Les groupes armés en Centrafrique ont eu recours au viol et à des esclaves sexuelles à travers le pays comme tactique de guerre pendant près de cinq ans de conflit, a dénoncé jeudi dans un rapport l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch (HRW).
Les commandants des unités ont toléré les violences sexuelles commises par leurs troupes et, dans certains cas, semblent les avoir ordonnées ou y avoir participé eux-mêmes, affirme le document de 176 pages.
De nombreux témoignages de victimes racontant dans le détail des viols à répétition chaque jour et des meurtres de proches, maris ou enfants, renforcés par des entretiens avec des fonctionnaires, des policiers et des médecins, étayent les accusations de HRW.
Dans son document, titré "Ils disaient que nous étions leurs esclaves, violences sexuelles par des groupes armés en Centrafrique", l’organisation a compilé 305 cas de viols et d’esclavage sexuel dont ont été victimes selon elle 296 femmes et filles par des membres de groupes armés entre 2013 et mi-2017.
Les deux principales parties au conflit --les milices Séléka prétendant défendre la minorité musulmane et les antibalaka majoritairement chrétiennes-- ont toutes deux eu recours à la violence sexuelle.
"Les groupes armés ont utilisé le viol d’une manière brutale et calculée afin de punir et de terroriser des femmes et des filles", souligne dans un communiqué Hillary Margolis, spécialiste des droits des femmes à HRW.
"Chaque jour, des survivants vivent avec les conséquences dévastatrices des viols, en sachant que leurs assaillants sont libres, occupent peut-être des fonctions de pouvoirs, en toute impunité", ajoute-t-elle.
HRW estime que le nombre d’abus sexuels est bien supérieur à ce que l’ONG a pu recenser. Les faits commis sont des crimes en Centrafrique mais représentent aussi des crimes de guerre voire même, pour certains, des crimes contre l’humanité. Certaines victimes ont été esclaves sexuelles pendant 18 mois, a précisé l’organisation.
Aucun membre des groupes armés en cause n’a, à ce jour, été arrêté ou traduit en justice pour violences sexuelles, déplore HRW, réclamant la concrétisation aussi rapidement que possible de la Cour criminelle spéciale créée en mai en Centrafrique pour juger les crimes commis par les groupes armés depuis 2003.
Avec un soutien financier, logistique et politique, cette Cour est la seule institution qui pourrait rompre l’impunité dont bénéficient les auteurs des violences, juge HRW qui donne les noms de six dirigeants de groupes armés identifiés par des victimes comme ayant commis des violences sexuelles.