Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Membres du Conseil de Sécurité, Mesdames et Messieurs,
C’est à la fois un honneur et un plaisir de m’adresser aujourd’hui et pour la première fois au Conseil de sécurité au sujet d’une question qui me tient particulièrement à cœur, la paix en République Centrafricaine.
Je profite de ce moment pour vous remercier, Monsieur le Président, et à travers vous, tout le Conseil de sécurité pour le temps qui est consacré ce jour à mon pays malgré le calendrier chargé du Conseil de ce mois ainsi que pour l’invitation qui m’a été adressée
Monsieur le Président,
Mon pays est reconnaissant au Conseil de Sécurité pour tout le soutien qu’il lui apporte dans les efforts qu’’il mène en vue de mettre fin à la crise violente qu’il a connue et sa détermination à faire taire les armes pour parvenir à une paix juste et durable.
Je voudrais, aussi, exprimer notre profonde gratitude à la Mission Multidimensionnelle des Nations-Unies ( MINUSCA), sous le leadership du Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies, Monsieur Parfait Onanga-Anyanga, que je salue pour son excellente coopération avec les autorités nationales centrafricaines, pour son engagement de tout instant à assurer la paix et la protection des populations civiles dans toutes les régions de la République Centrafricaine.
Cette rencontre est une nouvelle opportunité de vous faire le point de l’évolution de la situation politique et sécuritaire objet d’une grande attention de l’Organisation des Nations-Unies qui continue de nous prêter main forte depuis l’organisation des dernières élections générales en fin 2016.
Monsieur le Président,
Nous avons parcouru un long chemin, la période de transition, les élections, la mise place des autorités nationales légitimes.
En prenant les rênes du pays, j’ai fait le pari, certes, audacieux du changement, de la reconstruction et du développement économique malgré un contexte sécuritaire encore volatile.
Notre priorité reste la sécurité et la pacification de l’ensemble du territoire national.
La mise en place du Comité Désarmement Démobilisation Réintégration et Rapatriement (DDRR)/ Réforme du Secteur de Sécurité (RSS)/Réconciliation Nationale (RN) procède de cet objectif et donne l’opportunité à tous les groupes armés de trouver avec le Gouvernement des solutions consensuelles à la question du DDRR et à certaines de leurs préoccupations au moyen du dialogue.
Je salue, en cet instant solennel, la décision du FPRC et des Anitibalaka, aile Mokom, de rejoindre finalement le processus en procédant à la désignation de leurs représentants au sein du Comité Consultatif et de Suivi (CCS) du DDRR.
Il s’agit d’un pas déterminant qui nous permettrait d’aller plus en avant dans la mise en marche effective de ce programme, combien important, pour le retour à la paix.
Pour la prochaine réunion du Comité Consultatif et de Suivi (CCS) du DDRR prévue pour le 23 mars 2017, tous les quatorze(14) groupes armés y seront représentés.
Certes, nous avons enregistré un certain nombre d’avancées, mais la République Centrafricaine a besoin de moyens conséquents pour lancer les réformes nécessaires.
Depuis la Conférence de Bruxelles, nous travaillons avec les partenaires pour développer le cadre de suivi et d’évaluation du plan de Relèvement Consolidation de la Paix en Centrafrique (RCPCA) ainsi que la mise en œuvre du Cadre d’Engagement Mutuel (CEM).
Ces objectifs fondamentaux de restauration de la paix et de la relance du développement économique doivent aller de pair.
Nous déplorons, que malgré les efforts déployés par la Minusca, certains Groupes armés refusent de déposer leurs armes, poursuivant les offensives.
La Minusca en adoptant une posture forte, dans le cadre de son mandat et avec mon accord, a permis non seulement de protéger les populations civiles, de faire échec aux velléités de partition mais aussi et surtout de contraindre les groupes armés réticents au processus du DDRR/RSS/Réconciliation Nationale de nommer enfin leurs représentants au Comité Consultatif et de Suivi du DDRR.
Il est important de préciser que les actions militaires en cours de la Minusca à Bambari ont un caractère exceptionnel et n’occultent pas la dimension du dialogue pour une solution durable.
Je formule le vœu que cette initiative puisse aboutir à des résultats concrets et définitifs dans le sens de l’opérationnalisation du processus DDRR/RSS/Réconciliation Nationale.
Je tiens, par ailleurs, à exprimer notre reconnaissance à la communauté internationale et aux pays voisins qui nous apportent un précieux appui dans le domaine de la RSS et du DDRR, notamment, La CEMAC qui a engagé 2 milliards dans Francs CFA dans le DDRR, le recrutement en cours de 500 policiers et gendarmes, avec l’appui de la Minusca, la formation assurée par l’EUTM à nos forces de sécurité et l’engagement de certains pays de la sous-région à former des bataillons des Forces Armées Centrafricaines(FACA).
A ce stade de mon intervention, je signale que je suis préoccupé par le rythme de formation qu’assure l’EUTM aux éléments des forces armées centrafricaines.
La cadence de formation est lente et ne nous permet pas de disposer, à court terme, d’un effectif en hommes suffisant pour participer aux actions de rétablissement de la paix, de pacification du pays et de protection des populations civiles.
C’est pourquoi, je demande au Conseil de Sécurité de nous aider à trouver un moyen plus rapide à travers la coopération bi ou multilatérale pour former nos forces armées, en complément de la formation qu’assure l’EUTM car le défi de sécurité est très grand, la dimension du pays très grande et tout cela nécessite un nombre plus élevé de militaires à former et à mobiliser.
A cette préoccupation, je voudrais ajouter celle qui concerne la dotation des éléments des forces armées centrafricaines formées en équipements militaires et autres moyens logistiques car il nous est difficile de projeter des militaires formés sur le terrain, c’est à dire dans les régions du pays où il y a des menaces à la paix et à la sécurité des populations sans moyens adéquats.
Aujourd’hui, nous assurons le traitement de quelques 8 000 militaires qu’on ne peut projeter sur le terrain parce que n’ayant pas encore reçu la formation programmée et par faute de moyens adéquats.
Je dis tout cela, Monsieur le Président, parce qu’il y a, en ce moment en République Centrafricaine, un lien étroit entre la sécurité et le développement.
Le développement du pays, tant souhaité par toutes nos populations, qui ont besoin après plusieurs années de crises, d’infrastructures et de services essentiels de base ne peut être assuré, que s’il y a la sécurité.
Le besoin de sécurité exige, par conséquent, un nombre élevé des forces de défense et de sécurité formés, dotés de moyens adéquats et mobilisés sur le terrain aux côtés des forces des Nations Unies qui agissent, pour l’instant seules, faute d’opérationnalisation des forces armées centrafricaines.
Monsieur le Président,
Les conflits entre groupes armés persistent à l’intérieur du pays et causent beaucoup de pertes en vies humaines et de destructions massives.
C’est pour cela que nous sommes déterminés plus que jamais à mettre en place des forces nationales professionnelles, républicaines et qui assureront la protection des populations civiles aux côtés de la MINUSCA.
Je remercie le Conseil de Sécurité des Nations-Unies qui a adopté un mandat robuste en faveur de la MINUSCA pour nous appuyer à sortir de cette crise.
Mais, il est, tout aussi, important de songer à renforcer la MINUSCA en hommes et moyens matériels pour lui permettre d’exécuter au mieux son mandat car j’observe au quotidien les difficultés que la force éprouve étant données l’immensité du territoire et la complexité des problèmes sur le terrain qui exigent plus de moyens.
Monsieur le Président,
Je poursuis mes propos en disant que nous sommes ouverts au dialogue constructif et nous soutenons l’initiative Africaine de paix et de réconciliation qui vient renforcer nos efforts.
Je tiens, cependant, à vous rassurer de notre engagement à respecter les recommandations du Forum de Bangui, notamment sur l’impunité et la justice, dans le cadre de tout Accord politique.
On nous demande d’appliquer l’amnistie aux auteurs de crimes graves et autres atteintes aux droits en oubliant que l’amnistie est une mesure législative qui ne pas relève des compétences du pouvoir exécutif.
Pourquoi l’on continue de faire pression sur les autorités légitimes à accorder un traitement de faveur, c’est à dire l’impunité, à ceux- là qui refusent de reconnaitre la légitimité établie avec le soutien de la communauté internationale, de rallier en temps voulu le processus DDRR et qui continuent impunément d’assurer l’insécurité et d’organiser le pillage des ressources du pays ?
Je me dois de dire que le peuple souverain s’est exprimé, avant même mon entrée en fonction, au cours des consultations populaires à la base et le récent Forum de Bangui en recommandant le principe de « l’impunité zéro » pour la raison que l’amnistie a déjà été testée par le passé mais qu’elle n’a jamais apporté des résultats escomptés, bien au contraire.
.Nous restons, toutefois, ouverts aux échanges sur la question. Parallèlement, la justice se fera librement en temps voulu et sans compromission.
La nomination du Procureur pénal spécial et l’opérationnalisation de la cour pénale spéciale avec l’appui des partenaires, nous permettra de répondre aux attentes de la population qui a trop souffert de cette crise et qui réclame légitimement justice.
La situation humanitaire, comme vous le savez, demeure critique.
Nous devons faire face à des besoins énormes, les populations à l’intérieur de mon pays continuent de fuir leurs domiciles pour se réfugier et se regrouper dans des sites de fortune.
Je lance, ici, un appel pressant à la communauté internationale pour redoubler d’efforts et nous apporter l’appui nécessaire devant permettre le retour des populations déplacées dans leurs domiciles d’origine.
Monsieur le Président,
Malgré un contexte difficile, les partenaires continuent à nous appuyer et nous saluons cet engagement qui est un signe de la solidarité internationale.
La visite du Vice-président de la région Afrique de la Banque mondiale Monsieur Makhtar Diop le 11 mars 2017dans notre pays démontre l’intérêt de cette institution à nous assister dans la relance du développement socio-économique.
La récente visite de la Directrice générale du FMI, Madame Christine Lagarde et d’autres partenaires de haut niveau, nous conforte et nous tenons à les rassurer de notre volonté inaliénable de faire montre de la bonne gouvernance et de la lutte implacable contre la corruption, un fléau qui a longtemps miné la vie de nos institutions.
La République Centrafricaine se trouve à un carrefour de la recherche d’une paix durable, de la reconstruction et du développement.
Le peuple est las de toutes ces crises perpétrées par des groupes armés qui prennent le développement socio-économique en otage.
J’ai toujours plaidé pour le changement.
Oui ! Les progrès sont encore maigres mais nous avons la ferme volonté d’avancer sur la voie du développement et de la reconstruction du pays.
La ville de Bambari, Chef-lieu de la Préfecture de la Ouaka, est un projet pilote où nous envisageons avec l’appui de la Minusca et des partenaires, de renforcer notre présence, de réhabiliter les bâtiments administratifs, d’assurer les services de base… bref garantir le retour à une vie normale à travers la restauration effective de l’autorité de l’Etat.
Nous devons consolider les efforts déployés avec l’appui de la communauté internationale.
La reconstruction du pays nécessite la participation de toutes les parties, l’administration centrale et locale, le secteur privé, la société civile et les partenaires internationaux.
Voilà, Monsieur le Président, l’exposé que nous pouvons faire sur la situation politique et sécuritaire en République Centrafricaine.
Nous vous remercions de nous avoir donné l’occasion de parler de notre pays, particulièrement des défis du moment et de la nécessaire poursuite de l’appui de la communauté internationale.
Je vous remercie encore une fois.