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Rapport spécial de la MINUSCA sur les incidents de Kaga-Bandoro
Publié le mercredi 2 novembre 2016  |  Centrafrique Presse Info
Le
© Autre presse par DR
Le site des déplacés de l’évêché de Kaga-Bandoro en reconstruction après son incendie
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NATIONS UNIES

Mission multidimensionnelle des Nations Unies pour la Stabilisation en Centrafrique MINUSCA

UNITED NATIONS

United Nations Multidimensional Integrated Stabilization Mission in Central African Republic

MINUSCA Division des droits de l’homme



RAPPORT SPECIAL SUR LES INCIDENTS DE KAGA-BANDORO

Du 12 au 15 octobre 2016



Résumé

Le présent rapport porte sur les abus des droits de l’homme commis par des éléments armés, principalement les ex-Seleka/FPRC et MPC, durant les attaques contre des civils et des objectifs civils à plusieurs endroits de Kaga Bandoro (préfecture de la Nana Grebizi) du 12 au 13 octobre 2016. Les informations fournies sont basées sur les résultats des missions de surveillance des droits de l’homme conduites sur le terrain par la Division des droits de l’homme (DDH) du 12 au 15 Octobre.

Depuis le mois d’août, la tension s’est exacerbée entre les éléments ex-Séléka et les Anti-Balaka. La méfiance entre ces deux groupes a conduit les Anti-Balaka à se regrouper à Ndomété, en septembre. Les 16 et 17 septembre, les affrontements qui ont éclaté entre les ex-Séléka et les Anti-Balaka ont causé la mort de quatre personnes et le déplacement d’environ 3.200 civils.

La MINUSCA a pris les mesures adéquates pour protéger les civils et établir une « zone sans arme » dans la ville et ses environs. Le 12 octobre, le corps d’un musulman a été découvert dans le quartier des Travaux Publics. Les forces de la MINUSCA qui se sont rendues sur les lieux pour y mener des vérifications en ont été empêchées par un groupe d’éléments armés présumés être un mélange d’éléments ex-Séléka et de jeunes hommes appartenant à la communauté musulmane. Ces éléments armés ont récupéré le corps de la victime qu’ils ont transporté en direction du pont principal de Kaga Bandoro.

Plus tard, les éléments armés musulmans et les ex-Séléka sont sortis de différents quartiers pour se diriger vers le camp des personnes déplacées internes (PDIs) de l’Evêché et la Préfecture. Ils se sont affrontés aux Anti-Balaka et aux Forces de la MINUSCA. A l’issue de missions d’enquête conduites du 12 au 15 Octobre, la MINUSCA est en mesure de confirmer la mort de 37 civils, dont quatre femmes, deux garçons, une fille et un bébé de sexe inconnu.

L’analyse de documents médicaux provenant de l’hôpital de la MINUSCA, de l’hôpital général préfectoral et d’hôpitaux à Bangui a permis de confirmer des blessures faites à 60 civils, dont 22 femmes et quatre enfants (trois filles et un garçon). La MINUSCA a également reçu des allégations de dix cas de viols commis par des éléments ex-Séléka. Des images satellitaires prises avant et après les incidents ont permis de confirmer le pillage et l’incendie d’au moins 400 huttes, 130 maisons dans la ville de Kaga Bandoro et 21 autres maisons sur l’axe Kaga Bandoro-Mboto.

Plus de 10.000 civils se sont déplacés et ont besoin d’assistance humanitaire. Suite à cet incident, la MINUSCA a assuré la protection des personnes déplacées qui ont trouvé refuge près de sa base et à qui elle continue de fournir une assistance humanitaire, notamment en soins de santé, nourriture et eau. Le commandement des différents groupes armés, en l’occurrence ceux des ex-Séléka du Mouvement Patriotique pour la Centrafrique (MPC) et du Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC), ont pris des mesures en vue de contenir leurs éléments.

La MINUSCA a identifié trois catégories d’auteurs présumés, à savoir les ex-Séléka, particulièrement ceux des factions MPC et FPRC (ci-après désignés dans le présent rapport « ex-Seleka), des jeunes armés de la communauté musulmane et les Anti-Balaka. Bien que les victimes et les témoins attribuent la responsabilité d’un certain nombre de meurtres, blessures volontaires, pillage et incendies volontaires aux ex-Seleka, le représentant de la société civile les attribue aux membres du groupe d’auto-défense de la communauté musulmane.

Ce rapport reflétera la responsabilité de groupe, ainsi qu’il ressort des témoignages des victimes et témoins, étant entendu que des enquêtes complémentaires devront être menées à l’effet d’établir la responsabilité personnelle des auteurs présumés, avec un certain degré de certitude juridique. La MINUSCA recommande au gouvernement de soutenir d’urgence la lutte contre l’impunité des abus graves des droits de l’homme, commis récemment et dans le passé à Kaga Bandoro, tout en veillant à la conclusion rapide des enquêtes et à l’ouverture de poursuites dans les meilleurs délais.

Le gouvernement devrait accorder la priorité au déploiement des fonctionnaires à Kaga Bandoro, y compris des magistrats, afin de restaurer l’autorité de l’État et la primauté du droit. Le gouvernement devrait prioriser un dialogue national inclusif à tous les niveaux ainsi que la cohésion sociale entre les communautés chrétiennes et musulmanes. Les acteurs internationaux devraient soutenir le retour des ONG humanitaires qui ont quitté la zone des incidents, afin d’apporter une réponse humanitaire aux déplacés et trouver de concert, une solution à la présence des groupes armés dans les sites abritant les déplacés internes.

Introduction et contexte
Les violences qui ont éclaté à Kaga-Bandoro du 12 au 15 Octobre dénotent de l’existence d’un conflit politico-ethnique complexe, à caractère sectaire ou religieux. Dans la plupart des régions de la RCA en général et à Kaga-Bandoro en particulier, les communautés chrétienne et musulmane ont constitué des groupes d’auto-défense dans le but de protéger leurs quartiers et environs contre les activités criminelles perpétrées par d’autres éléments armés.
Les principaux auteurs d’abus du droit international des droits de l’homme (DIDH) et du droit international humanitaire (DIH) commis lors de ces violences sont les ex-Séléka, particulièrement ceux des factions FPRC et MPC, les anti-Balaka et des civils armés. Ces violences ont consisté en des attaques délibérées contre des personnes protégées dans le camp des PDIs de l’Evêché et contre d’autres civils. La présence limitée de l’autorité de l’Etat à KagaBandoro créé un environnement dans lequel les auteurs présumés d’abus des droits de l’Homme jouissent d’une impunité quasi totale. Ils ne sont pas arrêtés, encore moins traduits en justice. Dans la majeure partie de Kaga-Bandoro et ailleurs, les ex-Séléka se comportent comme des autorités de fait, en ayant un contrôle effectif sur la zone.
Au cours des mois d’août et septembre, la tension est tellement montée entre les ex-Séléka et les anti-Balaka que ces derniers se sont regroupés à Ndomété, déclenchant ainsi des violences les 16 et 17 Septembre, qui ont causé la mort de quatre personnes et le déplacement massif de 3.200 civils. Suite à ces attaques, la MINUSCA a pris des mesures énergiques en vue de protéger les civils. Pour mettre fin à la violence, la MINUSCA a tenu des réunions avec les leaders des exSéléka/FPRC, à savoir Lambert Mokove Lissane, Adam Moussa et Saad Ahamat Ali, le président exécutif des ex-Séléka/MPC, Elbachar Idriss, et le coordinateur des Anti- Balaka, Bertrand Gazamodo.
En outre, la MINUSCA a procédé au démantèlement de plusieurs points de contrôle érigés par les ex-Séléka /FPRC, y compris celui de Gomango, établi une zone « sans armes », puis déployé des troupes militaires en appui, en provenance de Bangui.

Le démantèlement de la plupart des points de contrôle illégaux à Kaga Bandoro semble avoir créé des frustrations au sein des ex-Séléka, dans la mesure où ces points de contrôle constituaient une source de revenus pour eux. En conséquence, l’insécurité s’est tellement accrue que les ONG internationales ont été ciblées à plusieurs reprises. Le 1er octobre, en raison de l’insécurité, les ONGs INTERSOS, IRC et Solidarité Internationale ont décidé de quitter Kaga Bandoro pour une période d’au moins 10 jours.
Le 11 Octobre, environ 2.000 civils musulmans ont organisé une manifestation pacifique à KagaBandoro pour dénoncer les mauvais traitements infligés à la population musulmane et exiger l’adoption d’un plan de retour pour les réfugiés vivant au Tchad. Les boutiques et commerces à travers la ville ont été fermés.
Le 12 Octobre, la MINUSCA a été informée de la découverte du cadavre d’un musulman dans le quartier des Travaux Publics. Les premières informations reçues ont indiqué que le 11 octobre, un employé de la station de la radio locale de Kaga-Bandoro avait tué un élément ex-Séléka lors d’une tentative de vol dans sa résidence. Ainsi, un groupe d’éléments ex-Seleka associés à des musulmans armés ont récupéré le corps qu’ils ont transféré à la mosquée. Par la suite, ils se sont transportés en direction du camp des PDI de l’Évêché et des quartiers Travaux Publics, Mambéa et Manguépa pour y lancer des attaques contre les civils et des objectifs civils. Ces attaques ont causé la mort de 37 civils, des blessures volontaires à plusieurs autres civils, le pillage et l’incendie volontaire de plusieurs maisons, de locaux des ONGs, des églises ainsi que le déplacement massif de la population à proximité de la base de la MINUSCA. D’autres déplacements ont été egalement observés dans le quartier Socada.
Il importe de signaler que les ex-Seleka ont exprimé leur déception de n’avoir pas pu rencontrer le Président Touadera lors de sa visite du 4 août à Kaga-Bandoro. De même, ils ont manifesté leur mécontentement face à consolidation et la réorganisation des Anti-balaka dans certaines parties de Kaga Bandoro.
Les ex-Séléka ont accusé les autorités locales, en l’occurrence le maire et le sous-préfet, d’être de connivence avec les Anti-Balaka qu’ils auraient aidés à se regrouper dans différentes zones de Kaga-Bandoro. Le 24 Août, six autorités locales, dont les chefs d’arrondissement et de groupes de Gobongo 1 et Gobongo 2, le chef de groupe du 5e arrondissement (Socada), Baipo 1, Baipo 3 et Kandimara ont été arrêtés illégalement sur les ordres d’Al Khatim, le commandant des exSéléka/MPC. Suite à l’intervention de la MINUSCA, ces six autorités ont été libérées le 25 Août. Dès lors, le déficit de confiance entre ces deux groupes s’est accru, à mesure qu’augmentait le mécontentement contre la MINUSCA.
III. Méthodologie

Les informations collectées et documentées sont basées sur des entretiens réalisées par les officiers des droits de l’homme de la MINUSCA au cours d’une mission d’enquête sur le terrain, du 12 au 17 Octobre. Lors de cette mission, l’équipe s’est entretenue avec plusieurs témoins oculaires, des victimes, des autorités locales, des chefs de groupes armés ex-Séléka (principalement du MPC et du FPRC), des membres de la société civile et des leaders communautaires et religieux. La DDH a également recueilli des déclarations pendant des réunions organisées avec différents acteurs pertinents durant les visites sur le terrain, ainsi qu’à partir des rapports des autres composantes de la MINUSCA, y compris les contingents. En outre, l’équipe a tenu des réunions avec les acteurs humanitaires, les commandants de bataillon de la MINUSCA, les médecins des hôpitaux publics et de la MINUSCA, des enseignants, le responsable du camp de PDIs et des représentants de la jeunesse musulmane.
Les enquêteurs ont également collecté des informations durant les réunions de haut niveau entre l’équipe dirigeante de la MINUSCA et les autorités locales, les représentants des PDIs, les groupes armés et la communauté musulmane, notamment pendant lors des visites dans les zones affectées suite à l’incident.
La documentation des cas a été faite sur la base de photos, de rapports médicaux et de rapports mis à jour d’autres composantes de la MINUSCA. L’utilisation d’au moins deux sources indépendantes a été respectée afin de répondre aux standards de vérification de la preuve. Plus spécifiquement, les cas de meurtres ont été corroborés par des rapports médicaux détaillant le nombre de corps collectés, le nombre de corps enterrés, les témoignages des membres des familles éplorées corroborés par des preuves de l’inhumation et/ou de l’identité de la victime. Les informations n’ayant pas pu obéir aux standards de vérification de la preuve sont rapportées comme des allégations et feront l’objet de vérification ultérieure.
La DDH a été confrontée à des défis majeurs au cours de ses enquêtes. En effet, un grand nombre de témoignages ont pu être recueillis auprès de la communauté chrétienne. En revanche, la DDH n’a pas pu avoir accès à la communauté musulmane, en raison de l’insécurité ambiante. De même, les sources se trouvant dans des zones contrôlées par des groupes armés sont fortement influencées par ces groupes. Cette situation a rendu difficile l’établissement du nombre exact de victimes et l’identification des auteurs des abus.
Par ailleurs, il est à noter que la détérioration de la situation sécuritaire et la restriction de mouvement y relative à l’ensemble du personnel du système des Nations Unies à Kaga Bandoro ont empêché l’équipe d’enquêteurs de collecter davantage d’informations au cours des événements. Enfin, les attaques contre les partenaires humanitaires n’ont pas permis de collaborer et établir la liaison avec eux pendant et après les incidents.
Cadre légal
Conformément au régime juridique moniste de la RCA, la RCA a ratifié cinq des dix principaux traités internationaux relatifs aux droits de l’homme: Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC/adhésion le 8 mai 1981); le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et son premier Protocole facultatif (PIDCP / OP / 8 mai 1981); la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (ratifiée le 16 Mars 1971); la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (adhésion le 21 Juin 1991) et la Convention des droits de l’enfant (ratifiée le 23 Avril 1992). Le 11 Octobre 2016, la RCA est devenue partie à la Convention contre la torture et son protocole facultatif (adhésion 11 Octobre 2016), la Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif (ratifié le 11 Octobre 2016), la Convention sur les disparitions forcées (adhésion le 11 Octobre 2016) le protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (adhésion le 11 Octobre 2016) et le protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (adhésion 11 Octobre 2016).
La RCA a également ratifié la Convention relative au statut des réfugiés (24 Septembre 1962) et est partie au Statut de Rome instituant la Cour pénale internationale (ratifiée le 3 Octobre 2001). Au niveau régional, la RCA est un Etat partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ratifiée le 26 Avril 1986), la Convention régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique (ratifiée le 23 Juillet 1970) et la Convention africaine pour la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (ratifiée le 20 Décembre 2010). En ce qui concerne le droit international humanitaire, la RCA est partie aux quatre Conventions de Genève du 12 Août 1949 (ratifié le 1er Août 1966) et leurs Protocoles additionnels I et II de 1977 (ratifiée le 17 Juillet 1984). La CAR est tenue par le DIDH et du DIH en temps de paix et de conflit armé.
Les acteurs non étatiques sont de plus en plus tenus d’avoir des obligations des droits de l’homme lorsqu’ils sont considérés comme des autorités de facto ou ont le contrôle effectif sur le territoire et ’exercice des fonctions gouvernementales. Tel est le cas à Kaga Bandoro où les ex-Séléka sont des autorités de facto. Les ex-Séléka et leurs factions dissidentes exercent des fonctions de sécurité, en privant arbitrairement les civils de liberté par des arrestations et détentions illégales, tout en imposant des amendes illégales. Ils sont également responsables de meurtres, d’agressions, de viols, de pillages, d’attaques contre des personnes protégées et des déplacements forcés de civils, comme cela a été le cas lors des violences récentes à Kaga Badoro, entre le 12 et le 15 Octobre.

ABUS DES DROITS DE L’HOMME ET DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE

A l’issue de ses investigations, la MINUSCA est en mesure de confirmer que 37 civils ont été tués, dont quatre femmes, deux garçons, une fille et un bébé de sexe inconnu. De même, 60 civils, dont 22 femmes et quatre enfants (trois filles et un garçon) ont été blessés lors de ces affrontements. La MINUSCA est également en mesure de confirmer l’incendie volontaire d’au moins 400 tentes de PDI, 130 maisons dans la ville de Kaga Bandoro et 21 autres habitations sur l’axe Kaga Bandoro-Mboto, ainsi qu’il ressort des images satellitaires prises avant et après les affrontements. En outre, la MINUSCA confirme le déplacement massif de plus de 10.000 civils. Les auteurs présumés de ces abus sont principalement les ex-Seleka, les Anti-balaka et des civils appartenant aux communautés musulmane et chrétienne. A. Abus commis par les ex-Seleka et des civils armés musulmans Droit à la vie
A l’issue de ses vérifications, la MINUSCA est en mesure de confirmer que les ex-Seleka et des civils musulmans armés ont tué 35 civils, y compris trois femmes et trois enfants, dont deux garçons et une fille. Au nombre des victimes tuées figurent quatre enseignants, y compris le directeur du centre pédagogique et un personnel national du Comité International de la Croix Rouge (CICR). La plupart des appartiendrait à la communauté chrétienne et sont majoritairement des déplacés internes, et ce, suite aux attaques menées sur au camp des PDI de l’Évêché, et dans des quartiers Travaux Publics, Mambéa and Manguépa. Les entretiens conduits auprès de différentes sources attestent que les auteurs présumés sont soit des ex-seleka soit des civils musulmans armés.
Les informations relatives aux exécutions arbitraires ont été collectées auprès de sources médicales de l’hôpital préfectoral et de la MINUSCA, corroborées par un examen physique des corps trouvés sur la scène du crime. Parmi les victimes tuées, 32 corps ont pu être récupérés, dont 12 ont été formellement identifiés par les membres de leur famille, tandis que 20 autres demeurent non encore identifiés à ce jour. Suivant les rapports médicaux établis par l’hôpital de MINUSCA, cinq civils ont été tués au camp des PDI de l’Évêché, parmi lesquels figure un enfant âgé de 17 ans (âge confirmé par le père de la victime). Selon toujours des rapports médicaux, trois des victimes ont été tuées par armes à feu, une autre poignardée et la dernière brulée vive.
Des témoins ont rapporté que le directeur régional du Centre Pédagogique National et un enseignant de l’Ecole Polyvalente ont été tués par un groupe d’ex-Seleka qui ont fait irruption dans le camp des déplacés internes. Cette information a été confirmée par deux autres sources indépendantes. Un enseignant, témoin oculaire de l’attaque du Lycée Polyvalent du 12 octobre aux environs de 9 :00, a fait le témoignage suivant à la DDH : « Soixante maitres parents assistaient à un cours au lycée polyvalent lorsqu’ils ont aperçu un groupe d’ex-Seleka habillés en boubou qui a mené une incursion dans le camp des DPI, pourchassant et attaquant les civils. Lors de cette attaque, il a été témoin du meurtre du directeur du ‘Centre Pédagogique Régional’ et de celui d’un maitre parent dont il ignore l’identité.
Le 12 octobre 20156, une infirmière du CICR a été tuée près de Manguepa par les éléments ex seleka, en représailles du meurtre d’une femme musulmane et de son bébé par les Anti-balaka au camp des DPI de l’Evêché. Selon les déclarations d’une femme témoin oculaire, les éléments des ex seleka croient que le personnel médical du CICR serait indirectement responsable de l’insécurité du centre de nutrition dirigé par le CICR. Il ressort de son témoignage ce qui suit : « J’ai vu un personnel du CICR, couvert de sang, courir vers sa maison, après avoir été poignardé. Il criait qu’un élément ex-Seleka le poursuivait. Je suis entré dans la maison avec lui pour demander de l’aide. J’ai entendu la voix d’un ex-Seleka qui était entré dans la maison et qui l’a poignardé. J’ai entendu des cris « il m’a poignardé » J’étais caché sous le lit et entendait l’un des agresseurs dire : « il a un badge, c’est le genre de personnes que nous recherchons. Nous avons besoin de le massacrer ; mais pas en utilisant une arme » J’ai entendu la victime crier jusqu’à ce que sa voix s’éteigne. »
Un autre cas d’attaque ciblée est celui d’un professeur âgé de 42 ans qui a été tué dans le quartier de Bamou, dans le site des PDI, le 13 octobre 2016 par les éléments présumés ex seleka placés sous le commandement du Comzon Hamat Chatoyu du FPRC à Kaga Bandoro. Ce Comzon conduisait la patrouille dans la zone. La DDH a interviewé un proche de la victime le 14 octobre 2016, lequel a rapporté que la victime est un professeur et participait à une formation au lycée polyvalent. Il a été retrouvé mort sur la route allant vers Dekoa près du site des PDIs de Bamou. Ce proche a déclaré que la victime a été tuée à coups de couteaux et enterrée près de l’aérodrome de la MINUSCA.
La DDH continue de recevoir les informations faisant état de ce que des civils auraient été tués par un groupe armé non identifié, après les incidents du 12 octobre. Quatre cas d’atteinte à la vie, y compris deux enfants ont été rapportés à la DDH par les autorités locales. Les deux enfants auraient été tués le 14 octobre, alors qu’ils tentaient de rentrer à la maison et de récupérer certains biens à Nambéa, non loin de l’école Sainte Thérèse. L’une des victimes aurait été tuée devant INTERSOS et l’autre dans le voisinage des Travaux Publics. Au cours d’une rencontre avec la MINUSCA, les autorités locales ont déclaré que trois autres personnes de Botto auraient été tuées le même jour. Ces informations ne sont pas encore confirmées.
Selon le représentant de la jeunesse musulmane, quatre musulmans armés auraient été tués pendant les évènements. Ils faisaient partie du groupe qui aurait envahi les zones chrétiennes après la récupération du cadavre d’un homme musulman découvert le 12 octobre dans le quartier Travaux Publics. D’après lui, ces hommes armés ne sont pas des ex-Seleka ; mais plutôt un groupe de musulmans armés, corroborant les différents témoignages de diverses sources qui ont déclaré que des musulmans armés faisaient partie des assaillants qui ont attaqué le camp des PDI. Quoiqu’il n’y ait pas d’indication précise de leur appartenance ex-Seleka, ils ont été pris en charge ou tolérés par ces derniers. Droit à l’intégrité physique et mentale
Des abus au droit à l’intégrité physique et mentale ont été aussi enregistrés durant les évènements du 12 octobre. La DDH a confirmé que 60 civils ont été blessés, dont certains cas de traumatisme psychosocial. Les informations ont été reçues des victimes admises à l’hôpital et des partenaires humanitaires. La DDH a reçu egalement des allégations de 10 viols de femmes; mais ces informations ne sont pas encore confirmées. Une enquête complémentaire est nécessaire.
L’hôpital de la MINUSCA a fourni une liste de 40 personnes, dont 22 femmes et quatre enfants (trois filles et un garçon) qui ont été admis entre le 12 et le 13 octobre. Selon les dossiers médicaux, au moins neuf personnes portent des blessures par balles, deux ont souffert de brûlures et onze ont été poignardées. D’autres ont été admises pour des traumatismes psycho-sociaux mineurs provoqué par l’effet de panique. En outre, l’hôpital général de la préfecture a confirmé avoir reçu 17 personnes qui ont été blessées, le 12 octobre. La plupart ont été blessés pendant qu’elles fuyaient les agresseurs du camp des PDIs de l’Evêché, du quartier des Travaux Publics, des zones de Mambéa et de Manguepa.
La DDH a recueilli le témoignage suivant d’un parent d’une victime blessée: « Autour de 9h00, mon frère était sur le point de faire du jardinage lorsque j’ai vu les ex- Séléka venir derrière le camp. Je les connaissais depuis longtemps à Kaga Bandoro. Je les ai vus le frapper d’abord à la tête à l’aide d’un couteau ; et lorsqu’il est tombé au sol, ils ont continué à l’agresser une seconde fois à l’épaule et aux fesses. Devant cette situation, les éléments du contingent burundais sont intervenus en tirant trois coups de feu en l’air. Plus tard, ils sont venus récupérer la victime et l’ont amenée à leur base. Elle a été transférée à l’hôpital de la MINUSCA qui a confirmé l’incident. »
Certaines autorités locales ont également été attaquées par les ex-Seleka pendant la crise. Elles ont affirmé avoir été accusées de soutenir les anti-Balaka et la communauté chrétienne. L’une des victimes est le sous-préfet de Kaga Bandoro qui a rapporté le 12 Octobre à la DDH ce qui suit: « Aussitôt informé le 12 Octobre du meurtre des musulmans dans le camp des PDI des Travaux Publics, je m’y suis rendu aux environs de 5h45 mn. Une fois sur place, j’ai constaté la présence du corps sans vie d’un ex-Séléka bien connu comme étant un «taxi moto », qui aurait été tué alors qu’il tentait de cambrioler la maison d’un journaliste de la radio de Kaga Bandoro. J’ai immédiatement quitté les lieux en direction de la base MINUSCA pour en informer l’agent de sécurité autour de 06h00. Plus tard, je suis retourné à ma résidence pour y récupérer des vêtements. C’est à ce moment que j’ai vu une foule d’ex-Séléka crier et courir dans ma direction. Ils étaient habillés en civil, mais étaient armés de couteaux. Six d’entre eux me cherchaient et m’ont attrapé en criant: "Vous avez tué l’un des nôtres, nous allons nous venger". Les assaillants ont agi à visage découvert et trois d’entre eux parlaient Sango, sans accent particulier. Ils ont tenté de me poignarder ; mais j’ai réussi à m’échapper dans la brousse, pour parvenir à la base de la MINUSCA. »
La DDH a été informée par l’un de ses partenaires humanitaires d’au moins 10 cas de viols qui auraient été commis lors des affrontements du 12 Octobre. Les auteurs présumés seraient les éléments ex-Séléka. Le 14 Octobre, certaines femmes auraient été violées lorsqu’elles sont retournées dans leurs résidences respectives pour y récupérer des affaires. Des investigations additionnelles sont nécessaires aux fins de confirmer les faits. B. Abus commis par les Anti-Balaka
La DDH a enregistré le meurtre d’une femme musulmane et son bébé âgé de six ou huit mois (le sexe de l’enfant est inconnu), survenu le 12 octobre, pendant qu’elle recevait un traitement au centre de nutrition géré par le CICR, situé au sein du centre médical du camp des PDIs de l’Evêché. Un représentant de la jeunesse musulmane a informé la direction de la MINUSCA et la DDH, le 14 octobre, que la femme a été tuée par des éléments anti-Balaka avec son bébé. En outre, un gestionnaire du camp des PDIs a également indiqué qu’il a été informé des meurtres aux environs de 13h00, le 12 octobre et que ceux-ci ont probablement été tués à coups de couteau. D’autres sources ont rapporté à l’équipe que la femme et son bébé ont été tués par les Anti-Balaka en représailles contre les actes commis par les ex Séléka et le groupe d’auto-défense musulman. Le personnel de l’hôpital a également confirmé cette information. Droit à la liberté et l’intégrité de la personne
Le 17 octobre, la DDH a été informée des arrestations illégales et des mauvais traitements de deux civils musulmans par des éléments anti-Balaka dans la zone de Bamou, le 15 octobre. Ils avaient été blessés et ensuite transférés à l’hôpital de la MINUSCA. Ils ont été remis à leurs familles le 20 octobre. Attaques et destructions illégales
Des victimes et témoins ont confirmé la destruction et le pillage du camp Evêché des PDIs, des quartiers de Manguépa, de Mambéa et des Travaux Publics. Des centaines de maisons ont été incendiées dans ces zones par des groupes armés de l’ex-Séléka.
Un représentant du camp des PDIs de l’Evêché a rapporté que presque tout le camp avait été incendié. Le 14 octobre, l’équipe a rencontré les organisations humanitaires qui ont confirmé l’information. Les images satellitaires montrent que plus de 400 huttes, 130 maisons dans la ville de Kaga Bandoro et 21 autres maisons le long de l’axe Kaga Bandoro - Mboto ont été brûlées. Durant la mission d’observation, le 17 octobre, la DDH a noté que le camp Evêché des PDIs était vide et presque entièrement brûlé.
La DDH a reçu des rapports provenant de différentes sources humanitaires faisant état qu’un membre du personnel national du CICR a été poignardé au cours de l’incident du 12 octobre et transféré à Bangui le 14 octobre pour des soins plus approfondis. La DDH a également noté que durant la visite de monitoring, le 12 octobre, les bureaux des ONG humanitaires, dont INTERSOS, le centre de santé de la CARITAS et la base Echelle ont été vandalisés. D’autres témoignages reçus auprès des acteurs humanitaires, au cours de la réunion de crise, ont indiqué qu’il y avait eu de multiples tentatives de pillage de l’ONG Solidarité Internationale, IRC et les bases du HCR. Ces tentatives ont échoué parce que les locaux de ces ONG étaient protégés par les Forces de la MINUSCA. L’Hôpital Préfectoral de Kaga Bandoro est resté fermé, du 13 au 18 octobre, du fait de la suspension des activités du CICR suite à l’assassinat de son personnel et des attaques contre le personnel médical.
En outre, les enquêteurs de la MINUSCA ont confirmé que les domiciles privées des autorités locales et des églises ont également été pillés et saccagés. Le Sous-préfet a indiqué que sa maison a été complètement pillée. Le préfet a rapporté que le 12 octobre, autour de 07h30, après avoir été informé par le Sous-préfet des attaques dans la ville, il a quitté son domicile pour se réfugier à la base de la MINUSCA. Et c’est pendant qu’il était à la base de la MINUSCA que sa maison a été pillée et brûlée. Il dit avoir perdu des effets personnels. La DDH a visité les lieux et a confirmé que la maison du préfet a été partiellement brûlée et vandalisée. Pendant le pillage du camp de personnes déplacées, les auteurs ont attaqué la résidence des prêtres les forçant ainsi à trouver refuge à la base de la MINUSCA. L’église de la Nativité qui a accueilli les personnes déplacées d’un camp a également été attaquée et pillée.
Certaines victimes, membres du personnel local de la MINUSCA, auraient subi des pillages et des rapports indiquent également que des personnels nationaux et internationaux des ONGs ont été victimes d’attaques ciblées.
LA PROTECTION DES CIVILS ET LA SITUATION HUMANITAIRE

La situation des personnes déplacées internes, des ONGS humanitaires et celle des Forces de la MINUSCA.

Au début du mois d’octobre 2016, les inondations ont causé des dégâts importants dans la plupart des régions de Kaga Bandoro, créant ainsi une situation d’urgence humanitaire considérable. Du fait des incidents de Ndométe du 16 Septembre, l’acheminement de l’aide humanitaire dans la zone a été difficile à cause de l’insécurité qui sévissait, dans la mesure où les ONGs humanitaires étaient également la cible des attaques. Lors d’une rencontre avec OCHA le 14 Octobre 2016, la DDH a été informée de ce que le camp des déplacés internes « Evêché » a accueilli environ 7117 personnes, tandis qu’environ 4.000 rapatriés du Tchad vivaient dans les quartiers.
Au cours des attaques du 12 octobre contre les civils et le camp des déplacés internes, plus de 10.000 civils ont fui les quartiers de Manguépa, Mambéa, Travaux Publics et le camp des déplacés internes « Evêché » pour trouver refuge dans les locaux de la MINUSCA. Par ailleurs, par crainte d’éventuelles attaques, plus d’un millier de civils habitant dans les environs du quartier Socada, bastion musulman ont fui également leurs maisons pour chercher refuge dans les locaux de la MINUSCA. Ils ont été accueillis par la communauté musulmane dans l’attente de retourner dans leurs foyers respectifs, lesquels n’ont pas été affectés par la violence. Le 14 Octobre 2016, la DDH a pris connaissance de la lettre adressée à la MINUSCA par l’« Union des Fédérations des Eglises Baptistes », lettre dans laquelle a été fait mention que six cents (600) personnes déplacées occupant l’école biblique de Kaga Bandoro (Quartier Malo, près du Lycée Polyvalent), ont besoin de protection sécuritaire et de l’aide humanitaire, entres autres. Aussi, la DDH a-t-elle plaidé pour l’intervention des partenaires humanitaires. Toutefois, le 15 Octobre 2016, au moment de la visite des forces de la MINUSCA pour le constat, les lieux ont été désertés par les concernés.
Le 15 Octobre 2016, six camions remplis de personnes déplacées ont payé chacune CFA 5000 pour se rendre à Bangui, craignant pour leur sécurité, si elles restaient dans la région. Ensuite, les forces de la MINUSCA ont confirmé qu’ils avaient protégé neuf civils musulmans de Mambéa, près de la résidence du Préfet, menacés par les éléments anti-balaka. En outre, il a été rapporté qu’un des éléments des contingents des forces de la MINUSCA a été lapidé le 17 octobre 2016, lors de la visite du Chef de l’Etat.
La situation humanitaire des personnes déplacées est d’une extrême précarité. Elles sont confrontées à d’énormes difficultés d’accès à l’eau potable, à la nourriture et à l’hygiène. Des mesures urgentes doivent être prises pour fournir une aide humanitaire à la population déplacée, afin d’éviter la propagation de la maladie et de la crise humanitaire. Pour ce faire, la zone doit être sécurisée afin de faciliter l’approvisionnement en aide humanitaire. II. Les auteurs présumés
Selon les résultats des enquêtes de la Division des Droits de l’Homme, les principaux auteurs sont les membres des ex- Séléka, les Anti-Balaka et des groupes armés d’autodéfense appartenant à la communauté musulmane.
Eu égard aux informations recueillies, les éléments armés des groupes ex-Séléka issus de MPC et FPRC respectivement sous le commandement d’Al Khatim et Saleh Zabadi ont été impliqués dans ces incidents, car ce sont les seuls groupes ex-seleka actifs dans la région de Kaga Bandoro. Le Président des ex-Séléka/MPC, Idriss El Bachar a confirmé à la MINUSCA que le musulman qui a été tué le 12 octobre 2016 au quartier Travaux Publics était un élément de MPC. Par ailleurs, d’autres sources ont confirmé que cet homme était le garde du corps d’Abdel Kader Hassan, un ancien FACA et chef d’équipe chargé des opérations au sein du MPC.
La MINUSCA a rapporté qu’approximativement, 45 éléments armés d’AK47, de grenades et de couteaux les empêchaient de mener des enquêtes sur le meurtre d’un musulman, le 12 Octobre 2016 dans le quartier de Travaux Publics. Ces mêmes éléments armés ont attaqué plus tard le quartier Travaux Publics, les zones de Mambéa, Manguépa et le camp des déplacés internes « Evêché » en représailles contre les provocations des Anti-Balaka au moment où ils allaient enterrer le défunt. Selon certaines sources, ces éléments étaient sous le commandement du chef d’équipe d’ex-chef Séléka/MPC, chargé des opérations.
Les résultats des enquêtes de la Division des Droits de l’Homme de la MINUSCA ont révélé que la réorganisation des éléments anti-Balaka dans la région a été faite sur l’instigation de Bertrand Gazamodo et de Ledger Ngaya, basés dans le camp des déplacés « Evêché ». Les ex- Séléka soupçonnent les autorités locales de soutenir cette réorganisation des Anti-Balaka et que Bertrand Gazamodo refuse de faire partie du processus de pré-DDR.
Des sources crédibles et indépendantes ont confirmé l’implication des éléments anti-Balaka dans la violence du 12 Octobre 2016. Les rapports de ces mêmes sources ont confirmé qu’ils étaient directement responsables de la mort d’une femme musulmane et de son bébé âgé entre six et huit mois au centre de nutrition de l’hôpital du camp des déplacés internes « Evêché », géré par le CICR. Les mêmes éléments ont pillé la résidence du Prêtre, située dans ledit camp.
Les résultats des enquêtes de la MINUSCA confirment également l’implication des groupes d’autodéfense appartenant à la communauté musulmane dans les affrontements du 12 et 15 Octobre. Un représentant de la communauté a fait référence aux attaques du camp des déplacés internes « Evêché » comme étant une réaction spontanée contre le meurtre d’un musulman au quartier Travaux Publics. Il a affirmé qu’au moins quatre musulmans armés auraient été tués par les forces de la MINUSCA et des éléments anti-Balaka. La même source a rapporté à la Division des Droits de l’Homme de la MINUSCA qu’un nombre important de personnes sont actuellement armées et peuvent utiliser leurs armes sans toutefois être affiliées aux ex- Séléka ou aux Anti Balaka. Les forces de la MINUSCA ont également confirmé l’implication des civils musulmans d’auto-défense dans ces affrontements et que certains des auteurs étaient habillés en civil, lors de l’attaque sur le camp des déplacés internes « Evêché ».
LES MESURES PRISES PAR LA MINUSCA ET LES ACTEURS HUMANITAIRES

Les Forces de la MINUSCA ont pris des mesures pour protéger les civils pendant la crise et ont aidé à fournir une aide humanitaire, y compris de la nourriture, de l’eau et des soins de santé aux personnes déplacées internes.
La MINUSCA a publié un communiqué pour condamner la violence et appeler les ex-Séléka et les Anti-Balaka à s’abstenir de commettre des violences, tout en leur rappelant que les auteurs de crimes seront arrêtés et traduits en justice.
La MINUSCA a fourni des soins médicaux à 40 personnes blessées, recueilli et transféré 13 cadavres à l’hôpital préfectoral.
La MINUSCA a assuré la sécurité du personnel et des installations de plusieurs ONG internationales et des agences des Nations Unies, empêchant ainsi qu’elles ne soient pillées.
Les acteurs humanitaires ont fourni un soutien médical à plusieurs blessés graves et facilité leur transfert à Bangui. Ils ont également fourni une aide humanitaire à environ 10 000 nouvelles personnes déplacées ;
La MINUSCA a engagé le dialogue avec les autorités locales, les groupes armés et les organisations de la société civile à Kaga Bandoro pour apaiser les tensions et faciliter le retour des populations dans leurs quartiers respectifs. Ainsi, les commandements respectifs des ex-Séléka /MPC et FPRC ont informé la MINUSCA qu’ils ont mis en place une brigade mixte pour éviter de nouveaux affrontements et renforcer la discipline parmi leurs combattants.
LES MESURES PRISES PAR LES AUTORITÉS NATIONALES ET LOCALES
Une délégation gouvernementale composée du Président Touadéra, et certains membres de son cabinet, s’est rendu à Kaga-Bandoro le 17 octobre et a tenu des réunions avec des représentants de l’exSéléka (MPC) et FPRC afin d’apaiser les tensions et prévenir tous nouveaux affrontements. La délégation a expliqué qu’elle était prête à entamer un dialogue politique avec les groupes armés, tout en exprimant la nécessité d’un dialogue sur le DDR, comme une occasion de soulever des questions politiques et de résoudre les conflits. Avant la visite du Président, le 15 octobre, le DSRSG-HC-RC et le ministre de la réconciliation se sont entretenus avec les représentants des groupes armés, la communauté humanitaire et les organisations de la société civile.
Des combattants ex-Séléka /FPRC MPC et leur commandement ont également tenu une réunion avec la communauté musulmane le 12 octobre pour apaiser les tensions et ont informé les populations sur les mesures prises pour les protéger.
La société civile musulmane a discuté avec les habitants qui se sont réunis en face de de la base MINUSCA afin de les convaincre de retourner dans leurs foyers dans les quartiers qui n’ont pas été touchés par les affrontements. Ils les ont invités à former un groupe conjoint de légitime défense composé de chrétiens et musulmans qui va patrouiller et dissuader les éventuels voleurs d’opérer au sein de la communauté. Cependant, certains acteurs humanitaires ont fait savoir que le retour des personnes déplacées a été le résultat d’intimidations et de menaces de la part des combattants armés ex-Séléka qui ont rejoint la société civile musulmane dans leur campagne de sensibilisation.
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Les abus des droits de l’homme décrits dans le présent rapport démontrent à suffisance la fragilité et l’imprévisibilité de la situation sécuritaire à Kaga Bandoro. Les armes légères sont largement disponibles et des caches d’armes considérables demeurent dans certaines zones. Les groupes armés, en particulier les ex-Séléka et les Anti-Balaka, sont réticents à rendre leurs armes. En outre, lors de l’incident du 12 octobre, de nombreux civils présumés être membres du groupe d’auto-défense de la communauté musulmane ont été trouvés porteurs d’instruments tranchants ou autres armes improvisées (machettes, couteaux, barres de métal) capables d’infliger des blessures graves.
Il y a un besoin urgent de désarmer tous les groupes armés pour qu’ils participent au processus de DDR/SSR. Tout retard dans le désarmement des groupes armés cohabitant avec les civils expose ceux-ci à des attaques indiscriminées de leur part.
La DDH est en mesure de confirmer l’implication des groupes armés ex-Séléka, des Anti-Balaka et des civils armés appartenant à la communauté musulmane dans la commission des graves abus des droits de l’Homme et du droit international humanitaire du 12 au 15 octobre 2016, dans la préfecture de Kaga Bandoro. Au nombre de ces abus figurent des assassinats ciblés et indiscriminés, des atteintes à l’intégrité physique et mentale, de graves violations du droit international humanitaire, y compris des attaques contre des personnes protégées, des attaques contre les casques bleus et les acteurs humanitaires, les pillages et les attaques contre des biens civils, tels que les églises et les camps de PDI causant ainsi des déplacements forcés de la population locale.
La DDH est préoccupée par le fait que les efforts tendant à traduire en justice les auteurs d’abus des droits de l’Homme commis entre le 12 et 15 octobre puissent être retardés, en raison de l’absence d’autorités gouvernementales pertinentes. Les recommandations ci-dessous mettent en exergue la nécessité pour les autorités de la RCA à prendre des mesures appropriées afin de s’assurer que les auteurs de ces abus soient traduits en justice, et à la communauté internationale, de renforcer son soutien auxdites autorités.
Afin d’assurer l’amélioration progressive de la situation des droits de l’homme, la MINUSCA recommande : Au gouvernement : • De continuer et accroître ses efforts en vue d’un dialogue inclusif sur le DDR avec les groupes armés ; • De mener des enquêtes promptes, indépendantes et impartiales sur les abus des droits de l’Homme commis à Kaga-Bandoro et traduire en justice les auteurs présumés de ces abus ; • De prendre des mesures en vue de la protection des victimes et témoins, ainsi que toutes autres mesures tendant à assurer la protection des autorités judicaires en charge des enquêtes, • De coordonner les initiatives du processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) conjointement avec les mécanismes de justice transitionnelle, pour qu’ils se renforcent mutuellement ; • De mener une campagne de communication sur la responsabilité des citoyens centrafricains à s’abstenir de soutenir les groupes armés à Kaga Bandoro; mais plutôt, à s’engager dans des initiatives en faveur de la cohésion sociale et la cohabitation pacifique; • De prioriser et procéder, de toute urgence, au déploiement de fonctionnaires à Kaga Bandoro, y compris les magistrats, afin de restaurer l’autorité de l’Etat et la primauté du droit ; Aux groupes armés : • De cesser immédiatement tous abus contre les civils, et de retenir que les membres des groupes armés et leurs commandants qui commettent des abus des droits de l’homme et des violations du droit international humanitaire seront tenus personnellement responsables de leurs actes devant les juridictions ; • De déposer immédiatement leurs armes et participer au dialogue national sur le DDRR ; • De respecter les principes humanitaires et cesser immédiatement toutes attaques contre le personnel et les équipements humanitaires, en rappelant que toutes violences contre les travailleurs humanitaires, à l’instar du déni d’accès humanitaire et des vols sur les sites humanitaires, constituent des violations graves du droit international humanitaire ; A la Communauté internationale : • De fournir l’appui nécessaire aux autorités tant nationales que locales afin que les auteurs présumés d’abus des droits de l’homme et du droit international humanitaire soient traduits en justice; • De fournir un soutien financier et technique en vue de la mise en place et l’opérationnalisation effective de la Cour Pénale Spéciale, y compris un programme de protection des victimes et des témoins, de même qu’une assistance technique au système judiciaire.


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