BANGUI,—Les deux mois de salaires annoncés par le président Faustin Archange Touadéra, n’ont pas été versés sur les comptes des fonctionnaires et agents de l’Etat. Ces derniers accusent le chef de l’Etat d’avoir fait une promesse que son équipe ne pouvait tenir.
Dans une adresse à la nation à la fin de la revue du FMI il y’a une semaine, Faustin Archange Touadéra annonçait que l’un des deux mois du régime Djotodia devrait être payé avec le salaire du mois en cours. Le dernier suivrait en fin janvier 2018. Le chef de l’Etat est allé plus loin lors de cette déclaration en affirmant sa volonté de payer les arriérés laissés par les régimes Patassé voire Kolingba sans les nommer dans son adresse.
Grande a été la surprise des fonctionnaires et agents de l’Etat lorsque les salaires ont été versés. Les premiers ont informé les autres que seul un mois a été payé. « Ce ne sont pas « deux Sim » comme on nous a dit mais 1 Sim. Quelle honte ? »,confie Aristide, un fonctionnaire qui fait partie des premiers à se rendre à la banque pour percevoir son salaire.
Les fonctionnaires et agents de l’Etat ont accusé le président de la République de ne pas tenir sa promesse. « La parole d’un chef d’Etat doit être sacrée c’est-à-dire que lorsque le commandant en chef parle, les actes doivent suivre automatiquement. Mais avec Touadera, ce n’est pas le cas. Il annonce deux mois et on nous donne un mois avec des prétextes. Il n’y a rien à attendre d’eux », déplore un homme en tenue rencontré ce matin devant la BSIC.
Solange travaille dans un ministère à Bangui. Elle se dit choquée et déçue. « Un homme est respecté à partir de sa parole mais lorsque vos paroles contredisent vos actes, c’est que vous ne méritez plus rien. C’est malheureusement le cas pour ceux que nous avons par hasard élus », indique-t-elle.
Les fonctionnaires massés devant Ecobank au centre-ville de Bangui, évitent d’aborder la question, « On ne sait pas qui est qui ici et personne ne peut vous répondre sur cette question mais sachez que nous sommes tous déçus et c’est tout », lance un de ces fonctionnaires que nous n’avons pas pu identifier. En sortant du groupe, deux de ces fonctionnaires nous ont suivis. Ils tenaient à parler. Francine, refusant de décliner son identité estime que le chef de l’Etat a voulu faire un effet de sensation dans son discours. «Ce ne sont pas « deux Sim ». En réalité, en perte de vitesse dans l’opinion, il veut créer la sensation pour espérer remonter la pente mais c’est encore plus grave pour lui qu’il ne peut l’imaginer ».
L’autre se présentant comme un cadre de la santé parle de tromperie. Il vitupère en ces termes: « le président a trompé toute la nation. Ce qu’il ne peut tenir, il l’a annoncé, c’est cela la tromperie et pour un chef d’Etat, c’est dommage et honteux. Il n’inspire plus respect et dignité ».
Dans le micro-balade du RJDH, il n’a pas été possible de rencontrer un seul fonctionnaire qui puisse accepter le revirement intervenu entre l’annonce du payement de deux mois et le versement d’un seul mois. Dans les couloirs du département des finances, des cadres interrogés sous anonymat reconnaissent qu’il y a eu précipitation. « Tout n’était pas prêt lorsque le président a annoncé la nouvelle. On a tenté de précipiter les choses pour sauver la situation mais, le délai était court. En réalité, le président s’est précipité », confie sous le strict anonymat un cadre des finances.
Pour masquer cette précipitation, des formalités ont été imposées aux fonctionnaires et agents de l’Etat à qui on a demandé de déposer pour étude, leur carte professionnelle, des relevés bancaires et les bulletins de paie de certains mois. En réalité, il s’agit, selon nos sources des stratégies pour gagner du temps car ces formalités ont déjà été faites, il y a quelques mois par ces derniers sur demande du gouvernement.