BANGUI —L’ancien premier ministre Nicolas Tiangaye désormais dans l’opposition à Faustin Archange Touadera a appelé au rassemblement pour défendre la démocratie et la paix. Propos tenu dans une interview accordée au RJDH ce 9 mai à Bangui.
Me Nicolas Tiangaye Bonjour : un an après le retour à l’ordre Constitutionnel comment appréciez-vous le fonctionnement du pays sur le plan politique, économique et social ?
Me Nicolas Tiangaye : vous posez la question pour que je donne une réponse sur les aspects politique, économique et social, mais je pense que je répondrai sur les aspects sécuritaires parce que c’est cet aspect qui me semble être prédominant et je n’ai rien à vous apprendre puisque tout le monde sait ce que nous vivons aujourd’hui. S’il y a eu quand même des avancés en termes sécuritaire un peu au niveau de Bangui, nos provinces sont encore sous la coupe des groupes armés. 70% du territoire national est occupé par les groupes armés avec toutes les exactions qui sont commises sur les populations civiles avec le pillage de nos ressources naturelles. Le risque que nous courons sur le plan politique puisse que l’Etat ne peut pas assurer son autorité sur l’ensemble du pays, c’est d’abord une partition de fait que nous vivons aujourd’hui du fait que les groupes armés lèvent les impôts, perçoivent les taxes douanières et pillent les richesses du pays avec la complicité des mercenaires, je pense que c’est un tableau qui n’est pas très luisant.
RJDH : Mais cette situation ne date pas d’aujourd’hui, cela remonte depuis l’avènement de la Séléka et même au moment où vous étiez premier ministre, Monsieur le président.
NT : C’est une situation qui a connu une recrudescence. Depuis que nous parlons du retour à l’ordre constitutionnel, l’analyse que nous faisons de la situation, c’est qu’il y a une recrudescence de la situation sécuritaire, une aggravation de la crise sécuritaire dans le pays au point que même des groupes armés s’affrontent entre eux pour le contrôle de la richesse nationale.
RJDH : Mais selon vous qui est responsable de cette situation ?
NT : le problème n’est pas de dire qui est responsable de cette situation. Vous posez mal le problème.
RJDH : l’Etat doit assurer la sécurité de ces citoyens mais ce n’est pas le cas, il doit y avoir un responsable.
NT : Je vous dis que vous posez mal le problème, parce qu’il faut qu’on parle d’un Etat, il faut que l’Etat dispose de lui-même dispose de ses propres forces de défense et de sécurité. Un pays qui n’a pas d’armée, les forces de défense et de sécurité tout au moins des forces opérationnelles, cet Etat n’est pas d’être appelé un Etat ne semble pas imputer la responsabilité à telle ou telle personne. Nous constatons que depuis plus de 10 ans que rien n’a été fait pour que nous ayons une armée républicaine, multi-ethniques et professionnelle pour défendre le pays.
Le problème aujourd’hui c’est que quand on se trouve devant une telle situation, il faut dégager les responsabilités des chefs politiques et militaires qui sont à l’origine de la déliquescence de l’Etat centrafricain. Je crois que cette question n’a pas encore trouvé des réponses jusqu’à présent.
RJDH : Me Nicolas Tiangaye votre parti la CRPS vient de s’affirmer comme désormais dans l’opposition est-ce la fin ou le début d’une trêve dans l’union sacrée ?
NT : il n’y a jamais eu de l’union sacrée, quelle est le contenu politique de ce qu’on appelle union sacrée ? Je pense la CRPS à l’instar d’autres partis politiques au deuxième tour à apporter son soutien au candidat Faustin Archange Touadera qui a finalement été élu. Après élection présidentielle il ne s’est dégagé aucune forme d’alliance. C’est-à-dire que la CRPS n’a pas signé aucun pacte politique avec ceux qui sont au pouvoir actuellement. Donc la CRPS est un parti qui est libre de choisir le camp dont il entend mener son combat, comme nous sommes un parti libre, nous n’avons pris un engagement avec qui que ce soit, la CRPS un an après l’accession du président Faustin Archange Touadera au pouvoir a estimé que le camp dans lequel elle peut faire entendre sa voix, c’est le camp de l’opposition démocratique.
RJDH : qu’en est-il des conséquences politiques de votre position ? Demanderiez-vous à votre représentant au gouvernement de démissionner ?
NT : Je préfère ne pas répondre à cette question.
RJDH : vous ralliez l’opposition comptez-vous faire alliance à l’URCA de Anicet Georges Dologuélé ?
NT : nous avons estimé qu’il est important de constituer un rassemblement des forces démocratiques qui défendent des idéaux de la démocratie pour mener le combat de la restauration de la paix, nous avons déjà une position claire la dessus, nous disons que tout le monde doit contribuer à la restauration de la paix, à la cohésion sociale et à la défense de l’intégrité national. Cela fait partie des objectifs et des idéaux auxquels nous pouvons nous rassembler.
RJDH : Qu’en dites-vous à ceux qui estiment que votre position est motivée par votre échec à la tête du Conseil économique et social ?
NT : ce sont les élucubrations des ceux qui n’ont rien à dire, je suis un démocrate à la tête d’un parti qui respecte les principes démocratiques. Donc la question d’entrer dans l’opposition ou dans la majorité présidentielle n’est pas question qui doit être pris par le président tout seul, la question a été posée au niveau du directoire politique qui est l’instance d’exécution du parti et ce sont les membres du directoire qui ont décidé à l’unanimité que notre place pour le combat à mener dans l’intérêt politique est dans l’opposition politique. Ce n’est pas une décision de Me Nicolas Tiangaye tout seul.
RJDH : Me Nicolas Tiangaye, votre parti dispose des députés à l’Assemblée nationale dans un contexte de bras de fer entre le législatif et l’exécutif. Quelle est donc la ligne politique de votre parti à l’Assemblée ?
NT : nos députés à l’Assemblée sont les députés de l’opposition, c’est aussi clair que cela.
RJDH : sur les réseaux sociaux, les gens parlent de ce bras de fer débouchant sur deux solutions soit la dissolution de l’Assemblée par Touadera ou la motion de censure par l’Assemblée nationale. Comment analysez-vous cela ?
NT : vous savez, les conditions dans lesquelles nous évoluons aujourd’hui, nous amène à faire preuve de beaucoup de prudence. Et donc la question de dissolution de l’Assemblée nationale ou de motion de censure contre le gouvernement Sarandji, sont des questions très sensibles qui doivent être examinées avec beaucoup de recul.
RJDH : Me Nicolas Tiangaye je vous remercie.
NT : c’est à moi de vous remercier.
Propos recueillis par Jean Fernand Koena