La Directrice Générale du Fonds monétaire international, la française et Avocate d’affaires Christine Lagarde est en visite de travail en RCA depuis hier. Nous vous publions la déclaration que le Président Faustin Archange Touadera a faite lors de la conférence de presse prévue à cette occasion.
- Madame la Directrice Générale du Fonds Monétaire International,
- Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
- Mesdames et Messieurs les Membres du Gouvernement,
- Excellences Messieurs les Ambassadeurs, Chefs de Missions Diplomatiques et Représentants des Organisations Internationales,
- Monsieur le Représentant de la Banque Africaine de Développement,
- Monsieur l’Administrateur, Représentant de la République Centrafricaine au Conseil d’Administration du Fonds Monétaire International,
- Chers invités,
- Mesdames et Messieurs.
• Madame la Directrice Générale,
C’est pour moi un honneur et un plaisir de vous accueillir à Bangui, à l’occasion de cette première visite de travail.
Le peuple centrafricain est très honoré de cette présence qui témoigne l’attachement et l’attention particulière que vous avez pour la République Centrafricaine.
En cette heureuse circonstance, je tiens à vous exprimer toute notre reconnaissance et, à travers vous, au Fonds Monétaire International pour le soutien qu’il apporte au pays dans ses efforts de relèvement économique et social.
Votre visite reflète l’excellente qualité des relations entre le Fonds Monétaire International et la République Centrafricaine, relations qui s’étendent sur un demi-siècle.
Votre Institution dont nous apprécions les conseils, l’aide et la coopération, a toujours été à nos côtés, surtout dans les moments les plus difficiles de l’histoire économique et financière de la République Centrafricaine.
• Madame la Directrice Générale,
Comme vous le savez si bien, mon pays a connu une longue période de crise aux conséquences dramatiques tant sur les droits de l’homme que sur la situation de son économie et de ses finances.
Grâce au soutien de la communauté internationale, le pays a pu organiser en 2016 des élections libres, démocratiques et transparentes, saluées par toute la communauté internationale.
Depuis mon investiture et la mise en place des nouvelles institutions de la République, aucun effort n’est ménagé pour le retour de la cohésion sociale, le vivre ensemble et la réconciliation, conditions de retour à la paix définitive et de la reconstruction économique.
En matière de gestion financière, un accent particulier est mis sur la gestion transparente de la chose publique.
Le Gouvernement vient, à cet effet, d’élaborer un Code de transparence et de bonne gouvernance qui définit les principes et obligations que L’État doit respecter, dans sa législation comme dans ses pratiques, aussi bien pour la gestion de ses fonds et celle des autres administrations publiques que pour les fonds de l’assistance extérieure, accordés par les institutions internationales ou les États étrangers.
Par ailleurs, l’Assemblée Nationale vient d’adopter le projet de loi sur la Haute Autorité chargée de la Bonne Gouvernance.
Il me plait de rappeler que dans notre volonté d’assurer le relèvement du pays, nous avons privilégié notre coopération avec le Fonds Monétaire International pour qu’il nous apporte son concours habituel.
C’est dans cette logique que le Gouvernement a sollicité et obtenu du Fonds Monétaire International, une mission de supervision au titre de l’article IV et la préparation d’une Facilité Élargie de Crédit (FEC).
Cette mission conjointe organisée en mai 2016 avec la participation de tous les partenaires (Banque Mondiale, Banque Africaine de Développement, Union Européenne), a permis d’évaluer le cadre macroéconomique du pays et d’identifier des mesures de réformes économiques et financières dont la mise en œuvre pourrait garantir le rétablissement des fondements de l’économie désorganisés par la crise.
La conclusion de ce programme appuyé par la Facilité Élargie de Crédit (FEC) pour une période de trois ans a permis la mise en chantier de plusieurs reformes.
Sur le plan économique, plusieurs secteurs sont visés : secteur agricole, forestier, minier, secteur des transports ainsi que les télécommunications. Ces secteurs sont réputés être des canaux de transmission et de redistribution des revenus dans un contexte de relèvement de l’économie et de la croissance. C’est dans ce cadre que plusieurs actions ont été envisagées pour faire du secteur agricole un secteur de relance durable d’une croissance durable, de réconciliation nationale et d’insertion professionnelle des jeunes en liaison avec le programme DDRR.
Afin de crédibiliser notre programme de réformes économiques, nous avons décidé de mettre en place une stratégie pour l’assainissement des finances publiques.
Notre stratégie de réformes des finances publiques repose sur cinq (5) axes à savoir :
1- Revitaliser les recettes pour accroître le revenu intérieur ;
2- Sécuriser et gérer la trésorerie de l’État ;
3- Normaliser la gestion budgétaire ;
4- Rétablir l’image fidèle comptable sur la totalité du budget général et des budgets annexes ;
5- Rétablir la crédibilité de L’État et la confiance des opérateurs économiques.
La mise en œuvre de cette réforme se traduit au cours des neuf mois de l’année 2016, par :
- le redéploiement de l’administration financière dans les zones sécurisées,
- la sécurisation du corridor Bangui / Douala par la mise en place d’une brigade économique,
- la révision de la structure des prix des produits pétroliers afin d’intégrer les prix Plats internationaux comme nouvelle base de calcul,
- le lancement des études portant respectivement sur la révision de la mercuriale des prix dans le secteur forestier, l’amélioration du recouvrement des taxes d’abattage et de reboisement et l’état des lieux des taxes recouvrées pendant la période de crise,
- le suivi des dossiers d’exonérations règlementaires avec la limitation des exonérations dérogatoires,
- l’intensification des contrôles mixtes Douanes / Impôts dans le cadre du recouvrement de la TVA.
Sur le plan de la gestion de trésorerie de L’État, le Gouvernement a opté pour la poursuite du Comité de trésorerie avec la participation des Partenaires Financiers et Techniques.
La volonté d’optimisation de la gestion de la trésorerie s’est traduite par la réalisation d’un audit des relations de L’État avec le système bancaire afin de recenser les différentes conventions ainsi que les comptes des entités publiques ouverts dans les banques commerciales.
Un état de lieu de la bancarisation des recettes publiques et des pratiques non orthodoxes a été fait pour limiter les dispersions des ressources publiques.
De même, pour normaliser la gestion budgétaire, il a été procédé au rétablissement de l’interconnexion des modules Ges’co-budget et Ges’co- comptabilité qui permettent de créer les conditions d’un rétablissement de la chaîne de dépenses.
En outre, l’adoption d’une nomenclature exhaustive des pièces justificatives et des dispositions réglementaires met en exergue la volonté du Gouvernement de respecter l’orthodoxie de la procédure budgétaire.
Par ailleurs, le Gouvernement s’est engagé à réorganiser tout le circuit de gestion de la solde, à procéder au rétablissement des services comptables, à la reddition des comptes de l’État, se traduisant par le recrutement de l’Agent Comptable Central du Trésor (ACCT) et à la réorganisation des services comptables.
Le rétablissement de la crédibilité de L’État et la confiance des opérateurs économiques se traduisent par l’amélioration de la signature de L’État à travers l’octroi et la passation des marchés publics, l’apurement des arriérés intérieurs et extérieurs et l’opérationnalisation des corps de contrôle qui ont la prérogative de restaurer l’autorité de L’État à travers le suivi et le contrôle des institutions étatiques.
Le Gouvernement compte procéder à la titrisation de la dette intérieure afin de préserver l’intégrité du système bancaire et relancer l’économie à travers un plan d’apurement de la dette intérieure.
Enfin, pour soulager les opérateurs économiques affectés par la dernière crise, le Gouvernement a initié une étude dans le but d’estimer le niveau des pertes endurées par chaque entreprise afin de trouver les voies et moyens de les compenser.
Aussi, convient-il de signaler que dans le cadre de la publication prochaine de la loi de Règlement 2015 et le suivi des différentes entités publiques, le Gouvernement s’est engagé à renforcer les capacités des corps de contrôle, notamment la Cour des Comptes à travers la formation des Juges des différentes chambres ainsi que la Commission Finances de l’Assemblée Nationale, tout en approfondissant la formation de quelques Juges formateurs afin de pérenniser le savoir-faire dans le cadre de contrôles externes et doter la Cour des Comptes et la Commission Finances de l’Assemblée Nationale en moyens logistiques conséquents de travail.
• Madame la Directrice Générale,
Il est important de rappeler que la République Centrafricaine et le Fonds Monétaire International ont toujours eu une coopération fructueuse.
Malgré la crise, le pays a conclu trois programmes d’urgence avec le Fonds Monétaire International et un programme triennal appuyé par une Facilité Élargie de Crédit (FEC) dont l’exécution se déroule d’une manière satisfaisante.
Je tiens à rappeler ici, l’engagement du Gouvernement à mettre en œuvre les mesures énoncées lors du Sommet extraordinaire des Chefs D’État d’Afrique Centrale sur la situation Économique et monétaire dans la zone CEMAC, tenu à Yaoundé.
Parallèlement, les recommandations de la Cellule de Suivi du Programme des Réformes Économiques et Financières de la CEMAC (PREF-CEMAC) seront mises en œuvre en complément des mesures déjà effectives.
Dans le cadre de la maîtrise des finances publiques, le Gouvernement s’engage également à mettre en œuvre les recommandations spécifiques du Comité de Stabilisation Financière en Afrique Centrale (CSF-AC) qui s’est réuni à Yaoundé, le 29 Novembre 2016.
• Madame la Directrice Générale du Fonds Monétaire International,
• Mesdames et Messieurs,
En dépit de la coopération agissante entre la République Centrafricaine et le Fonds Monétaire International, beaucoup reste à faire.
Le pays a encore besoin de soutiens pour aplanir durablement les défis auxquels il est confronté.
C’est pourquoi, je sollicite à nouveau l’appui du Fonds Monétaire International pour la mobilisation des ressources extérieures afin d’appuyer le processus du DDRR, de la réconciliation nationale, du retour des déplacés et réfugiés, le développement économique de la RCA et l’appui dans la mise en place du financement innovant, tel le Partenariat Public-Privé (PPP).
Enfin, pour éviter toute interruption dans les financements octroyés par la communauté internationale, je sollicite l’accompagnement du Fonds Monétaire International dans la renégociation de nos dettes en général et plus particulièrement celles de nos créanciers hors Club de Paris.
Je finis mes propos en vous renouvelant, Madame la Directrice Générale, notre reconnaissance et nos remerciements pour l’accompagnement que le Fonds Monétaire International ne cesse d’assurer à la République Centrafricaine.
Je vous remercie.