LE PIRE CONTINUE MAIS LA TERREUR CHANGE DE FORME
Les ennemis de la paix en République Centrafricaine ne désarment pas. Le pire est déjà là et il continue. Le dernier acte de barbarie s’est déroulé dans un cabaret, au KM5 à Bangui, faisant redouter une escalade aveugle.
Samedi 11 novembre, entre 19h et 20h, une sourde déflagration a déchiré la nuit : deux grenades offensives lancées par des individus adeptes d’une violence aveugle et déterminés à empêcher toute paix et réconciliation en République Centrafricaine.
C’était une fête d’unité, une fête pour la paix, la réconciliation et le vivre ensemble, organisée par des jeunes, musulmans et chrétiens. C’est elle qui a été prise pour cible par ces barbares d’un autre temps. Elle était animée par le célèbre chanteur centrafricain, Ozaguin, à la frontière du Km5, quartier musulman, et de Miskine, quartier chrétien.
C’est dans ces deux quartiers que les affrontements confessionnels à l’arme blanche ont été les plus brutaux. La foule était compacte. L’espoir d’un vivre ensemble était revenu. Mais, comme le dit justement le Premier Ministre Sarandji pour stigmatiser les assassins : « ceux qui prétendent défendre le peuple, les fauteurs de troubles, qui sont prêts à bondir sur des situations pareilles pour entretenir le chaos… » ont fait parler leur haine de la liberté, de la laïcité et de la démocratie.
Il faudra les pourchasser, sans répit ni faiblesse, et les châtier de manière exemplaire. On pourrait même envisager la peine de mort pour certains de ces criminels particulièrement barbares. Vont-ils, portés par une folie indicible, transformer Bangui en Mogadiscio, la capitale de la Somalie jonchée de cadavres ?
Les autorités centrafricaines doivent, en urgence, prendre des mesures drastiques pour protéger la population et sauver la nation. Ce dernier acte terroriste à la grenade contre une foule sans discernement rappelle furieusement les méthodes aveugles des djihadistes. Il est à craindre qu’en RCA, la terreur n’ait changé de forme et ne soit devenue djihadiste. Il n’est pas impossible que des Centrafricains de confession musulmane aient rejoint les rangs de Daech. Il faudrait pouvoir les repérer, afin de les empêcher d’accomplir d’autres massacres à leur retour.
LE MEILLEUR : LE RETOUR A LA TERRE. UNE SOLUTION ?
On apprend que, dans le cadre du DDDR, d’anciens miliciens antibalakas déposent les armes pour devenir agriculteurs, éleveurs, maçons, menuisiers ou artisans dans d’autres spécialités. A juste titre, le début de ce désarmement volontaire fait naître l’espoir d’une paix si longtemps attendue. Il faut à tout prix occuper ces jeunes, désœuvrés et égarés, qui ont rejoint les bandes armées.
S’ils ont succombé aux chants des sirènes sélékas, c’est bien parce qu’ils étaient de pauvres hères sans emploi. Orphelins d’un pays mal gouverné. Victimes de la cupidité de ses élites. Au chômage malgré leur diplôme en poche. Tous ceux qui se sont perdus dans les bras des bandes armées sont les laissés-pour-compte, les parias (godobés), vivant de rapines et autres crimes.
Quand ton pays ne te permet pas de rêver à un avenir plein de promesses, tu tombes immanquablement dans le puits des oubliés et tu ne songes plus qu’à te révolter. Le bras qui se tendra pour te sortir de là pourra être un mamba noir, tu le saisiras sans hésiter. Autrement dit, n’importe quel bonimenteur pourra t’embrigader si on ne t’offre pas un espace et un horizon d’espérance.
Saluons donc l’initiative d’un ex-milicien, Richard Nueringu, qui a mis sur pied, dans sa ville de Bambari, la coopérative « kékéréké ti yé » (notre avenir, en sango). Elle réunit d’anciens miliciens et miliciennes pour cultiver la terre. Des semences pour l’agriculture sont distribuées. Des chèvres, des boucs, des porcs et autres animaux d’élevage sont remis aux membres de la coopérative. La FAO, l’organisation onusienne pour l’alimentation, apporte son aide dans le cadre du DDDR.
C’est, peut-être, espérons-le, le début d’un réel désarmement, condition sine qua non du cheminement vers la paix et la réconciliation nationale. C’est surtout le défrichage du chemin tortueux qui mène au dialogue inter-centrafricains. Car ce qui se passe à Bambari se passe aussi ailleurs sur le territoire. D’ex-miliciens répondent présents au DDDR, qui leur remet des kits, tels que brouettes, pelles et autres outils des champs pour démarrer.
On sent que les gens en ont plus qu’assez des violences qui s’éternisent. Les miliciens, petit à petit, déposent leurs outils de mort pour se saisir de la houe, instrument de vie. Rappelons que plus de 70% des Centrafricains vivaient de la terre. On peut donc mesurer l’importance de ce retour aux champs.
L’espoir est là, il faut poursuivre.
JOSEPH AKOUISSONNE