La Russie a demandé au Conseil de sécurité de l'ONU une exemption à l'embargo sur les armes imposé à la Centrafrique afin d'équiper deux unités de l'armée de ce pays en cours de formation, a-t-on appris mardi de sources diplomatiques.
Cette demande apparaît cohérente avec la volonté de l'ONU de voir se renforcer une armée faible, dépourvue de formation et d'équipements. Elle a toutefois suscité des inquiétudes de la France sur les conditions de stockage des armes et munitions fournies, selon l'une de ces sources.
La décision d'accepter la demande de la Russie a été mise sous "procédure de silence" jusqu'à mercredi 20H00 GMT, selon des diplomates. Elle sera considérée comme adoptée par le Conseil de sécurité si aucun membre ne vient rompre le silence.
Une première livraison pourrait alors intervenir dès lundi, avec deux autres prévues les 1er février et 1er avril, selon Moscou. Deux bataillons totalisant 1.300 hommes seraient équipés, avec notamment 900 pistolets Makarov, 5.200 fusils d'assaut AKM, 140 armes de précision, 840 fusils mitrailleurs Kalachnikov, 270 lance-roquettes RPGs et 20 armes anti-aériennes. Les livraisons comprendraient aussi des munitions.
La Russie a aussi proposé d'entrainer l'armée centrafricaine à l'utilisation de ces armes, un projet qui doit encore recevoir un feu vert de l'ONU.
Selon une source diplomatique, la France a récemment rompu une première procédure de silence pour demander des précisions à la Russie. Pour Paris, s'il est bien prévu que l'embargo sur l'acquisition d'armes, instauré en 2013, puisse faire l'objet d'exemptions, il faut que ce processus soit étroitement encadré et contrôlé.
A la mi-novembre, le Conseil de sécurité a prolongé d'un an sa force de paix en Centrafrique, la Minusca, en la renforçant de 900 militaires. A terme, cette mission doit être remplacée par les Forces armées centrafricaines (FACA). Fin octobre, le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra avait promis que les premières forces formées par l'Union européenne seraient déployées d'ici à trois mois malgré l'embargo.
La Centrafrique est embourbée dans un conflit depuis le renversement en 2013 du président François Bozizé par une coalition pro-musulmane (l'ex-Séléka), qui a entrainé une contre-offensive de milices pro-chrétiennes autoproclamées d'"autodéfense" (antibalaka, ou antimachettes).
En raison des violences, plus de 600.000 personnes ont été déplacées en Centrafrique et 500.000 sont réfugiées dans des pays voisins. Environ 2,4 millions de Centrafricains, soit la moitié de la population, sont dépendants d'une aide internationale.