Tel un fruit mûr, le désormais Ex-Président Sud-africain est tombé. Cerné de tous côtés, aussi bien par l’opposition que par sa propre formation politique, « African National Congress » (ANC), Jacob ZUMA n’a pu résister face à la puissante machine politico-médiatico-judiciaire déployée contre lui.
Cette sorte de « Tsunami politique » avait été annoncée depuis l’an dernier par l’un des grands journalistes de notre continent en la personne de M. Béchir Ben YAHMED, le « Boss » de l’hebdomadaire Jeune Afrique dans un éditorial daté du 18 novembre 2017 sous le titre : « Au bord de l’explosion« .
Dans cet article que je viens de re-lire, Béchir Ben YAHMED ou BBY, tel un visionnaire prophétisait l’évènement avec une certitude déconcertante.
En lisant l’article à cette époque, je dois avouer que malgré le respect et l’admiration que je voue à cet homme, j’étais tenté de croire qu’il était, lui aussi, atteint par ce fléau qui sévit sur notre continent : « l’Afro-pessimisme« .
« Je crois devoir attirer l’attention sur la situation de deux pays africains : l’un au nord du Sahara, l’autre au sud ; tous les deux sont des démocraties et des nations relativement évoluées. Mais, leurs économies vont très mal, et leurs gouvernements actuels sont, à mon avis, dans l’incapacité de les sortir de la nasse où ils se trouvent. Tous deux entreront bientôt dans une année préélectorale, puisqu’ils seront appelés, en 2019 à élire ou réélire l’homme ou la femme qui présidera à leurs destinées. Je crains pour eux, avant cette échéance, de graves turbulences sociales et peut-être politiques. Leur éventuelle déconfiture, si elle pouvait être évitée, aurait un retentissement continental et susciterait des réactions au-delà de l’Afrique. Il s’agit de la Tunisie, pays de 11 millions d’habitants, et de l’Afrique du Sud, qui en compte 56 millions d’habitants. Les chiffres que j’ai sous les yeux et que je vais vous soumettre sont affolants. Ils sont annonciateurs d’une crise grave pour l’un ou l’autre, voire pour les deux dès 2018 » écrivait-il à l’époque.
Ce que je croyais, ainsi que d’autres, relever d’un charlatanisme intellectuel ou d’une hérésie, se révèle d’une éclatante véracité.
Je suis convaincu que très peu d’africains, comme moi et non africains, avaient pris au sérieux l’avertissement de BBY lorsqu’il écrivait encore « Nul n’en doute plus : Jacob Zuma est un Président corrompu qui sert davantage ses intérêts et ceux de son clan que ceux de son pays. C’est l’exact opposé de Nelson Mandela. Ce dernier a libéré le pays de l’apartheid et l’a mis sur la voie. Son successeur immédiat Thabo MBEKI, a géré l’héritage tandis que Jacob Zuma est en train de le détruire. Prévu du 16 au 20 décembre, le prochain congrès de l’ANC désignera le nouveau président du parti lequel succèdera à Zuma à la tête du pays. Si Jacob Zuma parvient à se donner un successeur de son choix qui le protège des poursuites judiciaires qu’il a largement méritées, l’Afrique du Sud perdra son âme, l’œuvre de Mandela sera détruite, et le pays explosera »
Fort heureusement, l’Afrique du Sud n’a pas explosé mais Zuma est tombé comme BBY l’avait annoncé.
Quant à la Tunisie, pays d’origine de BBY, nul ne sait jusqu’où conduira la crise sociale et politique dans laquelle est empêtré ce pays.
BBY est loin d’être un prophète de malheur, c’est plutôt un « éveilleur de conscience » dont le rôle fondamental est de donner l’alerte. C’est un homme expérimenté, doté d’une verticalité et d’une probité morale et intellectuelle qui continue d’honorer notre continent à travers ses réflexions et analyses à l’exemple d’éminents journalistes ou penseurs de l’Hexagone tels que Raymond ARON, Hubert Beuve-Mery, Jean DANIEL, etc.
Cette race d’hommes, en voie d’extinction, sans lesquels toute société court le risque d’être manipulée par des charlatans comme l’écrivait naguère l’un des Encyclopédistes, Denis DIDEROT.
Oui, c’est ici le lieu de reconnaitre la justesse et la pertinence de l’analyse faite par BBY au sujet de l’Afrique du Sud.
Oui, il faut lire sérieusement, analyser lucidement et méditer profondément les éditoriaux de BBY, l’un des derniers mohicans de notre continent.
Qu’il me soit permis de rappeler cette sentence formulée par BBY, à la manière du Cardinal De RICHELIEU, véritable enseignement à l’endroit des Princes qui nous gouvernent : « … Le mal le plus grand dont sont atteints beaucoup trop de pouvoirs africains, qu’ils infligent à leurs peuples, qui est facteur de fragilité et source de violence, est le « sectarisme » : mal ou bien élu, le Président ne parvient pas à se hisser au niveau de la fonction. Au lieu de se mettre au service de la Nation tout entière, d’être le Président de tous ses concitoyens, il ne se préoccupe que des siens : sa famille, son ethnie, sa région et lorsqu’il en a un, son parti » (source : Jeune Afrique Intelligent n°2236 du 16 au 22 novembre 2003)
Honorable Bertin BEA,
Ancien Ministre,
Parlementaire Panafricain
Bertin Béa