partenaires, il y a la France qui venait il y a peu de mettre fin à son opération militaire. Certainement contre le cours des choses car la RCA fait face à de nombreux défis, dont celui de reconstituer son armée et ses forces de police. Dispenser la formation des forces de défense et de sécurité et les équiper sont des actes salutaires pour ce pays dans le moment présent.

Engagée elle-même sur plusieurs fronts à l’extérieur, la France est peut-être préoccupée par sa propre sécurité à l’intérieur de ses frontières. Devrait-elle, par conséquent, si elle ne veut pas se trouver dans la position de revenir à grands pas sauver les meubles en Centrafrique, apporter son appui total à la Force MINUSCA pour lui permettre de mener à bien sa mission.

AU CŒUR DES ENJEUX

Comment éviter le scénario du pire en Afrique centrale ? Gabon, Rd-Congo, RCA, ce n’est pas verser dans une conception alarmiste que de tirer la sonnette d’alarme. Un embrasement généralisé de ces trois pays, ou même d’un seul (ce qui n’est absolument pas souhaitable) aurait des conséquences incalculables pour toute la sous-région. Il y aura en effet tout d’abord un mouvement des populations difficile à contrôler avec une crise humanitaire certaine, puis une insécurité transfrontalière qui profitera à des groupuscules terroristes de tous bords. Le destin commun des nations du monde dans le bassin du Congo, deuxième poumon écologique de la planète, s’en trouvera compromis.

L’impact sur l’activité économique, sur les entreprises opérant dans cette partie du continent sera désastreux. Au cœur de cet ensemble, le Congo qui est passé très près de la catastrophe il y a quelques mois, mais a su préserver sa stabilité n’aura pas tout seul les moyens de contenir les effets des conflits fratricides chez ses voisins. Il a certainement un rôle à jouer auprès de ces derniers, mais ce ne sera possible que si la Communauté internationale le lui assigne en connaissance de cause et appuie toutes les initiatives qui concourent à l’apaisement.

Dans la mesure où Brazzaville a l’expérience de la résolution des conflits, d’autres capitales d’Afrique centrale, en situation relativement calme pourront, ensemble avec elle, mutualiser leurs efforts. Les crises essentiellement politiques que traversent les pays de la sous-région ne sont pas insolubles, car les acteurs peuvent dialoguer si des cadres adéquats de retrouvailles sont créés et des facilitateurs soutenus au plus haut niveau par les instances internationales.
Commentaires


Comment