C’est à ADDIS-ABEBA, capitale de l’Éthiopie, que s’est tenu, du 23 au 29 janvier, le 30ème Sommet de l’Union Africaine. Tous les chefs d’État ont été conviés à se pencher au chevet de leur continent. Continent bicéphale en matière de développement et de stabilité.
D’un côté, en effet, une Afrique prometteuse, avec une croissance à faire pâlir certains pays développés ! Une jeunesse diplômée qui a amorcé le retour sur le continent pour participer à son développement. Des start-up qui fleurissent un peu partout, initiées par de jeunes Africains à l’entreprenariat bondissant comme de jeunes lions. Des investisseurs étrangers qui courtisent avec avidité cette nouvelle Afrique émergente.
De l’autre côté, on entend encore, mais de moins en moins, les Afro – pessimistes fredonnant leur musique de pythies annonciatrice des pires nouvelles. L’Afrique n’est vue, par ces oiseaux de mauvais augure, que sous l’angle des catastrophes : instabilité politique, famines, épidémies de toutes sortes, pauvreté endémique et développement compromis.
Désormais, c’est une nouvelle Afrique qui frappe avec insistance à la porte du monde. Les chefs d’État du continent doivent s’engager résolument dans une bonne gouvernance de leur pays, en tournant le dos aux errements du passé qui ont plombé l’essor de l’Afrique.
Le développement doit être leur priorité. Il faut qu’ils se consacrent à assurer le bien-être de leur population. Les injustices sociales et les impunités doivent être jetées dans les poubelles de l’histoire.
Une nouvelle Afrique doit surgir. Fière, combattante ! Une Afrique intégrée, avec une zone de libre-échange comme le suggère le président Paul Kagamé. Avec sa démographie et la force de sa jeunesse, l’Afrique unie sera une force économique, avec laquelle il faudra compter.
CENTRAFRIQUE : LA VOIX DISCORDANTE D’IDRISS DEBY ITNO
Les chefs d’État africains ont rejeté toute impunité pour les chefs de guerre fomentateurs du chaos sanglant centrafricain. Avec justesse, ils ont dit avec force que la justice était un préalable à la recherche de la paix et de la réconciliation en Centrafrique.
A l’inverse, le président du Tchad a, pour sa part, martelé que la paix ne pourra advenir que par une impunité générale, accordée aux auteurs des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis en Centrafrique.
En agissant ainsi, Idriss Deby veut sauver la tête de ses mercenaires qui guerroient en Centrafrique. Le rapport de l’ONU mettant en cause sa soldatesque en RCA avait provoqué son courroux. Il était même allé jusqu’à convoquer le président centrafricain à Ndjamena pour le sommer de joindre sa voix au rejet de ce rapport !
Il est tout à fait regrettable que le président Touadera ait soutenu les dénégations de celui qui est en partie responsable de l’instabilité chronique centrafricaine. Le rapport de l’ONU décrivait le comportement choquant de soldats tchadiens coupables d’avoir tiré sur un groupe de manifestants désarmés à Bangui. Ils n’arrêtaient pas, d’ailleurs, de se comporter en Centrafrique comme si c’était un protectorat tchadien.
Demander l’impunité pour ces actes barbares commis en Centrafrique est une injure à la mémoire des victimes. Un mépris pour ce pays et son peuple. Nous demandons à Idriss Deby, en attendant sa comparution devant une Cour Pénale Internationale, de joindre ses efforts à la recherche de la paix en Centrafrique. Depuis des millénaires, le peuple tchadien est un peuple frère des Centrafricains. C’est son président qui pose problème avec ses ambitions d’expansionnisme territorial. Pour Idriss Deby, la République Centrafricaine ne peut être qu’une proie.
Le souhait quasi unanime des dirigeants africains de rechercher le dialogue inter-centrafricain et de dire non à l’impunité des criminels ne peut que satisfaire l’immense besoin de justice du pays tout entier.
REJET DES ACCORDS DE PARTENARIAT ÉCONOMIQUE ENTRE L’AFRIQUE ET L’UNION EUROPÉENNE
Les États africains doivent parler d’une seule voix. Refuser les accords injustes et déséquilibrés que leur ont imposés les Européens en matière d’échanges commerciaux. Avec un cynisme insupportable, ces derniers demandent aux pays africains de lever leurs barrières douanières pour inonder le continent de leurs produits manufacturés, qui, souvent, ne conviennent pas aux besoins des populations. Inversement, pour les produits africains, les barrières douanières européennes sont hermétiques, comme elles le sont pour les migrants, qui se fracassent tous les jours contre les murs et les barbelés de l’Europe.
Cette attitude des pays européens a réduit drastiquement les exportations africaines, perpétuant ainsi les mentalités coloniales et la domination de l’Afrique par les puissances étrangères.
Il faut donc impérativement que les Africains négocient avec l’UE de nouveaux accords équitables en matière d’échanges commerciaux et qu’ensemble, ils trouvent un terrain d’entente. On ne peut plus continuer comme au beau temps des comptoirs coloniaux…
P.S. : on a appris que les chefs d’État africains réunis à Addis-Abeba n’ont pas stigmatisé avec la force nécessaire les éructations ignobles de Donald Trump sur l’Afrique.
Il semblerait qu’une lettre datée du jeudi 25 janvier en provenance de la Maison Blanche leur ait été adressée pour leur assurer que « les États-Unis respectent profondément les partenariats et les valeurs partagés avec l’Union africaine, ses pays membres et ses citoyens à travers le continent…les États-Unis respectent profondément les Africains ».
Il n’empêche que l’absence de réaction immédiate et vigoureuse de la part des chefs d’État africains peut être considérée comme une faute politique. Ce sont de vraies excuses qu’ils devraient demander au président des États-Unis. Le temps du mépris pour l’Afrique est à jamais révolu ! C’est un continent qui refuse désormais de courber l’échine.
JOSEPH AKOUISSONNE-DE KITIKI