Les oppositions africaines ont la particularité de posséder souvent les mêmes tares que les pouvoirs dont elles dénoncent les actions et auxquels elles veulent succéder.
Les péripéties actuelles des opposants sénégalais au régime de Macky Sall prouvent leur incapacité à constituer une alternative pour une population qui pourtant est en droit d’attendre une offre de gouvernement crédible.
La campagne actuelle pour les législatives du 30 juillet est un bon laboratoire de ce que nos oppositions peuvent sécréter de négatif dans leur volonté d’accéder au pouvoir sans autre projet que celui de vaincre le régime.
D’abord, les opposants significatifs ont mis sur pied une coalition unique qui a fini par péricliter à la suite de querelles d’investitures et de leadership, accouchant ainsi de près de 50 listes concurrentes. Entre vieux routiers qui veulent toujours exister, jeunes pressés mais vides de propositions pertinentes et autres clowns politiciens, l’électeur sénégalais aura droit à un véritable cabinet de curiosités. Le PDS, l’ancien parti au pouvoir, a poussé l’ignominie jusqu’à investir Abdoulaye Wade, 91 ans, tête de liste de sa coalition.
Ailleurs, au Burkina Faso, je n’ai pas été surpris récemment de voir que le CDP, ancien parti de Blaise Compaoré, était convié à la marche de l’opposition officielle dirigée par Zéphirin Diabré. Dans ce pays, les mêmes incohérences et les mêmes ambitions de pouvoir produisent les mêmes effets : une décrédibilisation de l’opposition traditionnelle. Zéphirin Diabré et l’écrasante majorité des gens qui ont battu le pavé aux côtés du CDP pour pourfendre le gouvernement de Roch Marc Kaboré avaient tous souscrit à la décision scandaleuse durant la période de transition d’exclure les anciens partisans de Compaoré de toute compétition électorale. Cette décision était grave, car elle violait les principes démocratiques, et dangereuse, car elle montait des Burkinabés, jugés dignes, contre d’autres, frappés d’indignité nationale au regard de leur simple appartenance politique.
Moins de trois ans plus tard, par opportunisme, l’opposition accueille en son sein ceux qu’elle vouait aux gémonies, pour grossir les rangs de la contestation politicienne.
« Nos hommes politiques nous font honte ! »
Dans toute leur évolution, les oppositions manquent cruellement de propositions pertinentes autres que des invectives et une litanie d’absurdités. Les citoyens ne méritent pas, selon eux, le respect qui exige de proposer un projet de société, un programme ou, a minima, des propositions qui laissent au moins croire à une réflexion sérieuse en amont. En un mot, nos hommes politiques nous font honte !
Entre regroupements contre nature, renonciations idéologiques et opportunisme compulsif, les oppositions n’inspirent plus confiance et poussent même des électeurs désabusés à voter pour des régimes qui pourtant ne gouvernent ni dans la vertu ni dans le respect de leurs engagements. Car, au fur et à mesure de leurs reniements et de leurs postures alambiquées, elles montrent que seul le pouvoir les intéresse et non la volonté d’apporter des ruptures transformatrices dans l’intérêt, notamment, des plus pauvres.
Les cas sénégalais et burkinabé ne sont pas isolés hélas, mais symptomatiques de l’écrasante majorité des oppositions dans nos pays.
« L’opposition congolaise est minable », avait dit le journaliste sénégalais Ousmane Ndiaye relativement aux incohérences de celle-ci dans son bras de fer avec Joseph Kabila et son traitement du retour de la dépouille d’Etienne Tshisekedi.
Je me suis largement exprimé à l’époque sur les Béninois qui avaient choisi les arguments les plus nauséabonds pour fustiger la candidature de Lionel Zinsou à la dernière présidentielle. En Guinée, l’opposition a aussi montré qu’elle ne valait pas mieux que le pouvoir qu’elle combattait. Et la liste est encore longue. Mais le plus important est que ce constat rend urgente l’émergence d’un nouveau leadership politique de rupture et de progrès dont nous pourrions nous sentir, enfin, fiers.