La Centrafrique, où le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, fera mardi sa première visite d'une opération de maintien de la paix, détient le record des interventions internationales sur son sol.
En raison d'une histoire marquée par une instabilité politique chronique, le pays a connu une dizaine d'interventions internationales, sous le drapeau de l'ONU, de l'Union européenne, de l'Union africaine ou d'organisations régionales africaines, mais aussi de la France, ex-puissance coloniale.
- Missions de l'ONU -
Dès l'arrivée au pouvoir d'Ange-Félix Patassé en 1993, le pays se retrouve dans un état de rébellion quasi permanente. Les années 1996-97 sont marquées par des mutineries à répétition dans l'armée.
Les accords de Bangui en 1997 sont censés y mettre fin. La Misab (Mission interafricaine de surveillance des accords de Bangui, 1997-1998), coalition de pays africains sous mandat onusien, est chargée de faire respecter ces accords, sans grand succès.
La Misab sera remplacée par des missions de l'ONU (Minurca, Bonuca, Binuca) censées contribuer à la consolidation de la paix, alors que le pays s'enfonce dans le marasme: sanglantes épurations dans l'armée, tentative de coup d'État en 2001, innombrables exactions des militaires.
- Interventions régionales -
Parallèlement, les organisations régionales créent leurs propres missions de "protection" et de "consolidation" de la paix, avec aussi peu de résultats.
La Communauté des États sahélo-sahariens (Cen-Sad) intervient avec une Force de maintien de la paix et de la sécurité (2001-2002), puis la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (Cemac) avec la Fomuc (2002-2008), suivie par la Micopax (2008-2013) sous l'autorité de la Communauté économique des États d'Afrique centrale (CEEAC).
Pour tenter de lutter contre les rebelles tchadiens et soudanais opérant à partir du territoire centrafricain, les mandats de la Minurcat (2007-2010) et de l'Eufor-Tchad (2007-2009) sont étendus à la Centrafrique.
Lancée en décembre 2013, la Misca (Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine) était placée sous mandat de l'Union africaine. Elle comptait environ 6.000 hommes à Bangui et en province, pour la plupart intégrés en 2014 dans la nouvelle force onusienne, la Minusca.
- Interventions française, européenne, ougandaise et américaine -
Entre 2013 et 2016, Paris lance, avec un mandat de l'ONU, l'opération Sangaris pour faire cesser les violences de la coalition rebelle Séléka (à dominante musulmane) et les représailles des milices antibalaka prétendant défendre les chrétiens. Quelque 2.000 soldats français sont déployés, en appui à la Misca et la Minusca.
Plusieurs soldats de Sangaris seront accusés de viol sur des enfants. En mars 2017, le parquet de Paris a requis un non-lieu dans une enquête sur ces accusations.
Une force européenne, l'Eufor-RCA, est intervenue à Bangui de février 2014 à mars 2015, avec 700 hommes au plus fort du déploiement. Ensuite l'Union européenne a envoyé des formateurs européens pour les forces armées centrafricaines à Bangui (EUMAM-RCA puis EUTM-RCA).
Des troupes ougandaises et américaines qui ont traqué en vain pendant des années l'Ougandais Joseph Kony, chef de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA), une des rebellions les plus sanglantes au monde, ont entamé leur retrait en avril 2017.
- La Minusca devrait être prolongée -
L'ONU a pris le relais de la Misca le 15 septembre 2014 avec la Minusca (Mission de l'ONU en République centrafricaine), créée par la résolution 2149 du Conseil de sécurité et souvent décriée par les Centrafricains pour son manque de réactivité.
Son mandat s’achève le 15 novembre mais devrait être renouvelé.
Dans un rapport remis le 17 octobre au Conseil de sécurité, Antonio Guterres recommande de renforcer avec 900 Casques bleus la Minusca, qui en compte actuellement un peu plus de 10.000.
Le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra avait estimé en septembre, devant l'assemblée générale des Nations unies, qu'il faudrait plusieurs milliers de militaires supplémentaires.
De Casques bleus de la Minusca ont été à plusieurs reprises accusés d'agressions sexuelles et plusieurs centaines renvoyés chez eux.
M. Guterres a dit vouloir "établir une norme pour éliminer ce fléau".