Bangui – Des engins limités en envergure, peu fiables, lents, technologiquement depassés et couteux en entretien. Telles sont les faces cachées de ces desormais fameux drones que la France met généreusement à la disposition de la MINUSCA en Centrafrique.
C‘est en septembre 2016 que Jean-Yves Le Drian, ministre français de la Défense d’alors, en annonçant le retrait des troupes de la SANGARIS, déclarait qu’en retour la France mettrait à la disposition de la Mission multidimensionnelle intégrée de stabilisation des Nations unies en Centrafrique (MINUSCA) des drones (avions sans pilote) tactiques d’observation dénommés Sperwer [SDTI], pour “Système de drones tactiques intérimaire”. Ces engins téléguidés ont pour mission de faire de la collecte de données terrain et d’informer les troupes en temps réel des mouvements d’un ennemi éventuel.
Un soulagement très certainement pour la MINUSCA, dans ses missions de surveillance des déplacements des bandes armés qui pullulent dans les provinces centrafricaines. MAIS……
SPERWER est le nom de ce drone. Nom issu du néerlandais signifiant EPERVIER. Mais voilà, sa conception était bancale d’entrée, inutilement compliquée, et surtout sa technologie est dépassée.
La conception remonte aux années 90. Il n’est pas propulsé par des réacteurs comme les drones modernes du type de l’américain Predator C Avenger, mais par une hélice à l’arrière, et sans turbo compresseur. Ce qui en fait un aéronef lent, très lent, dont la vitesse maximale ne dépasse pas les 160/170 km/h par temps clair, pour un plafond de vol maximal de 3.000 m théorique. Il peut rester en vol 5h et a un rayon d’action ne dépassant pas les 200 km.
Tactiquement, dans un pays comme la RCA, de plus de 620.000 km2, le rendra nécessairement peu performant. Et surtout, en effacera les capacités de drone, puisqu’il faut le déplacer à chaque fois sur un théâtre d’opération à moins de 200 km, et non à distance. Autant se servir d’un hélicoptère.
Autres désagréments, il ne peut décoller de lui-même comme un avion classique, mais d’une catapulte, comme c’était le cas des fusées V1 allemands de la seconde guerre mondiale (1939_1945). Il n’est pas armé ce n’est pas sa mission. Enfin, autre joyeuseté, il n’atterrit pas, mais touche le sol par le déclenchement d’un parachute. Pourquoi faire simple si on peut faire compliqué ?
Donc, une antiquité, une aberration militaire, compliqué à mettre en service, et de surcroît, d’un coût d’entretien faramineux en mode opération (MCO). il faut 6 hommes par machine pour la maintenance de cette chose très capricieuse. Autant dire un gouffre financier et humain.
DES GADGETS PAS FIABLES
Dans un rapport publié par le Sénat français en 2013 sur ces oiseaux de musée, l’on apprenait que sur 30 déployés en Afghanistan, 13 avaient été perdus en opération, tombés du ciel comme des fers à repasser, et que le coût du maintien en condition opérationnelle des 17 restants avait explosé. Donc en gros, 1 sur deux de ces engins tombe en panne en plein vol. Car ils n’aiment ni la chaleur, ni la pluie, ni les vents, ni les hauteurs, un comble pour un avion prétendument tactique.
Des dires mêmes des militaires qui ont eu la mésaventure d’utiliser ces engins en Afghanistan entre 2003 et 2012 :
“Les Sperwers sont des catastrophes. C’est un système à mettre au rancard pour le remplacer par un drone plus sérieux. Cet engin c’est de la merde.”
Livrés à Bangui courant Avril, ils ont été déclarés opérationnels depuis le 20 mai. Et gérés par un détachement du 61e RA (régiment d’artillerie de Chaumont -FRANCE), ils ont mené leurs premières opérations d’observation en RCA récemment, dans la zone de Bambari.