Début janvier 2018, le poisson congelé s’est fait bien rare sur les étals des marchés camerounais. A l’origine de cette situation, avait-on alors appris dans une correspondance adressée par le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, à son homologue des Finances de l’époque, Alamine Ousmane Mey, se trouvaient les difficultés d’approvisionnement du marché local.
En effet, révélait le document sus-mentionné, les importateurs camerounais ne pouvaient plus «payer leurs fournisseurs, du fait des retards dans le transfert des fonds et du renchérissement des coûts des transferts».
«Afin de prévenir les risques éventuels de dérapage, je vous serai (Sic) gré des mesures que vous pourriez être amené à faire prendre par les banques, pour diligenter les opérations de transfert visant ce produit particulièrement sensible.», suggérait le ministre du Commerce.
Du côté des banquiers, un doigt accusateur est pointé en direction de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC). L’institut d’émission des six Etats de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, RCA, Guinée équatoriale, Tchad) a, en effet, entrepris de resserrer l’étau autour des transferts de fonds vers l’étranger, conformément aux recommandations issues du Sommet de crise des chefs d’Etat de la Cemac de décembre 2016, à Yaoundé, la capitale camerounaise.
Interpellé sur la question le 21 mars 2018, au sortir de la première session du Comité de politique monétaire de la BEAC, pour l’année 2018, le gouverneur de cette banque centrale, le Tchadien Abbas Mahamat Tolli, se veut plutôt rassurant. «Notre zone monétaire dispose de normes sur le transfert de fonds. Le respect de ces normes n’est pas un obstacle à l’activité économique.», précise-t-il. Avant d’ajouter : «par le passé, il y avait un certain laxisme. Les normes n’étaient pas appliquées avec rigidité. Aujourd’hui, nous avons des équipes qui étudient les dossiers de transferts, et aucun dossier n’est rejeté sans notification des motifs de ce rejet par la Banque centrale».
Par ailleurs, souligne le gouverneur de la BEAC, en dépit des mesures prises lors du Sommet des chefs d’Etats de la Cemac de décembre 2016, la BEAC n’a «ajouté aucune mesure supplémentaire» à sa réglementation en matière de transferts de fonds.
A contrario, soutient Abbas Mahamat Tolli, l’application des directives édictées par les chefs d’Etats de la Cemac, lesquelles visaient à «sauvegarder le régime de change et à consolider la position extérieure» des pays de la Cemac, qui faisaient alors face à une baisse drastique de leurs réserves de change auprès du Trésor français ; a plutôt été positive pour les économies de la zone Cemac. «Après une stabilisation, aujourd’hui nos réserves ont amorcé une remontée. Si nous n’avions pas assez de réserves, l’activité économique serait en difficulté, puisque les pays de la Cemac importent beaucoup.», explique le gouverneur de la BEAC.
Brice R. Mbodiam