Condamné en première instance par la CPI à 18 ans de prison pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en Centrafrique, l’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba a été récemment acquitté en appel.
DES VICTIMES OUBLIÉES
Hallucinant ! Choquant ! Inadmissible ! Quel mépris pour la vie des Centrafricains ! Ca vaut combien un Centrafricain ? Leur bourreau va se présenter aux prochaines élections et peut-être devenir le président d’un des plus grands pays d’Afrique, leur voisin !
Les crimes de Bemba et de sa bande de mercenaires en Centrafrique sont indicibles : viols, razzias, incendies de villages, rackets des populations. Ses tueurs, déchaînés et sanguinaires, ont massacré des milliers de Centrafricains innocents. Cette tragédie a commencé en 2002, quand le président Ange-Félix Patassé, menacé d’un coup d’état par son chef d’État-major François Bozizé, a fait appel à Jean-Pierre Bemba pour le secourir. Le fondateur du Mouvement de libération du Congo a débarqué à Bangui avec ses milices, qui se sont comportées en barbares d’un autre temps.
Les victimes de Bemba sont innombrables. Quant aux milliers de rescapés mutilés, ils attendaient jusqu’à aujourd’hui que justice leur soit rendue. Patatras ! La mauvaise et terrible nouvelle vient de tomber de La Haye, comme un coup de massue sur leur tête. Ils s’attendaient à ce que l’ex-vice-président de la République Démocratique du Congo soit condamné à la perpétuité : le voilà libéré au bout de dix ans de prison !
FAIRE APPEL CONTRE UN ÉLARGISSEMENT INTOLÉRABLE ?
A propos de l’affaire Bemba, Ange-Maxime Kazagui, porte-parole du gouvernement, a déclaré au micro de RFI : « le gouvernement et le peuple centrafricains sont dans une grande consternation. Nous nous concertons, nous, partie centrafricaine, pour voir s’il y a des recours. C’est un très mauvais signal qui a été lancé par la justice internationale. Des Centrafricains par milliers ont été lésés et se voient dénier cette justice. Cela pose un problème de confiance par rapport à la justice internationale. »
Soit. Mais le temps presse. Est-ce qu’il ne faudrait pas faire appel immédiatement et user de tous les recours possibles ? Jean-Pierre Bemba va se présenter aux élections présidentielles dans son pays. Il a de fortes chances d’être élu. Protégé par son immunité présidentielle, il sera intouchable durant son mandat.
Bernadette Sayo, présidente de l’Organisation pour la compassion des familles en détresse, résume bien le ressenti et la colère des victimes, toujours au micro de RFI : « c’est un nouveau crime aujourd’hui. C’est extrêmement grave moralement pour les victimes On fait confiance à un tribunal international et on en arrive là. Chaque victime, l’État centrafricain, tout le monde attendait que la justice se fasse équitablement par rapport à la gravité des faits. Jean-Pierre Bemba Gombo est le chef, le haut responsable …
Les chefs rebelles en Centrafrique qui sont concernés par des mandats d’arrêt pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité doivent se frotter les mains ! La Cour Pénale Spéciale de Bangui (CPSB) qui doit les juger est en effet une émanation de la Cour Pénale Internationale (CPI). L’acquittement de Bemba est donc pour eux un signe qui leur ouvre les portes de l’impunité !
Nous ne voulons nous immiscer dans les décisions prises par la CPI. Nous ne les critiquons pas. Mais force est de constater l’acquittement de Jean-Pierre Bemba pose un énorme problème d’équité. La méfiance des Africains vis-à-vis de la Cour Pénale Internationale, qu’ils qualifient de tribunal des Blancs pour juger les Noirs ne va faire que croître.